Partie 1 : Lui et moi, c'était nous

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                                                                   SABRINA

« Garce un jour, garce toujours », telle est ma devise.

Je mentirai en disant que je n'aime pas que les gens me portent autant d'attention. Bien au contraire, j'adore. Je suis assez extravertie et je ne le cache pas.

Si je devais me décrire, je dirais que je suis la parfaite garce dans toute sa splendeur. Je m'explique, je suis la nana la plus populaire de mon bled, je suis en couple avec le quarterback vedette de l'équipe de football et je méprise tout le monde.

Contrairement aux clichés habituels, je ne suis pas comme ça pour me protéger des autres ou par pure méchanceté pour me revaloriser. C'est juste dans ma nature.

Bien sûr, être au sommet signifie quelques sacrifices : je ne peux me fier à personne. Dans ce monde, les gens essaieront toujours de tirer profit de vous au mieux de leur intérêt. Je suis bien placée pour le savoir.

Et comme tout le monde j'ai mes petits secrets. Cependant les miens sont bien à l'abris, il serait dommage que la presse à scandale en sache quelque chose. Pour eux comme pour moi.

- Sabrina, tu m'écoutes ?

Non.

- Plus depuis tout à l'heure.

Ah ! Qu'est-ce que je ne donnerai pas pour qu'il ferme sa putain de belle gueule celui-là, pensais-je.

Un beau brun aux yeux verts se penche vers moi pour m'embrasser la clavicule et il me suçote délicatement la peau. Je soupire d'aise.

- C'est pour te punir, me susurre-t-il doucement.

Cet ingénu est mon petit-ami, Alexander QUINN. Qui ne le connaît pas ? Ce mec est une star du foot, son avenir est prometteur et déjà tout tracé.

- Ecoute mon chou, tu m'ennuies. Moi je veux de l'action, me plaignais-je.

Je pique son intérêt à vif, son regard perçant rencontre mes yeux.

- Tu sais que beaucoup de filles aimeraient être à ta place, déclare-t-il avec son petit air supérieur.

- Peut-être bien mais elles ne le sont pas et ne le seront jamais.

- Tu es bien sûre de toi.

Je souris sournoisement, je le manipule vraiment facilement ce gars. Il ne va pas tarder de faire ce que j'attends exactement de lui.

- Toujours ! Mais après tout tu fais ce que tu veux, balançais-je indifférente.

- Vraiment ? Dans ce cas...

Il me prend par les hanches et m'enlève de ses genoux pour me rasseoir sur le banc. Je le fixe avec un air de défi. Une fille se tient devant nous depuis tout à l'heure avec sa copine, elle essaye d'attirer son regard vainement en trémoussant son gros postérieur. Elle tombe à pic cette idiote. Elle est pile dans le viseur d'Alexander. Par conséquent, il va aller l'aborder et la draguer ouvertement sous mes yeux pour me rendre jalouse. Ce gars aime par-dessus tout être le centre de l'attention et être désiré, alors autant dire qu'avec moi il prend cher.

Je le laisse faire, sachant pertinemment qu'il reviendra toujours vers moi. Et grâce à lui je vais enfin pouvoir m'amuser.

Je trépigne littéralement d'impatience, mes jambes commencent à me démanger. Mes pulsions sont d'autant plus intenses lorsque Alexander se met à exécuter à la perfection ce à quoi je m'attendais.

Il la prend par la taille et lui fait son numéro de charme à deux balles, pour lequel il est plutôt doué je tiens à préciser. La fille ne se sent déjà plus pisser, elle est rouge pivoine et se colle à lui plus que de raison. La copine de la fille s'en va, prétextant avoir un truc à faire.

Je les laisse s'amuser ainsi pendant une dizaine de minutes. Puis quand le spectacle ne me divertie plus, je me lève et avec ma démarche de peste par défaut j'arrive à leur hauteur. Le vrai show va commencer.

- Eh toi ! interpellais-je la fille. Tu crois faire quoi là ?

Je ne lui laisse pas le temps de répliquer et reprends.

- Tu touches à mon mec non ? Tu t'es prise pour qui ? Désolé de te le dire mais tu es horrible à regarder, je pensais que tu le savais déjà mais apparemment il faut te le rappeler. Et tu es vraiment stupide à ce point ? Il ne fait que jouer avec toi, tu n'es absolument pas son type. Disons qu'il préfère les femmes intelligentes avec du charisme. Oh ! Mais ce n'est pas ton cas. Dégage maintenant !

Je lui ai balancé avec véhémence tout ce que je pensais d'elle. Au moins je suis honnête. Les yeux de cette pauvre fille s'embuent de larmes qu'elle a du mal à contenir. Et comme à chaque fois que je fais ce genre de scène, la fille en question a trop peur de moi pour me faire quoi que ce soit et elles finissent toutes par s'en prendre à Alexander avec de s'enfuir humiliée.

Ça ne rate pas. Elle lui assène une baffe monumentale et s'en va en pleurant. Je souris, satisfaite. Alexander qui n'avait encore rien dit depuis le début de mon intervention se tient la joue que l'autre a méchamment frappé. Il rit, je ne m'y attendais pas donc je sursaute légèrement. Qu'est-ce qui lui prend, il aime ça maintenant ? Il y a peut-être pris goût.

- Tu as perdu la tête ? demandais-je incertaine.

Il reprend contenance et m'adresse un sourire mauvais.

- Toujours aussi douée à ce que je vois. A chaque fois c'est moi qui prends tout.

Au moins il est conscient de son infériorité.

- Tu ne m'apprends rien, dis-je dédaigneuse. Mais si ça te dérange tu n'as qu'à rompre avec moi.

Mon ton était on ne peut plus sérieux, je ne rigole pas. Je le préviens juste, qu'il ne se fasse pas des films.

- Oh non ma chère, tu es à moi et rien qu'à moi. Je ne te laisserai pas filer aussi facilement.

Ah oui ! Aurais-je oublié de préciser que lui et moi ne nous aimons pas particulièrement. Nous ne sommes en couple que pour notre image et par évidence. Mais pour autant, je peux lui faire toutes les méchancetés que je veux, il ne rompra jamais. Tout simplement parce qu'il est très possessif et que pour lui je représente un objet de collection très rare.

Donc il me chérit et me garde en sécurité dans ses filets, enfin c'est ce que je lui laisse croire. Il est tellement accro qu'il a peur que je ne disparaisse de sa vie et donc il passe son temps à me surveiller en toute discrétion. Il a plutôt raison, c'est vrai que je suis assez volatile et j'ai une tendance à disparaître. C'est ce qu'il doit le plus craindre.

Lui et moi nous sommes connus il y a de cela cinq ans, nous n'étions qu'au collège. A cette époque nous sommes sortis ensemble. Je pourrais qualifier cette amourette de jeunesse de sympathique divertissement. Il tenait énormément à moi mais moi je désirais ardemment une trop grande liberté qu'il ne me laissait pas atteindre. Puis j'ai disparu du jour au lendemain sans le prévenir et ce pendant trois ans.

C'est pendant cette longue absence que je me suis épanouie pour devenir celle que je suis. Je ne le regrette pas.

Plus tard, quand je suis revenue, il avait bien changé et moi aussi. Notre relation était bien évidemment plus la même, rien d'étonnant. Personne ne me connaissait mais je me suis fait ma place par la simple force des choses, j'étais née pour ça.

Alors bien qu'Alexander ne soit plus celui que j'ai connu, c'est-à-dire ce petit garçon aimant et attentionné qui m'aimait, nous avons fini en couple parce que c'est ce que les autres attendaient de nous. Donc notre relation est purement intéressée. Mais malgré tout, il ne cesse d'être obsédé par moi. Je dois hanter ses nuits depuis cinq ans. Je pense que sans le vouloir j'ai créé chez lui un sentiment d'abandon.

Cette relation particulière entre nous dure depuis deux ans. Donc si ce manque d'attention de ma part l'empêche de me quitter, ce qui me retient est ma culpabilité vis-à-vis de lui. Il s'agit bel et bien d'une relation empoisonnée.

Il me prend la main et me tire vers lui. Il me prend dans ses bras et je réponds à son appel de détresse.

- Tout ira bien, je suis là. Je ne te laisserai plus seul, tu as ma parole.

Mes chuchotements se fondent alors dans le silence de l'hiver, un peu, beaucoup, passionnément, à la folie, pas du tout.


Méli-méloOù les histoires vivent. Découvrez maintenant