Chapitre 37 : Monroe

25 2 2
                                    







Violent. C'est le mot qui décrit le mieux mon retour à la réalité. J'ai l'impression qu'il s'est passé des jours depuis que j'ai retrouvé Agnès, mais non c'était il y a à peine quelques heures.  

J'arrive en trombe devant le Jabba, et reste en double file. Bart qui m'attend sur le trottoir grimpe aussi vite dans ma caisse et nous nous mettons en route. Il me dévisage avec un sourire salace.

- Dur nuit ?

- Et toi ?

- Peut-être bien. Mais moi j'étais à l'heure. Alors ?!!

Je rigole légèrement nerveux comme un ado qui vient de perdre son pucelage. Il tape dans ses mains et éclate de rire.

- Je le savais !

- Ah bon ?

- Tu n'as pas vu ta tronche quand tu la matais !

Je secoue la tête. Je ne peux rien dire pour me défendre pour le coup. Je remarque que j'ai pris la route vers le club de Javier mais sans aucune certitude.

- Tu sais où on le retrouve ?

- Ouais, on doit le rejoindre au Blue moon.

Je bifurque et prends la route vers le bar. Bart essaie de me cuisiner mais je reste évasif. J'ai bien repéré les traces sur son bras, mais je me tais si je commence à l'interroger aussi j'aurais plus d'excuses pour me la fermer. Je me gare sur le parking. Je déteste tellement ce bar.

- En passant, Mo' ton t-shirt est à l'envers.

- Oh merde ! Je me suis habillé à l'arrache.

- Ouais j'ai vu !

Il affiche une expression aussi salace que satisfaite. Je rectifie le tir vite fait. Je renfile ma veste, et y glisse mon balisong. Je n'aime pas entrer dans ce trou à rat sans être armé. 

Nous avançons silencieusement, lui comme moi nous changeons d'attitude quand nous bossons. Nous trouvons rapidement Javier attablé seul, ou du moins en apparence.

- Tiens Starsky et Hutch ! Vous en avez mis du temps !

- Ce serait plus simple pour tout le monde si tu ne nous fuyais pas toutes les semaines !

- Figurez-vous que pour cette fois j'y suis pour rien !

- Pauvre chou, se moque Bart.

- Hé Hulk il va éviter de se foutre de ma gueule !

Javier tape du poing sur la table, son accent hispanique est un peu plus présent quand il s'énerve, je prends les devants et calme le jeu avant qu'il ne passe au stade « hijo de puta ».

- Il s'est passé quoi ?

Il soupire.

- Ecoutez, je ne veux pas que Tino s'imagine des choses. Mais je me suis fait approcher par un flic, enfin je suppose que s'en est un. Il m'a proposé un accord pour moi et pour mon fils. Après ce qu'il a fait il risque de prendre perpète... enfin bref. Il voulait que je balance mon fournisseur en échange de l'immunité pour moi et José. J'ai refusé. Vous pensez bien que son immunité ne me servira à rien si je bouffe les pissenlits par la racine. Ma réponse ne l'a pas franchement enchanté, il a passé toute la  journée à me harceler, et à me menacer. Bien sûr, j'ai continué de fermer ma gueule ! Mais il ne m'a pas lâché ce cabrón. Je ne pouvais pas le ramener dans mon club !

- Non c'est sûr. Il te surveille encore ?

- Non j'ai des gars postés un peu partout, il est parti en fin d'après-midi, et ne s'est pas repointé. Mais j'ai préféré ne pas prendre de risque.

Bart acquiesce et lui demande une description du type en question.

- Un grand blond hautain, le genre de mec qui aime jouer au cowboy, mais avec une tronche de dieu nordique. 

Je soupire un grand blond, trop sûr de lui, ça me rappelle quelqu'un... Je savais que la présence de Jeremy aller foutre la merde. Et j'en ai la preuve.

- Tu as d'autres infos ? L'interroge Bart.

- Bien sûr, il m'a filé son nom, son numéro de portable et j'ai ajouté sa mère sur Facebook.

- Hé du calme.

- Non je ne me calmerais pas ! Si on n'accepte de payer aussi cher c'est aussi pour avoir le cul à l'abri, et ne pas à avoir à subir ce genre de situation. Si Tino ne prend pas la situation au sérieux vous pourrez lui dire que notre accord est caduc.

- Je suis sûr que Tino ne prendra pas la situation à la légère.

- Dites-lui bien, que j'ai rien dit. Je suis loyal.

Il finit par nous balancer l'enveloppe avec le cash sur la table.

- Il le sait, ne t'en fais pas à ce sujet.

Nous récupérons l'argent, et la commande de Javier pour la prochaine livraison.

Nous sortons sous le regard en biais des gars chargés de la sécurité de Javier, je cherche des yeux un visage connu, qu'il soit d'un camp ou de l'autre, mais rien.

- ça craint un max !

- Ouais. Tino va péter un câble.

- Tu crois que ce type va essayer de s'approcher d'un des autres revendeurs ?

Je soupire.

- Aucune idée, mais y'a des chances.

- C'est culotté de commencer par un mec comme Javier.

- Non c'est logique, il a approché le seul qui a une famille, et qui s'en soucie.

- Ouais mettre José dans l'équation, c'était malin.

- Ouais...

Je soupire je ne décrirais pas la manœuvre de Jeremy comme quelque chose de malin, mais ça, ça ne regarde que moi. Surtout que comme Bart est au courant, impossible pour moi d'étouffer l'affaire.

Tino va être fou de rage. Il va renforcer la surveillance autour des sites et les informations vont être encore plus surveillées, plus question de prendre le risque de s'introduire dans le bureau de Tino. Ce n'est pas bon pour moi ça.

- On n'a pas vraiment le choix faut qu'on prévienne Tino.

- Ouais je sais bien...

- On ira ensemble après avoir déposé le cash à Royce.

Nous sommes remontés dans ma voiture et avons pris la route vers le Jabba.

- Ça craint si les flics commencent à mettre le nez dans nos affaires.

- Ouais carrément.

Je soupire. S'il savait... ça fait bien longtemps que les « flics » sont infiltrés dans le réseau.

Je me gare à proximité de la ruelle qui donne accès au Jabba. Je remarque que la voiture de Tino est là. Bon bah je ne vais vraiment pas avoir le choix, surtout si je veux sauver les apparences auprès de Bart.  

J'entre dans le bar, mon coéquipier sur les talons. Nous saluons les quelques personnes présentes.

En avançant, j'aperçois la crinière rose de Molly au loin. Je m'attends à ce qu'elle se jette sur Bart comme elle a l'habitude de faire, mais non. Elle vient dans notre direction, met un coup d'épaule à Bart et prend l'escalier juste devant elle. J'interroge Bart du regard, qui se contente de hausser les épaules.

Bon, on va régler un problème à la fois.

***

Juré ! Caché !Où les histoires vivent. Découvrez maintenant