Symbiose

Chapitre 30 (Amy) : Les adieux

Amy ouvrit les yeux sur un ciel sans étoiles, Shadow les referma et tout seul s'élevèrent, plus silencieux que la nuit. À ses côtés, gisait une colombe, endormie parmi les pierres. Sa tête, aussi douce que la lune reposait sur un tapis de feuilles brunes et légères qui formaient autour de son corps, lorsque la foudre animait son regard, une auréole de miel et de septembre comme une promesse aux jours nouveaux. Adieu Kate, bon voyage... 

-Où m'emmènes-tu ? murmura la jeune femmee, secouée d'un brusque frisson.

Mais la créature ne répondit pas, non, c'était inutile. Au lieu de cela, un tourbillon de flammes enveloppa le monstre aux deux visages tandis que l'univers tout entier semblait défiler devant leur être : du rouge, du bleu, du jaune, du vert et du rose ! C'était un véritable arc-en ciel de saveurs, d'émotions et de nouvelles odeurs qui caressaient leur palais, chatouillait leurs papilles et tout droit remontaient jusque dans leur esprit ! La lumière devenait de plus en plus aveuglante : enfin ils arrivaient ! Le cœur des deux amis battait en leur poitrine d'un sombre chaos alors qu'une terre rayonnait à l'horizon. Vite, le sol grossit, grossit encore devant leurs yeux apeurés quand un bruit de tonnerre déchira leurs tympans. Trois, deux, un... CRAC Les jambe de la collégienne heurtèrent le sol avec violence et la jeune fille s'affaissa sur la roche dure. Sauvée ? Tout autour et bien, il n'y avait rien. Où plutôt si, il y avait ce monde, celui qu'elle n'avait jamais vu autre part que dans des films ou  à travers les pages de ces épais manuels qui vous brouillent l'esprit et vous détruisent le dos, tels de funestes chevaux. Amy n'aimait pas lire, les mots s'emmêlaient en son crâne si facilement que l'on aurait dit plutôt des milliers de ces petites mouches qui sans cesse bourdonnent devant vos oreilles un pesant jour d'été. Peut être désirait-elle, au plus profond de son cœur, partir à la conquête de royaumes secrets et de mystères fabuleux qui hante le fond des mers et le sommet des vents... Hélas ! Voici qu'elle ne pouvait que rêver, espérer un jour toucher ne serait-ce que du bout des doigts la robe d'une grande reine ou la soie d'un lys doré ! Mais alors, quel doux songe, quelle utopie que de se retrouver ainsi couchée, sous un temple de feuillages, l'âme toute entière plongée dans les flots gris et tumultueux qui plongeaient avec la fougue du taureau du haut de la falaise ! De petites gouttes mouillées trempèrent le visage de l'adolescente. Elle respirait avec délice cet air pur, l'odeur sucrée des bois et emplissait ses poumons de ce parfum sauvage. Soudain la paysage entier vira de couleurs sombres, comme englouti sous une épaisse fumée et chaque arbre, chaque rocher ou cascade céda bien vite la place à des flux vivants, monstrueux et tentaculaires qui gesticulaient à droite, à gauche et le ciel parut devenir rouge... Oui, ils étaient arrivés. Dans la jungle devenue monstrueuse, plus rien ne bougerait plus, et une seule voix, plus forte que la foule vengeresse prononça à jamais la sentence du damné :

-Adieu Amy.

Elle disparut.