Chapitre 10 (Amy) : Elle

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Une douce chaleur baignait la petite chambre sous les toit et l'adolescente rêvait, songeuse, bercée par le doux ronron du radiateur. Il pleuvait dehors et le vent tempêtait contre les vitres dans un rythme si proche, si lointain, si parfait, celui de son cœur. Elle ne savais pas, elle ne savais plus où ? Pourquoi ? Et surtout, comment ce visage harcelait sa mémoire et hantait son esprit. Le sien ou celui de Nightmare ? Les deux, sans aucun doute ! La jeune fille sentait s'entremêler en elle tous ses sentiments, ses peurs, ses angoisses et tant de choses bien mystérieuses que l'humanité lui refusait. Elle ignorait tout d'elle, seulement qu'elle voulait la rejoindre. Ses yeux embrumé ne se fermaient que pour se rouvrir sur son visage rose, ses joues colorées toujours peintes d'un sourire qu'on n'oserait pas même briser. Amy s'attarda un instant sur son âme, ces deux puits de lumière si richement parés de printemps et d'hiver, avant d'ouvrir les siens, pour la regretter encore. Qui était-elle ? 

-C'est quoi son nom ?

La voix de Shadow résonna glaciale dans la chambre brûlante et il sembla à l'adolescente que l'air se fit tout à coup beaucoup lus lourd, comme si un gaz, un poison mortel venait lentement s'infiltrer en eux afin de détruire avec avidité le peu de bonheur qui leur restait. Et puis le silence, rien que ce silence qui vous agresse et vous oppresse, qui vous fait supplier, mourir, pleurer, pour gémir à nouveau.

-Alors ? s'impatientait-l'extra-terrestre ? C'est quoi ? Comment elle s'appelle ?

-Je ne sais pas, souffla la jeune fille.

Oui, elle ne savais pas. Il y avait des guerres, des batailles, des armées, des fléaux et des tyrans... Et c'était cela, un seul nom qui lui échappait telle l'antilope qui feint au lion qui suffirait à la tuer ? La rendre plus malheureuse que ce qu'elle demeurait ? Ses lèvres pâles tremblaient dans la lumière des lampes tandis que de grosses larmes commençaient à poindre sur ses joues. Ah ! Qu'elle haïssait toutes ses faiblesses !

-Tu mens ! s'écria la créature, c'est impossible...

-Non ! Je te jure ! le supplia Amy, c'était à l'autre bout du monde ! Qu'est-ce que tu veux que je te dise, Tabarnak ? 

-La vérité.

-Alors vas-y, persiffla l'adolescente, fouille mes souvenirs ! Allez, viens ! Je t'attends !

-Je ne m'abaisserai pas à cela, se détourna le symbiote, dis-moi juste où on l'a rencontré et tout ce charabia sera fini !

-Nulle part.

-Alors pourquoi on a tous les deux une impression de déjà vu ? T'explique ça comment ? Une vision peut être ? Ce que j'ai ressenti... ça va au delà du simple contact ! Tu écoutes ce que je dis ?

-Oui, coloc' je t'écoute et en plus je te crois, tu as raison, c'est pas normal tout ça... Attends. À quel moment c'est normal d'héberger un parasite dans son corps déjà ?

Autour d'eux, la tension redescendait peu à peu tant et si bien que la brève querelle ne fut plus dans l'esprit de nos compères qu'un vague souvenir insignifiant. L'orage maculait le visage de la jeune fille dont le  torse n'était désormais agité que par de brefs soubresauts. Et, avec toute la tendresse du monde, le symbiote s'appliqua à guérir ce cœur malade. Il effaçait les larmes, repoussait les sanglots et semblait la bercer mieux encore que a mère embrasse son enfant.

-Excuse-moi, murmura la collégienne, je n'aurais pas du te parler comme ça... Pardon.

-il faut que je fasse pareil je présume ?

Surprise, Amy releva la tête. C'était vrai, l'extra-terrestre ne connaissait rien aux usages de la Terre, et ces nombreuses coutumes devaient sans doute se présenter à ses yeux pareils aux bêtes curieuses que l'on observe, les jours de fête.

-Bah... Ouais, acquiesça t-elle, Traditionnellement ça doit ce passer comme ça :  Chacun pardonne l'autre, on se donne tous la main et on chante l'amour au pays des licornes. 

-L'étrangern rit doucement : Oh ! le cauchemar !

-T'as pas idée, compte sur moi pour jamais de faire découvrir les horreurs des dessins animés pour tout petits.

-Merci d'avance.

-De rien.

Une allégresse trop longtemps oubliée secoua les épaules de la jeune fille. Que ce demeurait bon de se confier ! Elle sentait chaque cellule de son corps, toutes les parcelles de sa peau éclater en fragment de joie qui chantaient à l'unisson le bonheur des deux êtres. Une nuit claire régnait sur Montréal, Lune baignait de ses rayons d'argents les foyers endormis alors que dans l'un d'eux, riaient aux éclats un symbiote et une humaine, si opposés, mais unis et plus forts que jamais. Peut être était-ce un signe, sans doute voulait-elle, la grande Dame du ciel, veiller sur leur avenir, ou simplement, protéger leur sommeil. Et cela, hélas, nous ne le sauront vraiment jamais.

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