Symbiose

Chapitre 32 (Shadow) : Le goût du sang

La terre noirâtre semblait défiler si vite en dessous de son corps, non, il ne lui échapperait pas non plus ! Vif tel le faucon, Shadow s'élançait sous l'éclat froid de la pleine lune qui revêtait de perles d'argents ses grands yeux de vitre blanche et l'émaille de ses dents tandis que la flore sauvage et sinueuse écorchait doucement sa peau poisseuse et griffait son visage de mille fissures invisibles. Six mètres... Trois mètres... Un mètre... Et le monstre bondit, touts crocs dehors, sur le dos de sa pauvre proie qui poussait en vain de terribles gémissements écarlates alors que la créature arrachait sa vie d'une gueule béante. Le symbiote enfonça plus profond encore sa mâchoire dans le ventre de la bête qui, à présent, ne bougeait plus. Ah ! Quel bonheur de ressentir une nouvelle fois le goût ferreux du sang ruisseler comme en cascade dans le creux de sa bouche ! Et cette chair, tendre et savoureuse sur ses roses papilles... Quel éternel délice ! CRIC CRAC. Ainsi les os brisés du chevreuil crissaient dans leur tombeau de nacre en un bruit de tonnerre, se réduisant bien vite en de minuscules débris et presque aussitôt, engloutis éternellement dans le plus obscure de tous les gouffres. Puis elle repartait, l'Ombre rouge et solitaire, pour toujours affamée, mais jamais rassasiée, elle courait sur les colline, bondissait sur les rivages et surgissait soudain des abysses d'une grotte. Rien ne paraissait pouvoir arrêter cette tempête mortelle, à peine effleurée de la brise, qui cueillait vie après vie dans les flammes de la nuit. Au matin se rendormait, frêle et fragile sur la roche, une jeune femme au teint cireux et aux longs doigts tâchés de feu qui contemplait une dernière fois, juste avant de l'abandonner l'immensité claire du bleu que l'on lui refusait.