Un Cerveau de Plomb

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     Ma tête est lourde. Lourde de mots, de voix, de cris, de murmures, de rires, de pleurs, de musiques, de films. J'ai du mal à me concentrer, et, bien que je préfère opter pour de courtes phrases afin d'éviter de me perdre, j'ai du mal.

     Ma tête est lourde. Non, ce n'est pas elle qui est lourde. C'est mon cerveau. Un cerveau de plomb qui est en perpétuel agitement. Je tente de le calmer en le forçant à se focaliser sur une musique criarde, contenant plus de bruit que de mélodie, d'ailleurs. C'est ce qui permet d'avoir assez d'attention pour pouvoir écrire ceci. Sans musique, il m'est impossible de suivre une conversation plus de quelques secondes. Sans musique, le capharnaüm que je tente d'étouffer à coup de refrain se libère et envahit mon cerveau de plomb. Et dans ce cas, je ne dispose plus des capacité mentales qui me permettrait en temps normal d'effectuer même les plus simples des tâches : prendre des notes, répondre à une question basique, me souvenir de mon âge, de mon nom. Je deviens alors un légume, passant des heures à ne rien faire si ce n'est amasser davantage de bruit.

     Mes pensées se baladent d'une réflexion à une autre comme si elles étaient des balles dans un immense pong entre des planètes situées aux quatre coins de ce multivers. Si je cache un cadavre dans ce point d'eau en plein centre ville, combien de temps se sera-t-il écoulé avant qu'il ne soit découvert ? Existe-t-il une planète dont l'espèce intelligente principale est une sorte de lama rose ? Combien de temps ce passant pourrait survivre si une épidémie zombie se déclarait à l'instant ? Mis à part les questions, la principale chose qui rend mon cerveau si lourd, ce sont les échos. Des phrases, lues ou entendues au hasard, qui reviennent toutes en même temps, se répétant en boucle. "Pas besoin de tortiller du cul pour chier droit". "Tu es bizarre". "Ketchup ou mayonnaise ?". "Aisling, attends !". Fichu cerveau de plomb.

     Et maintenant, la musique ne fait plus son effet, je ne peux plus me concentrer sur ce présent écrit. Ma tête devient de plus en plus lourde, et les migraines redoublent d'intensité. Bon, et bien je n'ai plus qu'à considérer qu'il est achevé. Je m'excuse de cette fin brutale, j'ai encore beaucoup de choses à dire, je pense, mais elle se font recouvrir par cet incessant vacarme. Au revoir.


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     Cet écrit a été rédigé le 14 Mars 2018, juste avant le précédemment publié, "Les Boîtes à Souvenirs", et est mentionné dans ce dernier. J'ai écris ça durant une période vraiment trouble dont je ne suis pas encore sortie. C'était une période où, comme mentionné, mes pensées étaient vraiment brouillonnes, la musique était mon seul calmant, mon opium, mon GHB. C'était en plein pendant une phase de remise en question, à la sortie d'une période de mutisme quasi-complet qui aura durée 3 ans, doublé d'une dépression et d'une perte de mes repères. Ouais, pas la plus simple, pas la plus joyeuse non plus. Enfin, j'ai eu la chance d'avoir des personnes en or pour m'empêcher de couler, sinon il y a belle lurette que je me serais noyée.

     Je m'excuse pour le coup au moral que je vous ai fichu, je vous aurais bien partagé quelques anti-dépresseurs mais j'en prend pas.

Bribes d'un Esprit TourmentéWhere stories live. Discover now