Chapitre XXII : Suicide psychologie

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Cher monde,

Toi et moi, c'est une courte histoire. Nous n'avons passé que dix sept années ensemble. Nous en passeront plus, nous continuerons de nous croiser, mais je ne serai plus jamais la même, toi et moi, c'était une courte histoire.

Tu as su me montrer ta plus belle facette, celle ou tu unis les gens, les rend heureux. Celle ou tu dévoiles tes paysages merveilleux, ou tu encres dans nos esprit ces souvenirs fabuleux. Grâce à toi, j'ai trouvé une vraie famille, les amis. Jamais je ne te remercierai assez, ce sont les meilleurs que tu m'as confiés. Ils me font rire quand je veux pleurer, me font tout oublier quand je veux me rappeler, me font vivre quand je veux mourir, ils me rendent ivre avec leurs sourires. 

Comme Gargantua avec Pantagruel, tu m'as guidée vers la bonne voie.
Tu m'as enseigné la compréhension, l'écoute, et comme une élève douée j'ai appliqué, j'ai aidé. J'ai sauvé des gens d'un mal-être, d'une dépression, d'un suicide. Tu m'as fait aimer l'humanité, tu  m'as convaincue de me donner corps et âme pour la faire prospérer. 

Mais cher monde, tu as une double personnalité. La seconde m'a blessée, elle m'a tant blessée, non elle m'a achevée. Je dois me lancer, avouer à l'humanité qui tu es. Tu es monstrueux, tu ôtes la vie aux gens, même aux meilleures personnes qu'il puisse exister. Tu épargnes certaines d'entre elles, mais tu les poignarde en plein cœur à chaque minute écoulée. La loi du plus fort se charge de trier le reste, et pousse les survivants à s'entre-tuer.

Je ne veux plus t'accorder de respect, laisse moi donc t'appeler enculé. Enculé, ça sonne bien pour une ordure comme toi. J'ai tenté la diplomatie, mais tu m'as frappée, j'en viens à la vulgarité. Dès ma naissance tu m'as attribué une vie sans répit, une vie avec un cœur meurtri. J'ai observé mes parents se séparer dans la haine et l'irrespect. Tu m'as laissé croire que mon père était décédé après avoir vagabondé entre le commissariat et le palais. A son retour, tu l'as ensorcelé avec l'âme du diable, tu l'as transformé en un monstre dégénéré. Il m'a rouée de coups, m'a violée, il m'a assassinée.

Il y a quelques temps tu m'as réduite à une moins que rien, je n'étais plus humaine, on ne me considérait plus comme tel. J'étais l'esclave, la bonne, mais j'étais surtout dégoûtante et chiante. Voilà ce que j'étais, un mollusque , un boulet, un problème qui empêche les gens d'avancer. 

Ces dernières années, notre relation s'est compliquée, tu as radicalement changé. Tu m'as dévoilé ta violence, ta haine, ton mépris, mais aussi ton manque de compassion.  On est de plus en plus sur Terre mais tu es de moins en moins humain. Tu as emporté mon oncle, et quelques mois après tu tente de m'arracher ma mère. Après une période de conflit qui me paru éternelle, j'ai cessé.

C'est vrai, j'ai tout arrêté. J'ai remplacé les engueulades par des accolades, j'ai abandonner les cris pour les pleurs la nuit, j'ai saisit une lame au dépit de la santé de mon âme. Je me suis effondrée, dans ta chute, tu m'as emportée. 

Un samedi soir, banal, j'ai pris mon bain, idéal, ma mère débarque, brutal, une triste annonce, fatal. La voisine a tenté de se pendre, elle a été retrouvée pendue, chez elle, elle avait un enfant, son fils, il a six ans, les pompiers ont rappliqué, elle a été emmenée. Aujourd'hui elle va un peu mieux, son gamin est perdu, il n'y comprend rien, je m'occupe de lui, libère son esprit, on joue ensemble l'après-midi. 

Ce soir là, celui-ci pas un autre, j'ai compris que c'était terminé. Mon cœur s'était déjà arrêté en juin dernier, mon âme s'était évaporée, mais désormais, c'est mon cerveau qui s'est déconnecté. Face à la violence du monde, aux révélations terribles, je n'ai pas pu résister. Bouché bée, gorge nouée, la crise d'angoisse s'est doucement installée. 

Respire, souffle, inspire, expire, pas d'air, recommence. Inspire, expire, pas d'air, plus d'air. J'ai tenté d'appeler ma mère, mes mains tremblaient, mon téléphone est tombé. Je ne peux pas parler, un message, vite je récupère mon bijoux, et tape sur le clavier du mieux que je peux. Six lettres : rentre. Six secondes, six minutes, six heures, je n'ai jamais eu de réponse, elle n'est pas venue. Le manque d'oxygène se fait ressentir, ma tête tourne, tout rétrécit, la pièce, le lit, tout est si étroit et petit. Des ombres, des bruits, une présence, on m'étrangle, on m'étouffe, mon cher monde, tu as fait venir d'un lieu lointain nommé l'Imagination des créatures appelées hallucinations. Mon cœur a fini par se calmer avec la mélodie émanant des écouteurs, atteignant un stade stable propice à l'endormissement et à la respiration. 

Le réveil fut difficile, face à l'horreur de la veille, j'ai commis l'irréparable, j'ai cessé de vivre intégralement au fond de moi, place à un suicide psychologique, faute de pouvoir m'ôter la vie. Plus de sentiment, plus d'émotions, des yeux remplis de larme, une tête remplie de questions. Aucune réponse juste le néant, combien encore faudra-t'il de temps ?

Tout ça, cher monde, c'est toi qui l'a crée, tu m'as tout dévoilé aveuglé par la confiance que tu m'accordais. Toi et moi, c'était une courte histoire. C'est fini maintenant, je suis morte et toi vivant, on ne vit plus ensemble, j'ai été dévastée par un ouragan.

L'air Humide Qui Caressait Mon Dos Cette Nuit LàOù les histoires vivent. Découvrez maintenant