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Nathaniel et moi étions assis côte à côte dans son lit. Un silence léger et agréable régnait dans la pièce, nous enveloppant avec douceur. Tous deux n'arrivions pas à trouver le sommeil à cause de l'ivresse présente dans nos corps. Je tenais toujours la peluche entre mes mains, ne voulant pas la lâcher. J'essayais de la cacher sous le drap, un peu honteuse de dormir avec, mais Nathaniel le remarqua bien vite.


- Tu l'as gardé ? souffla-t-il.

- Bien sûr. répondis-je surprise par sa question. Tu croyais que je l'avais jeté ?

- Peut-être pas jeté, mais pas gardé avec toi quoi... Ça m'étonne.

- C'est juste que... Je l'aime bien. murmurai-je le rose aux joues.


Avec le clair de lune qui perçait la pénombre de la pièce, je vis ses lèvres s'étirer d'un sourire léger. Je posai alors mes yeux sur son visage, l'observant plus précisément. Il avait des petits yeux et de grandes cernes dus à la fatigue. Il bougeait souvent ses lèvres, étirant parfois un sourire et d'autres fois des légères grimaces, et il gigotait son nez comme si quelque chose le dérangeait. Ses cheveux blonds étaient en batailles et ses mains venant les secouer par moments les rendaient encore plus indomptables. Quelques soupires venaient parfois franchir la barrière de ses lèvres, brisant le silence. Je le trouvais vraiment mignon en ce moment là et mon amertume envers lui s'effaçait peu à peu. D'un seul coup, Nathaniel se rapprocha de moi, me faisant face. Il était assis en tailleur et me fixait longuement. Je penchai doucement la tête sur le côté pour lui faire comprendre que je ne voyais pas pourquoi il faisait ça. Et sans prévenir, il me tira contre lui et m'entoura de ses bras, nichant son nez dans mon cou. Je n'étais pas dans une position agréable, à moitié relevée sur les genoux, la tête un peu tordue qui reposait sur la sienne et les bras bloqués le long du corps. J'essayais de me dégager doucement mais il me serra encore plus fort, me suppliant de rester. Je lui expliquai que je n'étais pas à l'aise de cette façon, alors il me relâcha. Je fronçai les sourcils, ne comprenant pas ce qu'il lui arrivait d'un seul coup. Je voulus lui demander, mais je me ravisai quand je vis son corps être secoué par des soubresauts et des larmes perler sur ses joues. Je restai bouche bée devant sa réaction. Que lui arrivait-il ? Je sentis mon cœur être pincé face à la tristesse de Nathaniel, alors sans réfléchir, je m'assis sur ses jambes, postant les miennes de part et d'autre de son bassin, et entourai le haut de son buste de mes bras. Le blond ne resta pas longtemps étonné par mon geste, m'étreignant à présent avec encore plus de force qu'auparavant. Son visage rempli de larmes était enfoui dans le creux de mon cou, me mouillant moi aussi. Je sentais toujours son corps convulser sous mes doigts qui parcouraient toute son échine pour essayer de l'apaiser. Mais rien n'y faisait. Rien ne calmait ses sanglots. Et sa tristesse envahissait bientôt mon corps.


- Je... Je suis dé-désolé...


Parler semblait être une tâche difficile pour lui sur le moment. Son corps subissait encore plus de secousse à  chaque syllabe prononcée.


- Chut, ne dis rien, concentres-toi sur ta respiration pour le moment. murmurais-je près de son oreille.


Il acquiesça légèrement d'un mouvement de la tête avant de me serrer encore plus fort contre lui.





Je ne savais pas combien de temps nous étions resté ainsi, dans les bras l'un de l'autre. Mais le soleil commençait à percer à travers les volets. Nous n'avions pas dormi de la nuit, et la fatigue commençait à devenir insurmontable. Mes doigts continuaient à caresser son dos de manière mécanique, parfois laissant mes phalanges se perdre dans ses cheveux. Je gardai difficilement mes yeux ouverts, et je sentais que Nathaniel était dans le même état que moi. Doucement, je me décollai de lui. Mes yeux plongèrent dans les siens et je lui adressai un léger sourire. Nous étions tous deux mal à l'aise par la situation mais nous ne savions pas comment désamorcer cette gêne. Je baissai les yeux dans un rictus gêné. J'étais toujours assise sur ses genoux et j'avais mes mains crispées sur les miens, de genoux. Je sentais mes joues me brûler et je fermai fort mes yeux, pour tenter de l'oublier. J'étais dans un malaise le plus profond, mais je n'arrivais pas à y remédier, mon corps ne voulant pas s'éloigner trop de celui du blond. Durant cette étreinte, pour le rassurer je lui avais embrassé à plusieurs reprises le haut de son crâne. Et au bout d'un moment, quand ses pleures s'étaient apaisés, j'avais senti ses lèvres se poser sur mon épaule ou ma clavicule. Je n'avais pas compris pourquoi il avait fait ça. Au début j'avais trouvé ça bizarre, mais au plus il le faisait, au plus j'appréciais, trouvant ce geste rempli de tendresse et de bonnes attentions agréable. Je l'avais laissé faire. J'avais même eu envie que ses baisers remontent dans mon cou par moments, et une fois, j'aurais voulu sentir ses lèvres sur les miennes. Et maintenant que j'y repensais, je devenais rouge écarlate. J'avais apprécié, et j'avais laissé mon esprit imaginer plus et pire que ça : vouloir plus. Je m'en voulais d'avoir pensé ça et je m'en voulais encore plus à l'idée que je l'espérais toujours un peu au fond de moi. Je n'éprouvais aucun sentiment amoureux pour Nathaniel, mais imaginer pouvoir me perdre dans les bras et contre les lèvres de quelqu'un dans une étreinte de douceur et d'attention me faisait fondre d'envie. Je savais que ces envies de douceur et ces envies charnelles n'étaient pas une bonne chose pour moi. Je savais que vivre à travers l'amour et l'attention d'autrui était néfaste. Mais c'était la seule façon pour moi de me sentir vivante. Je l'avais bien vu avec mon ex petit ami. Je ne l'avais jamais vraiment aimé : j'avais juste utilisé tout l'amour qu'il ressentait pour moi pour survivre et je lui avais mis le poids de ma misérable existence sur les épaules. Je vivais à travers lui. Je détestais repenser à cette année entière. J'avais été la personne la plus horrible sur terre et j'avais réussi à blesser un homme sans le savoir, sans le comprendre ; sans le vouloir. Je m'en voulais terriblement. Et je savais qu'en cet instant, si je cédais à mes idiots espoirs et que le blond était réceptif je risquais de reproduire ce schéma. Et je ne voulais pas. Je ne voulais pas briser quelqu'un à nouveau. Surtout pas lui.

Chut [Nathaniel]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant