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J'étais tétanisée. Ils avaient vraiment fouillé dans ma chambre au point de trouver mon ancienne planque dont j'avais moi-même oubliée l'existence ? Ils n'étaient pas juste tombé dessus comme m'avait dit Germain, ils avaient fouillé de fond en comble, retourné toute ma chambre pour le trouver. Mais pourquoi avaient-ils fait ça ? Quel était leur but de départ ? Je comprenais pas, je comprenais rien de ce qu'il s'était passé depuis que j'avais franchi le seuil de la porte. Tout ce que j'avais compris c'était la douleur dans ma mâchoire, dans mes côtes, dans mon dos, et le sang qui coulait de ma bouche après qu'il ait fermé la porte derrière nous. Tout ce que j'avais entendu c'était les cris de mon beau-père dans mes oreilles. Tout ce que j'avais senti c'était ses mains et ses pieds heurter mon corps à de multiples reprises. Tout ce que j'avais vu c'était ma mère détourner le regard quand l'image de son mari frapper sa fille avait été trop dure. Il avait finit par littéralement me jeter dans ma chambre, en me traitant de sale pute. Alors depuis, j'étais roulée en boule, me noyant dans mes propres larmes, complètement paralysée de douleur. Je revoyais les images de ce moment repasser en boucle dans mon esprit. Je n'avais même pas essayé de me défendre. J'étais mortifiée à l'idée de me débattre. Au début j'avais pensé que je ne récolterai juste qu'un baffe. Violente, certes, mais seulement une baffe. Je ne pensais pas qu'il était capable de me passer à tabac ainsi. Je n'aurais jamais cru me faire battre comme ça un jour dans ma vie. Je sentais encore ses chaussures taper dans mes côtes déjà meurtries par les coups précédents. Je sentais encore ses mains s'acharner sur mon visage. Je sentais encore ses phalanges s'enrouler autour de mes cheveux, me tirant en arrière pour mieux pouvoir abattre ses poings. Je sentais encore ma peau se fendre sous la douleur et la violence des baffes. Je le voyais encore me menacer de son stupide couteau, voulant m'arracher des excuses pour être aussi pourrie, aussi foutue, aussi mauvaise. Je voyais encore ses lèvres hurler. Je voyais encore la haine dans son regard. Je sentais encore et toujours ses mains enserrer mon cou comme un vulgaire torchon qu'on voudrait essorer. Je sentais la douleur, la peur, l'effroi, envahir mon corps entier. Et au plus j'y pensais, au plus j'avais du mal à respirer, m'étouffant à chaque bouffée d'air. Je devais avaler plus de bave, de larmes et de sang mélangé que d'oxygène. J'étais incapable de me calmer, et à l'entente de la voix de Léo, je me brisais encore plus. Je n'avais aucune idée de si il avait vu son père devenir fou, mais ce dont j'étais sûre c'était qu'il avait entendu. Il avait entendu tous les reproches et les obscénités qu'il avait hurlé. En plus de le laisser détruire ma vie, je participais sûrement au trauma d'un pauvre gosse qui n'avait rien demandé. Je me haïssais tellement. Pourquoi j'étais si stupide ? Et pourquoi je les laissais continuer à avoir autant d'impact dans ma vie ? Pourquoi est-ce que j'étais tout simplement moi ? Plus rien n'avait de sens dans mon crâne. Tout se mélangeait à nouveau et j'avais l'impression que ma tête allait exploser. Je glissai mes mains dans mes cheveux, tirant dessus pour essayer de me calmer. J'avais mal partout et une terrible envie de crever me collait à la peau. Je les entendais partir de l'appartement, sûrement se rendaient-ils chez mes grands-parents comme si rien ne s'était passé ici. Comme si ce monstre ne venait pas de battre une ado. Et comme si ma mère n'avait pas cautionné tout ça.

Mon cœur battait la chamade. Il tambourinait le plus fort possible dans ma cage thoracique. Le bruit de ses battements remontaient dans mon cerveau, tapant contre chaque parois, attisant un peu plus ma folie. J'avais envie que tout se taise, tout se stoppe. Je voulais juste un peu de paix. Je ne sais pas combien de temps j'étais restée à pleurer, recroquevillée dans mon coin. Je n'en avais aucune idée, mais mes larmes avaient finit par s'épuiser. La peau était tiraillante et douloureuse. Chacun de mes muscles étaient endoloris. Mes yeux collaient et étaient secs. J'étais épuisée. Je voulais que tout s'arrête. Je voulais sentir mes poumons se stopper, je voulais sentir mon cœur s'arrêter, je voulais que mon cerveau arrête de fonctionner, je voulais entrer dans un silence éternel. J'avais l'impression d'entendre les craquements de mon être. J'avais envie de mourir. Je ne savais plus ce que je ressentais, je ne savais plus ce que c'était. De la colère, de la peur, de la tristesse, du vide ? Je ne savais pas et j'étouffais dans mes pensées. 

Chut [Nathaniel]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant