Chut [Nathaniel]

22

Le côté de ma main toucha la poêle bouillante. Une vive douleur se fit ressentir et je crachai un juron. Foutu sonnerie de téléphone qui m'avait fait peur! Je décrochai, un peu énervée par l'événement mais me radoucit instantanément en entendant la voix de Léo au l'autre bout du fil. Il avait encore piqué le téléphone de notre grand-mère et ceci me fit rire.

- Comment tu vas petit bonhomme ? demandai-je tout en continuant de cuisiner.

- Ça va super ! J'ai mangé des frites ce midi et ce matin on a enfin fait la course d'orientation avec l'école, c'était génial ! s'exclama-t-il, plein de joie dans la voix.

Je ne pouvais m'empêcher de sourire. Ça me rappelait mes propres courses d'orientation en primaire. Je haïssais ces moments petite, mais maintenant je chérissais leurs souvenirs plus que tout. C'était des magnifiques instants de vie.

- Et alors le classement ?

- J'ai fini deuxième! À dix secondes près je battais Jordan!

L'engouement dans sa voix me rendait heureuse. Il était si pétillant à chaque fois qu'il me racontait ses aventures à l'école. Je me souvenais avoir stressée comme une folle pour sa rentrée en primaire. J'avais peur que ça se passe mal, que personnes ne l'accepte, qu'on l'embête comme on l'avait fait pour moi. Mais au final tout s'était bien passé et il était tombé amoureux de l'école. Il ne se passait pas un seul appel téléphonique sans qu'il s'extasie devant les choses qu'il apprenait, faisait ou encore voyait. Il s'était fait pleins d'amis. J'avais été si soulagée.

- À ce niveau là c'est comme si t'étais premier pour moi! J'étais une bille à ton âge en course. Je crois que je finissais quasiment toujours dernière aux courses d'orientation. J'avais tellement la flemme que je marchais en même temps. riais-je.

- Trop nulle tu jouais même pas le jeu ! se moquait-il accompagné d'un rire sonore. Sinon j'ai encore eu dix sept à la dictée de cette semaine. La maîtresse m'a donné une vignette et il m'en manque plus que deux pour avoir un nouveau livre. Elle m'a dit que je devais tenir ça de toi. T'étais bonne élève en primaire ?

Il était allé dans la même école que moi et était tombée sur une des meilleures professeures que je n'avais jamais eu. J'en étais extrêmement heureuse.

- J'étais toujours dans les trois premiers de la classe. En même temps j'avais eu que des bons profs.

- C'est aussi parce que t'étais forte et gentille. Y'en a dans la classe qui sont mauvais alors que la maîtresse est gentille tu sais.

- Certains ont des difficultés Léo, et d'autre n'aiment juste pas l'école. Ça arrive. Ils seront bons dans autres choses plus tard. Chacun ses qualités !

Il continua à me raconter sa semaine de long en large et en me donnant chaque détail possible. Je l'écoutais patiemment et réagissais par moment. J'avais fini de préparer mon repas du soir et m'étais mise à table. Le plus jeune de mes deux chats était venu quémander de la nourriture tandis que l'autre, le plus âgé, faisait tranquillement sa toilette. Il savait très bien qu'il allait voir des bouts de mon dîner à la fin. J'avais adopté mon deuxième chat dans un refuge à quelques heures d'ici. Il avait lui aussi été battu et maltraité. Il avait mis du temps avant de me donner sa confiance. Presque deux ans. Les premiers jours il restait cloîtré sous le canapé. Même Ten ne pouvait pas l'approcher. Ça avait été un long processus. Il avait oublié lui aussi ce que ça faisait d'être aimé, et une fois qu'il avait compris, qu'il avait réappris, il ne voulait plus me lâcher, ni même lâcher Ten qui lui faisait la gueule dès que le jeunot l'approchait. Ça me faisait bien rire. Ils étaient ma seule compagnie dans cet appartement et je ne m'ennuyais jamais avec eux. Je sortis de mes pensées en entendant la voix de Nonna appeler Léo.