L'Histoire de ma Vie. Tome 1 : L'Héritière.

Chapitre 9 : Même histoire.

Les heures qui suivirent les révélations de Jack et Elsa furent un véritable calvaire. Le poids de la vérité s'était abattu sur mes épaules comme une enclume. J'avais pourtant essayé de comprendre, je pensais avoir accepté la réalité mais la nuit avait emporté mes illusions avec elle. L'amertume était revenue ; ma volonté de comprendre et d'accepter ma magie s'était effritée avec les heures. Quelque chose en moi se refusait à avancer, à accepter tout ce qui m'entourait. Une résistance invisible, profondément ancrée, empêchait mon esprit d'embrasser cette nouvelle réalité. Les émotions que je tentais de réprimer – la colère, la tristesse, la peur – semblaient fermenter en moi, nourrissant une tempête silencieuse qui menaçait de tout ravager.

Au début, je mis cela sur le compte de la fatigue accumulée. Les trois semaines d'entraînement intensif avaient laissé des traces. Mon corps réclamait du repos, et mon esprit, alourdi par les récents événements, n'arrivait plus à suivre le rythme. Mais rapidement, ce qui n'était qu'un épuisement normal se transforma en quelque chose de bien plus inquiétant.

***

3 Novembre 1841. Matin, 7H10.

Le lendemain de ma confrontation avec les Souverains, je me réveillai avec une sensation étrange. Mon corps me semblait lourd tandis que mes membres se faisaient ankylosés. Une chaleur étouffante irradiait ma peau, pourtant mes doigts étaient couverts de givre, glacés comme les sommets enneigés. J'essayai de me lever, mais la pièce se mit à tourner autour de moi. La tête me tournait violemment, des éclairs de douleur martelaient mes tempes. Chaque mouvement semblait déclencher un tourbillon de glace à l'intérieur de mon crâne.

Je me forçais à respirer, mais l'air se faisait rare. Une oppression pesait sur ma poitrine, comme si mes propres pouvoirs avaient décidé de me punir pour avoir tenté de les enfermer. La moindre tentative d'inspirer me brûlait les poumons, et j'eus l'impression que l'air autour de moi s'était soudainement glacé.

Je me retrouvai clouée au lit, incapable de bouger sans ressentir des vagues de douleur. Une fièvre élevée s'était installée, consumant peu à peu mes forces. Je transpirais abondamment tout en frissonnant à cause du froid qui émanait de ma propre peau. Mes pouvoirs semblaient se retourner contre moi, m'attaquant de l'intérieur. La glace en moi, autrefois endormie, s'éveillait avec une fureur dévastatrice.

Chaque fois que je sombrais dans le sommeil, des cauchemars terrifiants envahissaient mon esprit. Des visions de vastes étendues glacées, des tempêtes impitoyables détruisant tout sur leur passage... et moi, au centre, incapable de contrôler le moindre souffle de vent.

Le réveil n'était guère mieux. Je me sentais prise au piège dans mon propre corps, subissant les assauts de mes propres pouvoirs. Elsa et Jack s'inquiétaient. Je les voyais entrer et sortir de ma chambre, leurs regards lourds de culpabilité et de désespoir. Elsa essayait de m'apaiser, de calmer la tempête qui faisait rage en moi, mais rien ne semblait suffire. Jack, lui, me veillait jour et nuit, surveillant le moindre de mes souffles, redoutant à chaque instant que mon état ne s'aggrave.

– Nous devons faire quelque chose, entendis-je un jour Elsa murmurer à Jack alors qu'ils pensaient que je dormais. Sa magie la consume. Si elle ne l'accepte pas bientôt, elle va... elle va se détruire elle-même.

– Je sais, répondit Jack d'une voix brisée. Mais elle doit trouver le chemin seule. Nous ne pouvons pas forcer son esprit à accepter ce qu'elle refuse encore de comprendre. Tu sais que le parcours pour accepter ces dons est fastidieux.

Ils avaient raison, je le savais au fond de moi. Cette lutte intérieure, c'était à moi de la mener. Mais comment pouvais-je combattre quelque chose que je ne comprenais pas pleinement ? Comment pouvais-je accepter une magie qui semblait se nourrir de mes peurs et de mes doutes, qui me dévorait à petit feu ? La réponse m'échappait encore, mais une chose était sûre : si je ne parvenais pas à la trouver bientôt, il ne resterait plus rien de moi pour affronter la Guerre qui approchait.