Chapitre 15

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   Jimin avait fait un cauchemar cette nuit-là. Le même que la dernière fois, et qui revenait régulièrement depuis quelques mois, cependant, un élément le fit différer des fois précédentes. Des couloirs blancs s'étendaient à l'infini autour de lui, l'emprisonnant bien plus que le bracelet en plastique qui lui enserrait le poignet et qui portait son nom ainsi qu'un numéro de série. Il marchait le dos courbé, ne supportant pas les cris de lamentation de la vieille dame au bout du couloir. Le même cauchemar, pourtant, un élément infime changea cette fois. Son regard fut à nouveau irrésistiblement attiré vers la chambre 315, sa porte close vibrante au son d'une voix sanglotante qui lui était familière mais sur laquelle il ne savait pas poser de visage. Il esquissa un pas vers cette porte, mais cette fois-ci, il se ravisa. Pourtant, il mourrait d'envie de saisir la poignée, comme les autres fois, mais il se sentait appelé autre part. Un médecin passa, le regardant avec un air suspicieux sur le visage, et ne le quitta pas des yeux alors qu'il tournait vers ce qui semblait être sa chambre...

    Jimin avait ouvert les yeux aussitôt, pensant savoir exactement ce qui venait en suivant, et ne souhaitant pas l'affronter. Il sentait des traînées salées lentement sécher sur ses tempes, remontant jusqu'à ses yeux, et il sut qu'il avait pleuré. Il allait se tourner pour trouver refuge dans les bras de son amant dans le lit, mais Jungkook avait disparu. Jimin enfouit sa tête dans son coussin et éclata en sanglots. Il l'avait laissé de nouveau, au moment ou il avait le plus besoin de quelqu'un à ses côtés. Jimin était à bout de force.

    Cependant, au bout de quelques minutes, il entendit la porte de sa chambre se rouvrir, et une odeur de café emplir la pièce. Jimin releva brusquement la tête, et vit à travers ses yeux voilés de larmes un Jungkook stupéfait avec deux tasses de café à la main. Celui-ci les posa rapidement sur la table de chevet et le rejoignit dans le lit pour le prendre dans ses bras.

- Hé, calme-toi...

    Couchés l'un contre l'autre, la tête contre l'épaule de Jungkook alors qu'il lui caressait les cheveux d'une main et l'épaule de l'autre, c'est là que Jimin parvint à se calmer. Ses sens et ses émotions étaient exacerbées, il n'avait jamais pleuré à cause d'un cauchemar ou parce qu'il croyait que son amant (le terme sonnait encore bizarrement aux oreilles de Jimin) l'avait laissé seul. En réalité, Jimin se demandait bien la dernière fois qu'il avait pleuré avant cette fois-là. Avant de le connaître en vérité. Jimin n'était pas insensible, loin delà ; cependant, il avait toujours gardé ses sentiments en lui, il ne les extériorisait jamais. Il ne se reconnaissait pas. Néanmoins, il ne pouvait déterminer si c'était une mauvaise chose ou non. Pour le moment, bercé ainsi dans les bras de Jungkook, il trouvait que c'était une bonne chose. "Il faut se dire les choses" lui avait-il dit la veille, "ne pas garder les choses pour soi" . C'est donc quand il se fut suffisamment calmé pour ne pas que sa voix tremble, qu'il dévoila tout ce qui lui pesait sur le cœur à Jungkook :

- À l'âge de 15 ans, on a déclaré que j'étais dépressif. Je passais déjà entre les mains de plusieurs médecins depuis l'âge de dix ans parce que j'étais très introverti, et qu'on ne pouvait pas me foutre la paix. Mais bon, je ne disais rien, parce que c'est rare que les parents se préoccupent de l'état mental des enfants dans ce foutu pays. Je le prenais comme une certaine forme d'amour de leur part finalement, alors je n'ai pas bronché.

   Il déglutit, difficilement car sa bouche était encore pâteuse de la nuit.

- Cependant, il y a pire que cela. Parce que ça ne suffisait pas que ma propre famille me traîne partout pour me « soigner », parce que c'était grave apparemment que je sois comme je l'étais. Qu'ils n'acceptent pas que je puisse être différent. Différent d'eux, eux qui sont si mondains. Il a fallu qu'ils apprennent finalement que j'aimais les mecs, quand j'avais dix-sept ans. Et ça, c'était le pire que je pouvais leur faire visiblement. Alors ils m'ont mis dans un asile. Enfin, un hôpital, mais au service psychiatrie, ça revient au même. Comme si j'étais malade, en gros. C'était ça ou je me barrais et je me débrouillais tout seul. J'avais dix-sept ans putain de merde !

Crossroads - jikookOù les histoires vivent. Découvrez maintenant