30 | Russian Roulette

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Je me souviens de tes mots cette nuit là. J'étais restée stoïque alors que des milliers d'incertitudes m'avaient traversé, ravivant des cicatrices, profondes et vivant dans un voile rouge et noir.

« - En tout cas moi ça m'effraie, pas toi ?

Pas moi ?

- Bien sur que non. »

Pas moi ?

Si. Bien sur que si Yeri je suis putain d'effrayée chaque jour qui passe.

Mais ça, pouvais-je te le dire ? Pouvais-je te faire confiance et t'avouer ce que je me cachais à moi-même ?

Pouvais-je te dire que j'avais peur de vous, de vos regards, de moi, de mon propre regard à travers le reflet du miroir. Que j'avais peur qu'on voit ce que je suis, c'est à dire rien. Oui sans cette façade, sans ce physique qu'ils qualifient de parfait, sans ce masque que je porte à chaque instant. Je ne suis rien. Juste une petite fille apeurée par le reste du monde.

Je n'ai pas la force de Seulgi.
Je n'ai pas l'intelligence de Wendy.
Je n'ai pas le machiavélisme de Joy.
Et je n'ai pas ton courage Yeri.

 
Je n'ai rien à part ce visage couvert d'un masque. Un masque froid, distant, impassible. Blanc.

Et le jour ou je n'arriverais plus à le porter que va t'il se passer ?

Ce n'est même pas ça qui m'inquiète.

Lorsque je serais tomber, est-ce que mon vrai moi risque de faire une chose grave une fois à la surface ?

Comment le savoir si je ne le connais pas.

Et ça, c'est le plus effrayant.

Alors dis moi comment pouvais-je te l'avouer Yeri ?




Je me réveilla en sursaut, le corps tremblant, le front en sueur, et les larmes perlant aux coins de mes yeux.

La chambre était plongée dans le noir, et je n'arrivais pas à me calmer. Cette fois elle avait été deux fois plus puissante. J'entendais encore sa voix glaçante me murmurer à l'oreille qu'elle me détruirait et que ce jour se rapprochait aussi rapidement que je perdais la raison.

Ma respiration accéléra d'un cran et je sentais que j'étais sur le point de tout perdre. Putain sauvez moi.

« — Irene, merde Irene regarde moi !

J'arrivais soudainement à distinguer les yeux perçant de Joy qui me secouait par les épaules. Depuis quand était elle en face de moi ? Depuis combien de temps avais-je décroché de la réalité ? Si elle était bien réelle.

Lorsqu'elle vit que je revenais peu à peu sur Terre, le regard inquiet dans ses prunelles habituellement neutre disparu, mais sa prise sur moi ne se détendit pas pour autant.

— Ce n'était qu'un cauchemars, tout va bien.

Pourquoi me parlait elle d'une façon si...douce ? Elle n'est pas comme ça d'habitude. Lorsque sa main se posa sur ma joue humide je compris alors pourquoi.

— Non ne me regarde pas ! Je retira brusquement sa main et me leva du lit en trombe.

— Attends Irene !

Je voulus m'enfuir de cette chambre, comme la dernière fois, comme cette nuit où nous nous étions toutes retrouvées dans ce merdier. Si je n'étais pas partie, jamais Seulgi ne serait venue me chercher, jamais tout cela ne serait arrivé. Elle aurait été ici avec moi, dans notre chambre. À me parler ou m'observer en croyant que je dormais alors que je ne disais simplement rien car je me sentais en sécurité quand elle veillait à mon sommeil. Tout ça à cause de moi. Je devais partir.

Mais Joy en avait décidé autrement en empoignant mon bras et me retenant dans les siens.

— Lâches moi ! Elle ne m'écoutait pas. Joy s'il te plait...ne me regarde pas, j'arrêtais de me débattre, s'il te plait...Ne profites pas de mes faiblesses.

Je glissais doucement de ses bras pour tomber à genoux sur le sol. Elle me rejoignit aussitôt et se posa face à moi la tête baissée avant de prendre par la suite ma tête entre ses mains. Je n'avais même plus la force de la repousser alors je ferma les yeux, mon dernier espoir pour qu'elle ne me voit pas dans cet état.

— Regarde moi Irene. C'était à mon tour de ne pas l'écouter. S'il te plaît je n'en peux plus de tout ça. Quoi ? Je t'ai vu faire ces crises toutes les nuits lorsque nous étions enfants. Mais je n'avais rien dit à l'époque, tu faisais tes cauchemars, je te réveillais, tu te calmais, on repartait dormir et le lendemain on faisait comme si rien ne s'était passé. Aujourd'hui je sais que tu en fais encore, qu'il y a une chose bien plus énorme derrière et tu en as peur. Elle se rapprocha légèrement. Je le savais depuis longtemps, depuis toujours, alors tu ne penses pas que j'en aurais déjà profité depuis un long moment ? Tu ne crois pas que la seule chose que je voulais c'était non de te détruire mais te faire dire la vérité ? Pas à tout le monde, ni à moi, mais à toi.

Elle colla son front au mien, nos cheveux se mêlant entre eux. La brune était si épuisée elle aussi que sa dernière phrase se fit dans un soupir :

— Dis moi la vérité s'il te plait, fais moi confiance Irène.

Et je craqua.

— J'ai peur Joy, tellement peur de ce qui se cache en moi. Ma main s'accrocha à sa chemise de nuit. Qui est-ce ? Cette Irene sombre qui vient me rendre visite chaque nuit dans le pays des cauchemars. Qui me regarde debout au bout du lit avant de m'étrangler sans que je puisse appeler à l'aide. Qui serre ses mains gelées et les plante plus profondément dans mon cou jusqu'à que je me réveille en pleurant silencieusement pour ne pas alerter les anges nocturne. Qui est-ce Joy...Je resserra ma prise sur son vêtement, C'est ce qu'il y a au fond de ma folie ? Un monstre venant me torturer dans l'ombre pour prendre ma place, sa place. Elle veut faire tomber le masque et montrer son vrai visage. C'est ça ? C'est elle ? C'est moi ? La vrai Irene.»

Ma tête reposa sur son torse pendant que je laissais mes larmes couler. Enfin.

Joy ne dit rien, non. Elle n'avait sorti aucun mot mais ses bras entourèrent mon corps affaiblit et le serra plus fort. Nous restions silencieuses au milieu de cette étreinte qu'elle m'offrit. Nos sanglots couvrant le bruit de la nuit. Notre dernière nuit.

Je n'étais pas sûre d'avoir avouer mon secret à la bonne personne, mais ça m'était égale. Il ne me restait plus qu'elle et j'avais décidé de lui donner ma confiance cette nuit.

  Joy.




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