La Tyrannie de l'Oeil d'Or

37 : Quitter Alexei ?

Je fus réveillée par Helena. Encore dans le vague, je ne m'aperçus pas tout de suite de tout. Une monture draconienne comme celles qui nous avait permis de nous échapper des prisons nous attendait à la fenêtre de l'auberge. Je regardai autour de moi et ne vis pas Alexei.

On me poussa vers la monture. Helena et ceux qui l'accompagnaient montèrent à leur tour et le dragon chinois décolla, tel un ruban serpentin. Je vis sous moi des explosions de magie. En ville, un combat se déroulait. 

Alors que mon esprit embrumé se réveillait totalement, je pus apercevoir Alexei entouré de nombreux soldats, au milieu de la ville. Il combattait, comme pour couvrir notre départ.

Soudain, je réalisai. Couvrir notre départ ? Mais seul il ne tiendrait pas ! Je m'agitai, implorant mes compagnons de revenir en arrière. Il fallait l'aider, le sauver !

- Alexie, on ne peut pas revenir en arrière, me murmura Helena, il couvre nos arrières, revenir serait du suicide !

- Mais on ne peut pas le laisser mourir !

- Et on ne peut pas risquer ta vie. Tu es trop précieuse comme atout, répliqua l'un des rebelles qui nous accompagnait.

- En quoi je suis plus précieuse que lui ?

- Des mages on en a des milliers.... Mais toi tu es une Voyante, on a besoin de toi.

- Mais lui aussi c'est un Voyant !, m'écriai-je indignée, Et meilleur que moi en plus !

Les rebelles me fixèrent.

- Pardon ?! Pourquoi ne pas l'avoir mentionné dans la lettre ?!

Ils regardèrent en bas, où déjà, Alexei s'épuisait. Nous étions si hauts.. redescendre pour remonter prendrait un temps infini. Je ne me rappelai plus vraiment ce que j'avais écrit dans la lettre. Je m'étais contentée de suivre les indications d'Alexei. Les rebelles fixèrent à nouveau l'horizon, détournant le regard du champ de bataille. C'est à regret qu'ils conclurent simplement.

- Il est trop tard pour lui. 

Non ! Ça ne pouvait pas se passer comme ça ! Je refusai qu'il meure ! Je fermai les yeux et visualisai la scène qui se déroulait en bas. D'un coup, la vision apparut. L'infini noir se déchira et je pus voir Alexei, prêt à être exécuté. 

Sans réfléchir, je m'élançai dans ma vision. Je ne voulais qu'une chose : Battre ces soldats pour sauver Alex. Comme si le monde m'avait entendu et approuvé, une épée apparu dans ma main tandis que j'atteignais le soldat le plus proche d'Alexei. D'un geste vif, ma lame trancha la nuque de mon adversaire. Profitant de l'instant de surprise, je pus en désarmer un autre, tranchant sa main en un battement de cil. Alors que les soldats se jetaient sur moi, Alexei les envoya balader avec un puissant mouvement d'air. Malgré ses blessures et son épuisement, il sourit en coin en soupirant.

- Tu ne pouvais pas me laisser te sauver la vie, cette fois ?

- Pas au péril de la tienne !, m'exclamai-je tout en enfonçant ma lame au travers du corps de mon adversaire.

Il me prit contre lui.

- Je ne voulais pas en arriver là, mais bon. Pas trop le choix. Ferme les yeux !

J'obéis, sentant d'un seul coup mon corps s'étirer, et la gravité sembla s'intensifier. J'eus l'impression de ne plus pouvoir respirer et de ne plus avoir de corps. Lorsque la sensation s'arrêta, j'ouvris à nouveau les yeux.  Nous n'étions plus au milieu de la ville, mais sur le clocher de l'église. Une nausée monta et je ne pus réprimer un vomissement. Il me regarda avec compassion.

- Ça fait toujours ça, la première fois, la téléportation

- Mais... c'est pas la première fois que je me téléporte... quand.. je suis passée dans mes visions...

- C'est pas vraiment de la même manière que ça marche. Quand tu passes dans tes visions c'est que tu arrêtes d'exister à un endroit et que tu en existes à un autre en quelques sortes. Là c'est un déplacement à travers l'espace sans concept de temps... 

Il soupira et se laissa tomber contre un mur, épuisé. Je pus voir qu'il saignait beaucoup à plusieurs endroits et j'ignorais si les blessures étaient graves ou non.

- Bon, on va rappeler tes amis. On n'a pas beaucoup de temps, ils vont fouiller toute la ville à notre recherche. 

- Je ne peux pas te laisser en plan !

- Tu aurais dû, ç'aurait été plus facile.

- Mais tu serais mort !

- Sans doutes, oui.

Je ne sus quoi dire. Ça lui faisait si peu d'effet ? 

- Comment tu peux... t'en foutre comme ça ?

- Ecoute, on n'a pas le temps de discuter. Si toit et tes amis ne vous faites pas bombarder, j'aurais pas à les retenir. Donc appelons tes amis au plus vite avant que les renforts arrivent.

Je soupirai.

- Soit. Comment on fait ?

Il ferma les yeux et claqua des doigts. Une étincelle bleue s'en échappa et s'envola vers le ciel.

- Pourquoi ne pas l'avoir fait plus tôt, demandai-je 

- Parce qu'il fallait que je connaisse leur visage.

Il grimaça.

- Il va falloir que je trouve un guérisseur qui accepte de me soigner...

Je me mordis la lèvre.

- Accepte de venir au QG avec nous... Au moins pour te soigner. Tu pourras repartir après, si tu tiens tant que ça à la solitude !

Il baissa la tête.

- Je ne peux pas... je n'aime pas la solitude. Si je me retrouve entouré de gens, j'ai peur de ne plus avoir le courage de m'en séparer... Juste... toutes les personnes qui restent avec moi risquent le regard du Tyran...

Je souris avec bienveillance.

- Je m'en suis pas trop mal sortie, moi...

- Oui mais toi ça ne fait que deux jours, répliqua-t-il avec un sourire

Il secoua la tête, en grimaçant.

- Je ne peux pas mettre en danger les rebelles ! Ils sont le seul espoir de tout un pays. S'ils ne triomphent pas, le Tyran ne tombera pas.

- Mais... tu n'iras nulle part dans cet état. Considère que j'ai besoin de toi. Je suis une Voyante mais j'ai aucun professeur. Eryne m'aide à comprendre mais n'étant pas Voyante elle-même, on ne fait que patauger. Il n'y a que toi qui puisse m'aider, tu comprends ?

Il soupira.

- Ne cherche pas à m'embobiner.

- Je ne t'embobine pas, c'est la vérité ! J'ai bien plus appris sur mon don depuis qu'on a des visions communes.

Il grimaça à nouveau.

- Bon... je viendrais avec vous pour me soigner. Mais seulement le temps de réfléchir. Ne considère pas ça comme un serment.

J'acquiesçai, soulagée.

- D'accord.