Obscuras Tome 2 : L'indésirable.

22. Trahisons.

J'atterris dans une pièce où trônait un piano. Sur un tabouret, une jeune fille tout de blanc vêtu y était installée, bavardant avec Evilash sous sa forme d'Obscuras, accoudée à un bar. A mon arrivée, les deux Obscuras se tournèrent vers moi.

- Ce n'est pas trop tôt, commenta Evilash en me détaillant de ses yeux étoilés.

Voir ce physique me fit frémir. J'avais tellement voulu le chasser de mon esprit, et voilà qu'à présent, il se pavanait devant moi...

La jeune fille entièrement blanche se redressa. Il s'agissait probablement d'Ange, la fille qui avait surgi dans le village de la Fontaine d'Argent en y semant le chaos, peu avant l'arrivée d'Evilash.

Sans perdre une seconde de plus, je sortis le message que m'avait laissé Evilash de ma poche et le lui lançait à la figure. Evilash le rattrapa au vol, le visage impassible.

- C'est quoi ton petit jeu, à la fin ? m'énervai-je, qu'est-ce que tu me veux ? Tu devrais savoir, mieux que personne, à quel point je déteste lorsque l'on joue avec moi.

Un faible sourire apparut sur la peau basanée de la jeune femme face à moi.

- Bien sûr que je le sais, lâcha-t-elle dans un sourire qui me mit sur les nerfs. Mais j'avais besoin que l'on discute, et ce message était un bon moyen de t'amener jusqu'à moi.

Je serrai les poings de rage, mais il fallait que je garde mon sang froid. Si je commençais à laisser mon impulsivité prendre le dessus, je risquais de perdre le contrôle de la situation. Evilash n'était pas seulement redoutable de par sa réputation, mais elle m'était redoutable du fait qu'elle me connaissait mieux que quiconque. Elle pouvait prévoir mes réactions, mes émotions, mes faits et gestes... Elle connaissait tout de moi. Mais j'avais également un avantage sur elle... Je connaissais dix-sept ans de sa vie. Les sept autres années relevaient peut-être du mystère, mais elle était loin de m'être inconnue.

- Ton séjour dans le palais de la véritable reine t'a plus ? me demanda Evilash, un sourire moqueur accroché aux lèvres.

Je serrai les poings, contrôlant le jet de colère qui me caressait les entrailles. Elle me cherchait... Elle me provoquait intentionnellement et c'était une chose que je ne supportais pas. Et elle le savait, j'en avais conscience. C'était ce qu'elle cherchait à faire. Elle connaissait mes réactions, savait comment jouer avec mes nerfs, comment me manipuler... Je ne devais pas rentrer dans son jeu. Je devais me comporter de façon inattendue... Mais comment agir de façon à me tromper moi-même ?

Me forçant à sourire, je camouflai ma colère du mieux que je le pus.

- C'était très divertissant ! m'exclamai-je avec entrain, cette reine est si chaleureuse, j'en suis admirative. Je pense qu'on a tout pour bien s'entendre.

Evilash arqua un sourcil et finit par lâcher un rire.

- Bien sûr, lâcha-t-elle en levant les yeux au ciel. J'imagine que c'est parce que son hospitalité était digne du paradis que tu t'es enfuit des lieux, commenta-t-elle. Mais je n'aurais pas cru que tu prendrais la peine de libérer les Clandestins. Dois-je te rappeler qu'ils ne font que t'utiliser depuis le début ? Ils t'ont menti, manipulé, pour leur propre cause, ne va pas me dire que tu comptes malgré tout t'allier avec eux ?

- Ce n'est pas ce que tu fais, toi ? Manipuler et mentir à tous ceux qui t'entoure, fis-je remarquer d'un ton froid. Sache qu'ils ne me manipulent pas, c'est moi qui les utilise pour mon besoin, pas l'inverse.

Evilash éclata de rire à l'entente de ces derniers mots.

- Tu ne crois pas sérieusement ce que tu dis, là ? Sérieusement Eudora, fais marcher tes méninges... Tu crois vraiment qu'ils acceptent ta compagnie par politesse et entraide ? Ils t'ont fait venir dans ce monde, cette époque, pour t'utiliser. Ils n'arrivaient pas à mettre la main sur moi, ni à m'arrêter, alors ils t'ont fait venir pour en apprendre plus sur leur menace, pour m'arrêter. Mais tu crois que s'ils parviennent à leur but, ils se contenteront de te garder avec eux et de te laisser vivre paisiblement dans ce royaume ? s'amusa-t-elle.