6. Supplice.

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Je me réveillai dans ma cellule, allongée à même le sol. Mon corps brûlant et douloureux me rappela bien vite les tortures qu'on m'avait fait subir. Le rêve de Kalidas avait effacé la douleur, mais seulement temporairement.

Je me redressai lentement, regardant autour de moi. Toujours les mêmes murs, la même odeur de poussière dans l'air, les mêmes barreaux. Je m'avançai vers la grille. La cellule d'en face était vide. Martial ne s'y trouvait pas.

Où était-il ? Sa peine de mort était-elle prévue avant la mienne ? Venait-il de subir sa sentence ou alors une nouvelle séance de torture ?

Et combien de temps me restait-il encore avant qu'on ne vienne de nouveau me chercher pour me tirer des informations ?

Mais grâce à Kalidas, je pouvais retirer mon réducteur et me servir de mes pouvoirs. Il m'avait également appris qu'il avait caché une pierre d'amétrine sous une dalle, afin que je puisse m'enfuir hors de ma cellule. Et j'avais toujours le poignard que j'avais dérobé à Arachné. Je possédais déjà pas mal d'atout.

Mais même si je pouvais retirer mon réducteur, je ne savais pas comment utiliser le pouvoir des cendres... Je me remémorai l'attaque au village de la Fontaine d'Argent. J'avais réussi à faire disparaître toutes les cendres du village, puis à les lâcher sur les cavaliers. A ce moment-là, j'avais cru mettre emparée du pouvoir d'Evilash... Mais avec le recul, je savais désormais que ce n'était pas le cas. Je m'étais servis de mon propre pouvoir sans même m'en rendre compte, sans même savoir posséder un tel pouvoir. L'énergie d'Evilash, présente ce jour-là, avait-elle influé sur mes dons ? Avais-je réussi à utiliser mes pouvoirs, parce que mon autre moi était en plein action, à quelques centimètres de moi ? Je me souvenais encore avoir ressenti l'énergie palpiter autour de moi, j'avais eu la sensation que je pouvais la saisir, la manipuler. Mais ce n'était qu'une simple sensation. Le pouvoir d'Evilash était mien, elle me l'avait tendu et je m'en étais emparé.

Et j'étais désormais convaincue qu'elle l'avait fait intentionnellement. Elle avait dû se douter que je ressentirais l'appel de mon propre pouvoir et que je finirais par parvenir à m'en emparer. C'était probablement pour cette raison que lors de ma première rencontre avec elle, elle m'avait envoyée voler en l'air à mainte reprise, jouant avec moi comme un chat avec une souris. Elle avait déjà voulu me faire acquérir ce don. Elle avait déjà essayé.

Mais sans elle, étais-je capable de réitérer mon exploit et de tout réduire en cendres ? Je m'en sentais incapable. Je ne me sentais pas capable de faire jaillir des cendres sans sentir l'énergie de ces dernières, tout autour de moi.

Avec ou sans réducteur, j'étais démunie de tout pouvoir.

Enfin, ce n'était pas tout à fait vrai.

Je savais que je possédais d'autres pouvoirs, je savais même les manipuler à ma guise. Mais je ne les avais jamais utilisés dans d'autres contextes que me créer ma routine. Et il m'avait toujours paru inconcevable que je puisse m'en servir à d'autres fins.

Mais avais-je le choix ?

Puisque tout avait dérapé, que plus rien ne serait jamais comme avant, je devais bien accepter ce changement et ce qu'il impliquait. Je serrai les poings de rage. Il fallait que j'utilise ces dons, il fallait que je compense mon incapacité à me servir des cendres, et j'en avais la nausée rien que d'y penser. Je m'étais promise de ne jamais utiliser ces pouvoirs pour autre chose que subir ces journées identiques à la chaîne. C'était ma sentence. Je l'avais choisi. Et voilà que je devais revenir sur mes décisions.

Mais je devais reconnaître que ces pouvoirs pouvaient être ma porte de sortie. Avec eux, je savais comment me tirer de ce château. Du moins, j'avais une grande idée.

Obscuras Tome 2 : L'indésirable.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant