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CHAPITRE II

"Qui se repose sur son coeur est un fou."

Proverbe allemand.

Il est là.

Aussitôt mon coeur s'agite amoureusement.

Il fait irruption dans la pièce, déambulant parmi la foule d'étudiants, son plateau à la main, comme à son habitude pile à l'heure. J'ai l'intime conviction que c'est notre rendez-vous quotidien, même si lui ne le sait pas. L'orientation de nos tables font que nous déjeunons en tête-à-tête, oubliant les mètres qui nous séparent et la foule entre nous.

Il a sa place et tout le monde sait qu'elle est sienne sans avoir eu besoin de dire quoique ce soit. Dès le premier jour, il s'est assis en clouant la salle dans un silence funebre. Tout simplement.

Tous les regards sont rivés vers lui. C'est seulement une fois assis, que l'assemblée fait mine de s'affairer en picorant dans leur assiette. Personne ne s'aventure à le regarder fixement, de peur de ce qui pourrait se passer. J'observe néanmoins que même après un mois parmi nous, il fait toujours cet effet-là à chaque venue. Sûrement, parce qu'il est « le nouveau prof de sport » ou alors parce qu'il est loin d'avoir la tête toute mignonne des autres hommes du bahut. La deuxième option me paraît plus logique. Ça a l'avantage de faire taire un instant Nate et Cassie et je l'en remercie intérieurement. Les conversations reprennent moins agitées, comme si son entrée intime l'ordre de faire moins de bruit.

—J'ai eu des infos sur lui, intervient Julian, vous allez comprendre pourquoi le gars n'a pas d'amis.

Il donne un petit coup de tête dans la direction du concerné.

— On veut tout savoir ! rétorque Cassie impatiente. Un ex-taulard ? Un trafiquant de drogue ? Je parie cinquante balles que c'est un truc du genre.

Elle sautille sur elle-même tout excitée en tapant d'une main sur la table et nous présentant l'autre pour lancer le pari. 

Nous nous regardons le sourire aux lèvres et l'ignorons.

On sait très bien que même en cas de victoire, le gagnant ne verra jamais la couleur de ses « 50 balles ».

— N'importe quoi, s'exclame Nate, bon t'accouche ou quoi ?

Je mange silencieusement, balançant mon regard d'un visage à l'autre. Ma respiration s'accélère subitement en pensant à ce que je vais découvrir sur lui.

— J'ai entendu dire que c'est un ancien militaire, caporal dans l'infanterie.

Oh. Un caporal.

— C'est quoi exactement l'infanterie ? interroge ma colocataire.

— Ce sont des combattants, ceux qu'on envoie à la guerre, enchaîne Nate.

 — Oh... soufflons-nous, à l'unisson.

— Il était l'un des meilleurs, il a arrêté après sa dernière mission en Afghanistan. Et oui, il aurait fait de la prison aussi.

Le regard triomphant de Cassie nous empêche quelconque remarque.Julian reprend après quelques instants.

— Apparemment, il aurait fait partie d'un gang, le genre à ne surtout pas contrarier au risque de finir enterré.

On se retourne automatiquement vers lui laissant sa dernière phrase en suspens.

Un gang ?

 — Comment tu sais ça toi ? rétorque Nate intrigué.

— Je connais quelqu'un qui connaît quelqu'un qui connaît quelqu'un, ajoute Julian à voix basse.

LE PLUS DUR DES COMBATSOù les histoires vivent. Découvrez maintenant