Après toutes ces nuits d'observation me voilà devant la porte de cette vieille maison. Ruby et Léo sont là, comme à chaque fois. Ça fait un moment qu'on surveille ce nid, il est temps de s'en charger. Ils ne doivent pas être plus de quatre, dont une femme. Je n'aime pas avoir à tuer ces buveurs de sang, mais j'ai vu ce qu'ils faisaient, et eux ne font aucune distinction d'âge ou de genre, ils tuent, point. Si nous ne le faisons pas, qui le fera ?
Personne ne veut voir ni savoir. Allez dire qu'un vampire a croqué quelqu'un dans la rue et observez la réaction de la personne en face de vous. Quelques uns, comme nous, se battent contre eux, pour sauver quelques vies à notre petit niveau. Notre principal problème est qu'ils se multiplient à une vitesse monstrueuse. Ils font des petits groupes un peu partout et recrutent sans arrêt, une vraie plaie.
Ceux qui savent les reconnaissent, le grain de peau, les yeux, des choses qui ne nous trompent pas. Rien ne sert de regarder l'état du cou, ils ne mordent la carotide que pour tuer. Pour transformer ils s'attaquent à un endroit plus facile à cacher, sauf les idiots.Pour l'instant je n'y pense pas, on doit entrer pendant que le soleil brille. On peut se permettre de faire ça en pleine journée, cette vieille maison au milieu de nulle part, il y a peu de chance qu'on se fasse repérer. L'avantage c'est qu'ils n'ont pas d'échappatoire, s'ils sortent ils meurent, s'ils ne sortent pas ils meurent quand même, à moins qu'on soit moins malins qu'eux.
J'ouvre la porte d'un coup de pied de biche et entre, il n'y a personne dans la première pièce qui semble être un salon complètement détruit, et sûrement pas utilisé. Léo me couvre et ouvre les volets qui ont été soigneusement fermés. Ruby se dirige directement vers une porte fermée. J'entends du bruit au dessus de nous, le sol craque. Je propose à mes camarades de nettoyer le bas pendant que je m'occupe du haut.
Je monte les marches avec prudence et arrive au premier et seul étage. Une chance qu'il y ait une fenêtre sur le palier dont j'ouvre le rapidement le volet par sécurité, on ne sait jamais. J'ai le choix entre deux portes mais je ne traîne pas et ouvre directement la première, un pieu à la main. La salle est vide, rien ne bouge. Il n'y a qu'une grande lampe poussiéreuse dans un coin de la pièce et des chaînes sur le sol, reliées aux barreaux de la seule fenêtre, très sale, mais dont les volets sont bien fermés, c'est flippant. J'en déduis que le bruit venait de la pièce d'à côté. Je ne suis pas serein mais je me dirige vers la deuxième porte, serrant le pieu dans ma main, ne sachant pas à quoi m'attendre.
Mon cœur bat très vite, impossible de savoir combien ils sont là dedans, s'ils sont plus de deux je ne donne pas cher de ma peau, même si je suis plutôt bien équipé pour éviter qu'ils soient trop tentés de me croquer. Je ne réfléchis plus et ouvre la porte. J'ai à peine le temps de voir qu'ils ne sont que deux lorsque le premier se jette sur moi. Je profite de son mouvement de recul provoqué par mon doux parfum fait maison, pour lui planter le pieu dans le cœur, je suis encore plus repoussant que je ne le pensais. Je dégaine un autre pieu et bug un moment en regardant le deuxième.
Je suis resté des heures à les observer sur plusieurs jours et je suis certain de ne l'avoir jamais vu, je crois savoir pourquoi. La pièce est pratiquement la même que la précédente avec son mur dégoulinant de papier peint en lambeaux, le même parquet sale et gondolé. Il n'y a pas de lampe dans le coin de la pièce, juste une ampoule qui pend au plafond, mais les mêmes chaînes reliées aux barreaux de la fenêtre dans le même état dont les volets renforcés par des planches de bois ne laissent passer aucune lumière.
Je n'ai que la faible lumière du palier pour voir l'intérieur. Les chaînes sont là certes, mais celles là retiennent cette créature.C'est un jeune homme, l'une de leurs nouvelles recrues je suppose. Il se tient debout, face à moi, et me regarde. Je n'arrive pas à bouger, je ne sais pas pourquoi. Il s'avance vers moi alors que j'ai toujours un pieu à la main. Il a l'air faible mais ne s'arrête que lorsque les chaînes l'y obligent.
Il n'est plus qu'à deux pas à peine de moi, pourtant je n'ai pas bougé. Son regard est tellement noir, au sens propre. Ses iris sont aussi noirs que ses pupilles, c'est étonnant, fascinant même, mais malgré tout je ne ressens aucune agressivité. Il ouvre les bras, comme s'il attendait que je le tue.
Ça fait des années que je traque ces créatures, je n'ai jamais vu ça. Je ne me suis jamais comporté aussi dangereusement lors d'une chasse. C'est surtout la première fois que j'hésite à un tuer un.
Si je ne l'ai pas vu pendant ma période d'observation c'est simplement parce qu'ils l'ont recruté. Ils sont d'abord enfermés pour éviter de se faire repérer, le temps de leur « éducation » comme ils disent.
Ça doit faire un moment qu'ils le gardent enfermé, il est à bout de force. J'aurais presque pu penser qu'il était humain si je ne voyais pas ses canines acérées dépasser de sa lèvre supérieure et ses yeux noirs improbables.
Je n'en reviens pas de faire ça, mais je range le pieu dans ma ceinture. Il tente de parler faiblement.- Tue moi... je ne veux pas être comme ça.
C'est ce que je suis censé faire, mais je ne le ferai pas. Je ne me comprends pas mais je ne veux pas le tuer, et je m'écoute toujours.
- S'il te plait ne fais pas de bruit. Je reviendrai te détacher, juste... reste discret.
Il parait aussi étonné que moi mais est tellement faible qu'il manque de s'écrouler. Heureusement je le rattrape avant qu'il ne puisse faire du bruit et attirer l'attention de mes coéquipiers, parfaitement conscient qu'il pourrait me bouffer. Je l'aide à s'asseoir contre le mur et lui fait signe de se taire avant de sortir de la pièce et refermer la porte derrière moi. Peu importe ce qui me prend, je tiendrai ma promesse.
Je me dépêche de descendre retrouver Léo et Ruby. Je leur dit que j'en ai eu un et qu'il n'y avait rien d'autre. De toute façon personne ne s'attendait à en voir un de plus.
Nous ressortons et rentrons chez nous en attendant la nuit pour revenir débarrasser les cadavres, enfin, seulement Léo et moi pour cette fois. Je dois y retourner avant mais je dois attendre au moins le coucher du soleil, cette attente est insupportable. Ce qui est encore plus insupportable c'est mon comportement, je ne me reconnais pas. Je suis devenu suicidaire en un claquement de doigts, ou juste idiot... je ne sais pas ce que je préfère.
~~~ A suivre...
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Un cœur éteint peut toujours aimer
VampirosLes choses ne se passent pas toujours comme on le voudrait, surtout quand il s'agit de débarrasser les rues de créatures telles que les vampires. Et si l'un d'eux chamboulait complètement la vie d'Andrew, pour l'éternité, changerait-il sa vision des...