Notevember 2019 et autres

26 : Tableau, Visite (2024)

Gus et Edurne 36/Eshee 10/Mika 4
TW : euhh je sais pas moi. gars bizarre (un homme quoi)

Après avoir raccroché, il se dépêcha de ranger les dossiers dans leurs tiroirs réservés et les stylos sur le côté du bureau. Même s'il était pressé, il ne pouvait pas laisser des feuilles à traîner. Il sortit de la pièce quelques instants plus tard. S'il marchait assez vite, il serait à l'école de Mika dans quinze minutes. Il passa devant deux étudiants en stage de Master qui malheureusement l'interpellèrent :

"Oh! Vous avez pu regarder ce qu'on vous a envoyé ?
- Oui, répondit-il en continuant à marcher.
- Qu'est-ce que vous en pensez ?
- Je vous ferai un commentaire plus tard. Je dois y aller. Je travaillerai de chez moi.
- Pourquoi ?
- Il y a un problème ?
- Ce n'est... commença Gus, s'arrêtant net et essayant de se convaincre qu'il fallait être agréable avec ses collègues au lieu de les envoyer balader. Rien de grave. Ma fille est malade, je vais la chercher.
- Vous avez une fille ?!
- ... Deux.
- Mais alors vous avez une femme ?
- ... Nous ne sommes pas mariés. Concentrez-vous plutôt sur le dossier. Relisez ce que vous avez écrit. Il y a des fautes d'orthographe, asséna Gus qui avait atteint sa limite de sociabilisation.
- Ah, d'accord...
- Bonne soirée."

Il continua sa route d'un pas sec, se disant que les plus jeunes étaient tout de même bien curieux, et croisa une collègue avocate dans les escaliers. Il poussa ses efforts pour discuter avec elle le temps de descendre les quatre étages, mais fut ravi d'être enfin seul une fois sorti. Il n'y avait plus qu'à espérer que Mika n'allait pas trop mal, mais son esprit n'arrêtait pas de lui proposer des scénarios catastrophe complètement irréalistes. Elle avait seulement dû attraper un petit virus. Ne sachant pas si Edurne était au courant, il lui envoya un message même si elle ne pouvait pas les rejoindre. Elle était en visite à Berlin pour quelques jours pour écrire sur un festival et ne rentrait que le lendemain. S'occuper d'Eshee et Mika tout seul était sportif, mais il se débrouillait. Comme prévu, il arriva rapidement à l'école et récupéra Mika, qui avait le visage pâle et de petits yeux.

"Oh, ayouni*, murmura Gus en la prenant dans ses bras et écartant quelques cheveux du front de sa fille pour poser quelques doigts sur sa peau brûlante. Je suis désolé de ne pas être arrivé plus vite. Comment te sens-tu ?
- Hmm, répondit Mika en agitant la tête négativement.
- D'accord. Rentrons vite."

Il la garda dans ses bras pour être efficace. Elle était adorable, mais devoir se plier en deux pour lui tenir la main et faire en un pas ce qu'elle faisait en quatre était tout sauf pratique. Et il pouvait ainsi la protéger du froid mordant avec son manteau. Elle parla peu pendant le voyage, visiblement exténuée, et il la laissa tranquille. Il était déjà rassuré de l'avoir contre lui, ses petits doigts accrochés au col de son pull, et profita de l'absence de discussion pour appeler et prendre rendez-vous chez le médecin pour le soir-même. Une fois à la maison, il alterna entre s'occuper d'elle et écrire pour le travail, les clients, les stagiaires, et pour ce qui lui semblait être la Terre entière. Il faillit oublier de vérifier l'heure, mais ils retrouvèrent heureusement Eshee à la sortie de son école et elle fonça dans ses jambes.

"Papa ! Coucou ! ... Pourquoi elle est là Mika ?
- Coucou. Elle ne se sentait pas bien. J'espère que tu n'es pas trop fatiguée, nous devons aller chez le médecin.
- Maintenant ?
- Oui. Pour être sûrs que tout va bien.
- Je peux rentrer à la maison toute seule ?
- Non, tu ne peux pas. Il fait quasiment nuit.
- C'est à cinq minutes de l'école, se plaignit Eshee en restant à la sortie du bâtiment.
- Eshee, s'il te plaît, fit-il doucement en lui tendant la main. Tu n'as pas les clés et je n'ai pas envie de te laisser toute seule le soir, même pour cinq minutes. Viens avec nous."

La fillette poussa un soupir ennuyé mais attrapa tout de même sa main pour les suivre. Il la remercia et ignora son dos qui commençait à crier à l'aide. Il dut répondre à un nouvel appel du cabinet en calant son téléphone contre son épaule et son oreille pour ne lâcher ni Eshee ni Mika. Il ne put raccrocher que quelques secondes avant de rentrer chez le médecin, et cligna des yeux en voyant qu'il ne restait qu'une seule place assise dans la salle d'attente. Il laissa les deux filles s'y installer et fit de son mieux pour se tenir droit à côté, malgré le plafond frôlant ses cheveux et ses muscles douloureux. Il lui fallut quelques minutes pour remarquer qu'un cinquantenaire les fixait, étant occupé à répondre à d'innombrables mails. Il le regarda en retour, le visage fermé.