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C'est après huit heures de vol que l'avion arrive enfin à destination. Une nouvelle page de ma vie va s'ouvrir. Voilà plus d'un an que je prépare ce séjour aux États-Unis. Car j'ai décidé de passer une année d'études sur l'autre continent, initiative largement encouragée par mon université. Et j'ai choisi le pays de l'oncle Sam parce que j'ai toujours été fasciné par la culture américaine. J'ai envie de voir comment les choses se passent en vrai ! Dans le hall de l'aéroport, j'ai droit à un petit comité d'accueil, trois personnes. Ils font partie de l'association des étudiants internationaux. Pour mes premières heures sur ce continent je ne vais donc pas discuter avec des Américains, mais avec une Anglaise, un Mexicain et une Japonaise. Ils parlent d'ailleurs beaucoup sur le trajet qui mène à l'université. Moi je ne dis pas grand-chose, le voyage m'a quand même sacrément fatigué.


Nous arrivons à l'université. Le campus est tel que je me l'imaginais, c'est-à-dire qu'il ressemble parfaitement à l'image véhiculée par les séries et les films. De jolis bâtiments avec des façades en brique, de larges espaces verts, que je peux distinguer même s'il fait nuit. Le problème c'est que la voiture s'arrête devant l'édifice le plus moche, limite en état de délabrement.

– Désolé, tu vas séjourner dans le plus vieux dortoir du campus.

On me détaille le fait que ce dortoir réunit tout ce que l'université compte comme sportifs. Les joueurs de football américain, de baseball, de basketball... Ils sont tous dans le même bâtiment. Il n'y a pas une seule fille, j'imagine qu'il y a trop de risques à laisser des étudiantes dormir avec toutes ces brutes pleines de testostérone.

– Ici c'est le lobby.

Une vaste salle avec des canapés, des baby-foot, trois grands écrans de télévision. C'est donc l'espace dans lequel on se réunit pour se détendre. Puis nous montons dans les étages, étant nul en orientation j'essaie de bien mémoriser le chemin.

– Voilà ta chambre.

Elle est assez grande, je suis content. Pas en très bon état, comme l'ensemble du bâtiment, on sent qu'il y a eu du vécu.


Les trois étudiants internationaux sont restés dans le lobby, mon guide est un étudiant de dernière année qui s'est porté volontaire pour la semaine d'orientation des nouveaux.

– Il y a juste un petit problème.

À part le fait qu'il n'y a pas de draps sur le lit et que je n'ai pas pensé à en amener, je ne vois pas.

– Normalement, on fait en sorte que les étudiants internationaux partagent les mêmes chambres. On évite de mettre un américain avec quelqu'un d'une autre nationalité.

Ce qui est débile puisque je viens pour une expérience américaine. Mais je fais confiance à l'université, ils reçoivent des étrangers depuis longtemps. Et apparemment les choses ne se passent pas très bien quand on partage sa chambre avec un américain, le choc des cultures est trop grand. Je ne comprends pas encore exactement ce que cela veut dire, mais j'écoute sagement.

– Cette année, vous êtes en nombre impair.

« Vous » désignant les étudiants étrangers.

– Et comme on ne peut pas non plus te laisser seul dans la chambre, tu devras la partager avec un américain.

Il m'annonce cela comme la plus terrible des nouvelles. Moi je ne vois pas vraiment le drame, pour moi c'est plutôt positif, je suis ici pour ça !


On me laisse tranquille le temps que je m'installe. Je choisis mon côté de la pièce, puisque je suis le premier arrivé. Je n'ai pas grand-chose à déballer étant donné qu'on est limité en termes de poids des bagages. Et surtout, là tout de suite, il faut que je prenne une douche. J'ai beaucoup transpiré pendant le voyage. S'ils n'ont pas prévu les draps, il y a par contre une serviette sur le lit. Dans un piteux état mais cela me suffira. Je pars donc en quête de la salle de bains. Elle n'est pas très compliquée à trouver... Mon guide m'a rapidement expliqué le concept :

-C'est une pièce d'eau pour vingt étudiants.

Je vais donc devoir partager les lieux avec les autres. Il n'y a que cinq lavabos, cinq toilettes et cinq douches. Je sens qu'il y aura de la promiscuité. Enfin pour le moment je suis seul, donc j'en profite. Je me demande si c'est fait exprès mais les rideaux de douche sont très courts. Ils s'arrêtent à peu près au niveau des genoux, autant pour l'intimité. J'apprendrai bien vite que c'est à cause d'une certaine crainte des suicides, il faut que l'on puisse voir ce qui se passe en permanence. Je pense qu'il est temps de dire adieu à toute pudeur.


Une fois lavé et habillé je rejoins les autres dans le lobby. Ils sont bien décidés à parler toute la nuit alors que je voudrais juste dormir. Mais pendant une semaine je ne serai pas maître de mon emploi du temps puisqu'il y a sept jours d'adaptation. C'est obligatoire pour tous les étudiants étrangers. Plusieurs intervenants vont se succéder pour nous expliquer comment nous comporter envers les Américains, pour ne pas les froisser. Le plus important, qu'on nous ressasse, est de ne jamais aborder des sujets religieux ou politiques, c'est un terrain beaucoup trop glissant. Aucun risque avec moi, je ne suis pas vraiment croyant et je ne m'intéresse pas à la politique.

Cette semaine comprend évidemment aussi un tour complet du campus et de la ville dans laquelle nous sommes. Du matin jusque tard dans la nuit il y a de nombreuses activités. Mais pour l'instant, je n'ai pas vraiment été en contact avec des étudiants américains. Ils doivent débarquer durant le week-end pour s'installer. Avec toutes les mises en garde que nous avons reçues j'avoue que l'angoisse monte un peu. On dirait qu'il faut faire attention à tout ce que l'on dit. Surtout que je suis le seul à ne pas partager ma chambre avec un étudiant international, à la fin de cette semaine je comprends pourquoi c'est une mauvaise idée. C'est donc stressé que, le samedi, j'attends de voir qui est mon roommate, mon camarade de chambre.

RoommateOù les histoires vivent. Découvrez maintenant