Rendez-vous ce soir sur Dreamland [Terminé]

Chapitre 14

« Merci beaucoup pour votre achat et à bientôt », prononça distraitement Akira en regardant l'horloge du coin de l'œil.

16h55.

Depuis son arrivée à Game Corner avec trois heures d'avance, il s'était arrangé pour enchaîner les tâches à un rythme effréné, ce qui lui avait permis de rester l'esprit occupé et d'éviter les potentielles questions de Makoto au sujet du Tokyo Game Show ; mais à présent, son cœur semblait décompter chaque seconde qui le rapprochait de l'arrivée de Kaori, tel le minuteur d'une bombe prête à exploser.

Quelle ironie...

Jamais il n'aurait pensé ressentir à nouveau cette appréhension si familière qui l'avait rongé pendant des mois, lorsque Takeshi travaillait encore ici. Il ne connaissait que trop bien cet étau qui lui enserrait la poitrine à l'idée de voir quelqu'un qu'il voulait éviter à tout prix. Tous les jours, il s'était forcé à fuir le regard de son collègue pour que la rage ne reprenne pas le dessus. Chaque seconde avait été un véritable combat contre ses émotions afin de trouver la force de côtoyer, avec professionnalisme s'il vous plaît, la raclure qui lui avait pris Megumi. Certes, les circonstances étaient totalement différentes, mais la sensation de malaise était étrangement similaire.

17h05.

Elle a dû louper le train.

Après tout, le centre de convention qui accueillait le Tokyo Game Show était à une heure et demi d'ici...

17h15.

« Des nouvelles de Kaori ? » demanda Makoto entre deux clients.

Akira secoua la tête, les yeux toujours fixés sur l'horloge.

Qu'est-ce qu'elle fait ?

Sur le qui-vive, il tourna la tête vers la porte du magasin lorsque celle-ci émit un léger tintement, et soupira lorsqu'il vit entrer deux lycéens qui discutaient joyeusement.

« Tu es sûr que ça va ? » reprit son collègue en l'observant d'un air soucieux.

17h30.

« Mlle Watanabe n'est pas encore arrivée ? »

Occupé à monter un présentoir à l'effigie de Furry Tale, Akira leva les yeux vers son patron qui le considérait avec sévérité, comme s'il le tenait pour responsable de l'absence de Kaori.

« Non, pas pour l'instant », marmonna le jeune homme en reprenant là où il s'était arrêté.

Tandis que M. Tominaga s'éloignait vers son antre, Makoto quitta discrètement son poste à la caisse pour rejoindre Akira.

« Toujours aucune trace de Kaori... Tu penses qu'elle a oublié ?

— Je ne suis pas dans sa tête, lâcha Akira en forçant une attitude désinvolte.

— Tu n'aurais pas son numéro de portable, par hasard ? »

Pour toute réponse, Akira le dévisagea en haussant exagérément les sourcils.

— Quoi ? reprit Makoto sans comprendre.

— Je pense qu'elle l'aurait donné à toi, à M. Tominaga et même au gars de la supérette d'à côté avant de considérer la possibilité de me le proposer. »

Un éclair de lucidité traversa le regard de Makoto.

« M. Tominaga doit certainement l'avoir sur sa fiche d'employée !

— Rappelle-moi pourquoi tu es tellement intéressé par son numéro de portable, déjà ? soupira Akira.

— Il faut bien que quelqu'un prenne de ses nouvelles. Et s'il lui était arrivé quelque chose ? »