Terreur Lunaire - Livre 1 - Vers le Cœur Arkhale

IX - Imprévus - Partie 2

01 février 1875 — Sultakara

Après avoir appris ce qu'il s'était passé, Assad et Zahya s'étaient réunis avec leur fille, Grenat et Shems dans le salon royal. Estomaqué que Lunera puisse traverser les défenses du royaume, pourtant renforcées, avec une facilité déconcertante, le roi était dans tous ces états. Pire encore : il faillit faire une attaque en apprenant qu'elle se soit rendue sans encombre dans la chambre de la princesse. Passer les défenses était une chose, mais passer outre Shems et Grenat en était une autre. Le roi s'était entretenu avec quelques soldats et après avoir vu de lui-même les quatre corps que Lunera avait laissé derrière elle, il s'était fait une raison. Il décida de parler de la jeune fille à son peuple.

Zahya avait raison.

— Les défenses étaient à leur maximum, et toutes les entrées étaient gardées. Comment se fait-il que l'alerte n'ait pas été lancée ? se demandait Assad, furieux, ne cessant de faire les cent pas. Et que faisait cette fille dans la chambre de Saphir ? Une chance que vous fussiez là-bas Shems, sinon...

Il se tut, mortifié, n'osant pas songer à comment ils auraient retrouvé Saphir. Grenat ouvrit sa bouche mais la princesse la devança.

— Cette peste est déloyale, gronda Saphir, en colère malgré son choc premier. Ah ! Attendez un peu ! Elle me prend toujours par surprise.

— Nous n'attendrons rien, Saphir, répondit Assad, sévère. Pas d'actes inconsidérés. Grenat, vous alliez dire quelque chose, ajouta-t-il en se tournant vers la générale.

— Oui... répondit Grenat. Nous avons pu voir Lunera utiliser un dragon pour se déplacer. Il semblait être doré, je me demande s'il s'agit de la même monture qu'utilisait Darkodem. Lorsque Shems et moi sommes arrivés aux portes de Sultakara, nous avons tous les deux lancés, euh... des sorts. Nous l'avons touchée, c'est certain.

Assad s'arrêta subitement et haussa ses sourcils. Grenat avait hésité, c'était rare.

— Dans ces cas-là, Lunera doit être encore opérationnelle, remarqua Zahya, qui n'avait pas relevé la gêne de la générale. Vers le sud-est, Yaqutane n'est pas si loin, peut-être que Lunera a échoué là-bas ?

— Attends, ma chère, la coupa Assad. Quels sorts avez-vous lancés ? demanda le roi, suspicieux.

Mortifié, Shems se tendit aussi droitement qu'un piquet. Le règlement lui importait beaucoup, certes, mais pas autant quand cela concernait sa camarade générale des armées. Grenat, quant à elle, ne parvenait pas à lever les yeux vers son souverain.

— De mort, murmura-t-elle. J'ai lancé le sortilège de Mort.

Hébété, Assad la regarda comme si c'était la première fois qu'il la voyait. Saphir écarquilla ses yeux, pleinement surprise.

— Comment avez-vous... pu, Grenat ? Enfin ! Même s'il s'agit de Lunera, c'est un maléfice interdit, très sévèrement puni par le Conseil des Neuf à la Conférence Internationale. Vous avez de la chance qu'aucun témoin ne soit présent, sinon, vous seriez immédiatement saisie ! Générale ou pas, la loi internationale est stricte en ce qui concerne ce sortilège.

Grenat, acceptant durement la remontrance, se sentit nauséeuse.

— Vu la situation critique, je ne vais prendre aucune mesure. Mais croyez-moi que si la menace de Lunera ne nous planait pas au-dessus, j'aurais pris votre épée, pour vous faire comprendre que vous avez risqué gros.