Chapitre 15

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Le lendemain, chez Hopper, 

Novembre 1984,

Hawkins, Indiana. 

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Je n'ai pas fermé l'oeil de la nuit. J'étais submergée par les problèmes. Ma gorge, mes yeux, ma tête, tout mon corps était endoloris, ralentis. 

J'ai pleuré, un peu. Mais mes larmes étaient brûlantes, et elle chauffaient mes yeux comme avec un fer à blanc. Au petit matin, j'étais déjà debout, après avoir passé une nuit blanche d'angoisse. Mon père, la personne en qui j'avais le plus confiance, sur toute la Terre entière, venait de me claquer la porte au nez. 

Je passai donc la matinée à lire, les yeux rivés sur ma tasse de café brûlante qui ne m'apportait pas plus d'énergie que ça. À midi et demi, je me décida à me lever, m'habilla en vitesse, et noua un chignon rapide au sommet de mon crâne. 

Je me dirigeai rapidement vers le salon, où je trouvai Hop en train de regarder MTV, et El, en train d'enfourner une gaufre pleine d'oeufs et de bacon dans sa bouche. Hopper m'en proposa une, mais mon estomac était noué. 

Quelques minutes plus tard, à 13h pile, on entendit un moteur de voiture rugir devant la maison. Jim me lança un regard interrogateur, mais je lui fit signe que c'était OK. 

- I'm leaving for a couple of hours. I'll be here at 5. 

Hop se contenta de hocher la tête, les yeux pleins de compréhension. J'ouvrit la porte de la maison au moment ou Billy sortait de la voiture. À son visage on avait porté de nouveaux coups, et je me demandait contre qui il aurait pu se battre cette fois ci. 

Je pris soin de fermer la porte avant que Hopper ne voit l'état actuel de mon ami, et me dirigea vers ce dernier. 

Il a du voir à quel point l'ennui, le désespoir et la fatigue qui se lit dans mes yeux, et, sans me prévenir, il me prend dans ses bras. Presque machinalement, je colle ma tête sur son torse. 

Il sens l'eau de Cologne et la cigarette. 

- We both look like shit, uh ? 

Je rigole. Il desserre notre étreinte, et m'attrape la main. 

- Let's go, right ?

Je hoche la tête. On entre dans sa Camaro, dont l'odeur est plus forte encore. Avant qu'il ne démarre l'engin, je lui dit :

- Who did this to you ? 

- I don't wanna talk about it. Répond t-il, alors que la voiture démarre. 

J'acquiesce, et souffle :

- Okay. But, if you change your mind (1), you know you can tell me, right ? 

(1) if you change your mind = si tu changes d'avis. 

Il hoche la tête, et la voiture tourne à gauche. 

Quelques minutes plus tard, j'ai les pieds sur le tableau de bord, et demande, un voix rêveuse :

- Where do take me, young man ? 

Il aborde son sourire en coin légendaire, et répond :

- Surprise, baby doll !

Je rigole, regarde par la fenêtre de la voiture. Il reprend la parole. 

- So, you're gonna go back to Cali (2), hmm ? 

(2) Cali = Californie 

Je soupire, et lui raconte l'histoire, la voix tremblante.

- All the men of your life are assholes. Dit il en tirant sur sa clope. 

Je manque de dire que Steve n'est pas un trou du cul, mais au lieu de ça, je lui demande :

- All of them ?

Il hoche la tête, le regard focus sur la route. 

- You're not an asshole. 

Il hausse les épaules, visiblement pas très convaincu. Je ne peux m'empêcher de le regarder. Son oeil droit est orné d'un bleu presque violet, la flamme ses yeux bleus océan semble éteinte, et sur sa lèvre trône une coupure encore un peu ensanglantée. 

Puis, mon regard se tourne vers ses mains. Rien. Il ne s'est pas battu. Sinon, ses phalanges seraient pleines de bleus, elles aussi.

J'en tire une terrible conclusion, et frissone. 

Quelques minutes plus tard, il gare sa Camaro à la lisière d'un bois, et me fais sortir de la voiture.  On marche pendant quelques minutes, puis, on parvient dans une clairière. L'herbe est verbe pomme, inondée de lumière et parsemée de rosée. 

En plein milieu, il y a un étant que le gel et le froid de Novembre ont recouvert d'une fine couche de glace, qui étincelle et brille encore plus, illuminée par la lumière blanche du soleil d'hiver. 

- Wow. That's... Beautiful. 

Billy sourit et s'assoit par terre. Je le rejoins et me colle un peu à lui, pour lutter contre la brise glaciale. Je le regarde, et, en restant totalement silencieuse, caresse les blessures qui barrent son visage. 

- Why didn't you fight back (3), Billy ? You're so strong... Murmurais je. 

(3) fight back = riposter 

À ces mots, il tressaillit, et plonge ses yeux dans les miens. Il sont pleins de larmes. Je met mes mains sur se joues, et mords ma lèvres inférieures. 

- No, don't cry, please don't... Dis je essuyant ses larmes. 

Il ferme les yeux et l'une d'entre elles parvient à s'échapper. Je dépose un baiser sur son front, et, alors que mon visage n'est qu'à quelques centimètres de lui, je murmure :

- Please, Billy. Tell me who did this to you. 

Il y a un petit moment de silence, avant que sa réponse ne franchisse ses lèvres, dans un chuchotement presque honteux :

- My dad. 

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- Fin du chapitre 15 -

19/03/20

890 mots. 


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