Un repas en famille

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Alors que le soir s'approchait et commençait déjà à baignée la Forteresse sous une lueur orangée, un ohbois, petit oiseau aux couleurs de la forêt, battait frénétiquement des ailes, se laissant quelques peu porté par le vent. Délicatement, il se posa sur le rebord extérieur d'une des fenêtres du château. De l'autre côté du verre, des voix graves se faisaient entendre :

- Elle n'est vraiment au courant de rien, constata péniblement le roi, toujours assis à la table de réunion.

La pièce plongeait peu à peu dans la pénombre au fur et à mesure que le soleil se rapprochait de l'horizon. Cortonum pris une pierre de feu lumineuse qui se trouvait sur une des étagères et la posa sur la table centrale. La salle était peu éclairée sous sa seule faible lumière mais assez pour se voir les uns les autres.

- Si je peux me permettre, Votre Majesté, intervint poliment le sorcier toujours debout mais cette fois face à la fenêtre d'où il observait curieusement le volatile. Je pense qu'il n'est pas encore temps de lui révéler toute la vérité. Mieux vaut attendre qu'elle se remette de cette première révélation.

- Je suis tout à fait d'accord avec vous, approuva son interlocuteur dos à lui. Toutefois, veillons à ce que ce ne soit pas trop tard : cela fait maintenant quatre ans que j'attends de prendre ma revanche sur ce monstre.

Ses yeux se posèrent sur les parchemins et cartes étalés sur la table de réunion dont la clarté de la pierre de feu mettait à présent bien évidence pour lui rappeler qu'il avait encore d'autres fardeaux

- Je comprends votre état d'esprit, enchaîna le sorcier en se tournant vers lui. Mais, je vous demanderai d'attendre mon retour à la Forteresse pour lui parler, si ce n'est pas trop vous demander bien sûr.

- Cela va de soi, Cortonum. Je vous attendrai.

Le vieil homme reporta son attention sur la fenêtre mais l'oiseau s'était envolé.

* * *

La vue depuis le balcon était splendide. Ma chambre étant postée dans l'aile ouest du château, j'avais la chance de posséder une vue imprenable du coucher de soleil. Après la vallée qui entourait la Forteresse, la forêt s'étendait à perte de vue. A ma droite, la falaise d'où s'accolait le château se trouvait être le pilier de montagnes encore plus hautes, tellement qu'elles semblaient empaler les nuages. Un air frais annonçant l'arrivée de la nuit me donna la chair de poule. Accoudée à la rambarde du balcon, j'imaginais mes soucis se dissiper d'un même souffle. Malheureusement, ce n'était pas aussi simple.

Je décidai finalement de rentrer au vu de la lumière du jour qui s'amenuisait. A peine eussé-je refermer la baie vitrée derrière moi qu'un frappement en trois temps résonna sur ma porte d'entrée en bois. Je ne m'attendais à avoir de la visite encore aujourd'hui.

Je traversai les quelques mètres qui me séparait de ma porte, curieuse de savoir qui pourrait me rendre visite maintenant. Quelle surprise lorsque le roi apparut devant moi.

- Bonsoir Alissa, dit-il de sa voix sérieuse et grave. Je viens te chercher pour le dîner.

Ceci m'était complètement sortie de la tête : mes repas se voyant tellement superficiels ces derniers jours, j'en avais oublié l'habitude de manger à des heures fixes.

- Ah... euh, merci, bafouillai-je n'ayant pas l'habitude de côtoyer une telle prestance.

- Suis-moi, m'intima-t-il avec un signe de tête avant de me montrer son dos et de marcher vers je-ne-savais-où.

Je m'empressai de refermer la porte de ma chambre puis, le rejoignis dans le corridor au moyen de petits trots.

Son ton demeurait d'un calme olympien et froid, dénué de toutes frivolités. Ce personnage était d'un naturel autoritaire : peu importait son volume de voix, elle était entendue. Je me sentais si petite et menue face à sa carrure carrée. Pour le regarder dans les yeux, je figurais dans l'obligation de lever bien haut le menton. La honte, il devait me considérer aussi insignifiante qu'un petit pois.

Les yeux ciel, Tome 1 : Mon origine cachéeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant