Chapitre 16

417 49 0
                                    






La nuit fut longue, très longue, bien plus longue que celles qu’il passait assis dans son bureau à travailler, vérifier des comptes ou faire des analyses. Sa première nuit en tant que mari de Mélanie, la douce et froide et distante Mélanie fut interminable pour Ferdinand. Elle était là à un mouvement de bras de lui mais en même temps elle était à des kilomètres. Il ne sait pas pourquoi il est autant obsédé par cette femme. Pourquoi elle a une telle emprise sur lui et sur ses sens ?
Mais sa chaleur son odeur qui irradie sur le lit de cette chambre et qui vient le titiller, il n’en peut plus ! S’il ne quitte pas tout de suite ce lit il va faire quelque chose de stupide, comme la supplier de l’écouter.
Et puis qu’est-ce qu’il allait bien pouvoir lui dire ? Que c’est idiot de nier l’attirance entre eux. Le feu qui s’allume chaque fois qu’ils sont en présence de l’autre pourrait faire griller une forêt équatoriale entière.
En découvrant la vérité sur cette union express, la jeune femme avait changé du tout au tout, elle avait choisit la distance et la froideur, alors qu’il s’attendait à ce qu’elle explose de rage qu’elle le traite de tous les noms, mais elle avait gardé son sang froid et lui avait calment dit qu’elle retirait sa proposition de consommer leur mariage.
La frustration qui s’était niché dans la gorge de Ferdinand le poussa à se lever, il n’arrivait plus à dormir ! Le pire c’est que la nuit n’était pas encore finie, il tendit la main et attrapa son téléphone. 4H30, la nuit  n’était même pas encore terminé, mais il n’allait pas rester là, il avait besoin de sortir de ce carcan.
Il préférait encore s’installer pour travailler en attendant que le matin arrive et qu’il puisse partir d’ici.
Il alla consulter ses mails et ses messages. A peine connecté, il eut un appel skype entrant. En voyant qui le contactait à cet heure avancé de la nuit où très matinal de la journée il piaffa, il jeta un regard sur lui-même, il portait toujours sa chemise, il la retirer avant de répondre.
Le visage de son petit frère apparut dans le cadre de son ordinateur.
- Alors je ne pensais pas que tu répondrais Bro, fit son petit-frère en lui souriant.
Il ressemblait à quelqu’un qui venait de faire un aller retour en avion en moins de 48 heures jusqu’au Cameroun. Hugues qui était venu à son mariage n’avait même pas pris la peine de parler avec son grand frère avant de s’en aller. Et maintenant il l’appelait comme s’ils ne s’étaient pas vus.
- Tu veux quoi ?, répondit Ferdinand agacé. Tu n’as pas assez vu ma tronche quand tu étais ici ?
- Je voulais vérifier que ta nuit a été bonne et à voir ta tête…
- Fais pas chier Hugues ! Toi tu as fais l’amour la nuit de tes noces ?, demanda Ferdinand en se passant une main sur le visage.
- Non mais à cette heure je corrigeais cette erreur, fit le frangin en éclatant de rire.
Contrairement à ce que ces deux là laissaient entrevoir ils ont plutôt une bonne relation fraternelle, mais ça aucune de leur mère respective ne devait l’apprendre.
- J’appelle pour te féliciter ! Mélanie est plutôt jolie… Je ne m’attendais franchement pas à ce que tu te choisisses une femme…
- Noire ?, fini Ferdinand.
- Non, tu as toujours préféré le chocolat à la vanille, donc ça ne m’étonne pas mais… Disons qu’elle est typique !
- Elle a des rondeurs et un teint qui rappelle l’Afrique ?
- Et elle vient d’une famille plus que modeste… tu l’as mis en cloque ou quoi ? se moqua Hugues.
- Non rien de tout ça !
L’expression d’Hugues changea de suite.
- Donc en fait le daron a raison ? , demanda-t-il d’une voix grave.
- Raison ? De quoi tu parles ?
Hugues secoua sa tête, il semblait troublé.
- T’es un vrai salopard toi ! Mais allez jusqu’à cet extrême je ne m’attendais pas à ça venant de toi…
- Je ne vois pas de quoi…
- Oh si tu vois très bien vieux ! Tout ça c’est pour que le Vieux te passe le flambeau ! Quand Papa en parlait je me suis dit mais c’est n’importe quoi puisque  mon frère sait très bien que le vieux le porte à cœur il est un Peniel donc quoiqu’on dise il sera dans le testament, mais si tu te maries tu as un plus… tu es bon pour le siège…
Ferdinand ne voulait pas écouter d’autres reproches sur cette question.
- Quand est-ce que tu viendras donc présenter ta femme au Vieux pour qu’il te donne les clés du château en main propre ?
- Hugues tu ne sais pas de quoi tu parles !
- Moi qui pensais qu’après toutes ces années tu aurais compris que tu fais parti de la famille…
- Ah oui ? Quand t’es venu ici tu as au moins pris la peine de discuter deux minutes avec moi ? Je ne suis pas un Peniel, Hugues, je suis un Zoa chez les Peniel rien ne me garanti quoique ce soit…
- Sauf que tu as oublié que nous sommes deux ! Nous sommes les deux qui vont rester ! Quoi ? On va se battre jusqu’au sang pour savoir qui est le grand patron ?
Son frère marquait un point. Il avait toujours considéré Ferdinand comme son ainé, lui avait toujours rendu cet égard, même s’il avait fait en sorte que ni sa mère ni son père ne le sache, il avait toujours été proche.
- Malheureusement la vérité c’est que pour toi tout semble aussi facile parce que tout a toujours été très facile pour toi frangin, dit calmement Ferdinand.
Hugues sembla concéder cette vérité à son ainé.
- Donc tu as décidé d’embarquer dans la folie de nos vies une femme qui n’a surement rien demandé ?
- Je la protègerais de ça…
La ferveur dans la voix de Ferdinand l’étonna lui-même.
- Tu sais que tu dois la présenter au vieux !, fit son frère.
- Oui !
- Et tu dois lui remettre son cadeau de mariage… Papa va surement t’envoyer tout ça dans la journée ! Je serais terriblement déçu si tu faisais un mariage sans amour juste pour… Le saint Graal des Peniel !
- Donc tu penses que je ne pourrais pas aimer…
- Ferdinand, je suis ton frère ! Je te connais mieux que personne ! J’espère juste que cette fille sait dans quoi elle s’engage !
Il eut un mouvement dans le dos de Ferdinand qui se tourna pour voir Mélanie qui se levait pour aller dans la salle d’eau.
- Il faut que je te laisse, dit-il à son frère.
- D’accord ! On se reparle un autre jour, lui répondit son petit frère.
Ferdinand coupa l’appel avec un goût d’amertume dans la bouche, il ne pouvait pas en vouloir à son frère, il était sous l’emprise de sa mère et de son père qui depuis l’enfance avait toujours mis les deux gamins en compétition. Ferdinand battait le fils prodige de son père sur tous les points, mais cela ne servait à rien puisque le point le plus important de la couleur de la peau faisait d’Hugues le privilégié.
Même le vieux Peniel avait concédé une place à Ferdinand seulement parce qu’il avait compris que c’était un atout majeur pour les entreprises familiales. Le fait qu’ils viennent se terrer en Afrique l’avait à la fois propulsé et desservie.
Desservi parce qu’il n’était plus assez proche de son grand-père et des gros dossiers que s’était accaparé son père et qu’il traitait avec son fils préféré. Mais avec la chaine hôtelière il avait à lui tout seul, une branche entière de l’empire, qu’il contrôlait sans avoir à rendre des comptes.
Mélanie revint se coucher dans le lit et il détourna une minute son attention de son ordinateur.
Tout le monde lui disait qu’il n’aurait pas dû embarquer cette femme dans une aventure comme celle-ci connaissant sa famille mais en même temps il se disait surtout avec la façon froide et détachée avec laquelle elle avait pris son mensonge, elle serait tout à fait capable de se faire une place dans cette famille.
Le petit matin ne se fit prier pour arriver, il était 6heures qu’il était déjà douché, rasé de près et habillé.
Mélanie trainait encore dans le lit quand il appela la réception pour qu’on leur apporte le petit-déjeuner.
Il la regardait dormir, alors qu’il parlait dans le téléphone de la chambre debout  juste à quelque centimètre de ce corps tout en courbe que les draps ne dissimulaient pas.
- Mélanie… Mélanie…
Il se demandait comment elle a réussi à dormir toute cette nuit.
- Mélanie, j’ai besoin de savoir ce que tu veux pour ton petit déjeuner !, dit-il en posant la main sur son épaule pour la réveiller.
Elle eut un geste de recule vif. Finalement elle n’est pas endormie.
- Ne me touches pas !, souffla-t-elle en se redressant du lit.
- On doit partir dans une heure, tu ferais mieux de sortir de ton lit et de te préparer, avança  Ferdinand avant de raccrocher le téléphone. Et j’ai  commandé le petit-déjeuner donc si tu ne dépêches pas tu vas manger une omelette froide ce matin…
Il savait qu’elle détestait la nourriture froide, il se souvenait l’avoir vu faire des mines hier lors de la réception devant son assiette de poisson froid.
- Est-ce que je suis obligée de manger ?
- Tu es une femme libre de choisir ce que tu veux ou ne veux pas faire, je me souviens te l’avoir rappelé hier…
- Jusqu’où est-ce que je suis libre ?, demanda-t-elle les yeux plissés.
- Tant que ça ne vas pas déteindre sur mon nom tu fais ce que tu veux Mélanie ! tant que tu ne mets pas en danger mon patrimoine je n’ai rien à redire, tant que tu ne mets pas en péril notre accord tu es libre de faire ou pas ce que tu veux !
Il parlait mais il espérait qu’elle allait se lever et obtempérer au lieu de continuer à faire la tête. Cette froideur de Mélanie le déstabilisait, même s’il gardait son calme.
- Je suis sur la terrasse, on nous apporte le petit dej dans 20 min ! Libre à toi de manger où pas…
Il n’était pas fier de lui parler comme s’il s’adressait à un chien qu’il dresse, mais là il ne se sent pas l’envie de la brosser dans le sens du poil. Elle voulait jouer la carte de la rébellion il devait étouffer ça dans l’œuf et lui rappeler qu’il est le seul et unique capitaine à bord.
Il ne pouvait pas la forcer en ce qui concernait son corps mais il était hors de question qu’elle remette en question tout ce qui sortait de sa bouche et encore moins qu’elle s’imagine prendre le dessus sur lui.
On servit le déjeuner pendant qu’il lisait les journaux sur sa tablette, quelques minutes plus tard Mélanie fit surface, elle avait suivit les directives et s’était préparée pour le départ.
Elle portait un jeans, avec un tee-shirt blanc et des tennis. Ses cheveux avaient retrouvés leur chignon strict habituel, et elle portait une paire de lunette de soleil. Il ne comprenait pas pourquoi, puisqu’il n’y avait pas de soleil, il était non seulement trop tôt mais ce n’est pas la saison sèche pour le moment.
Elle prit place le plus loin possible de lui, de l’autre coté de la table, mais il arrivait tout de même à sentir le son parfum. Ça lui revint, cette odeur de rose qu’elle portait lui avait aussi inspiré ce surnom ridicule de « bouton de rose ».
Elle tendit la main pour se servir une des omelettes dans le plateau, puis attrapa un morceau de pain.
Ferdinand sourit !
- Qu’est-ce que tu ne comprends pas dans tu es libre de faire ce que tu veux tant que ça ne mets pas à mal notre accord, Mélanie !, fit-il avec le même ton hautain que celui avec lequel il l’avait réveillée.
- Pardon, murmura-t-elle en faisant une pause.
- Un couple à peine marié qui partage leur premier petit-déj et madame non seulement ne prend pas la peine de faire un bisou à son mari, ne s’assied pas à ses coté mais en plus ne lui sert pas à manger ? ça ne parait pas un peu bizarre pour toi ?
Il vit chaque fibre du corps de Mélanie se tendre en une seconde. Il lui fit un sourire taquin et posa sa tablette sur ses genoux, en attente.
- Ferdinand…
- Mel, tu sais exactement que ça fait parti de l’offre initiale, rien de bien difficile à faire !, la coupa-t-il.
- Okay !
Elle se leva et se dirigea vers lui, elle allait se baisser pour l’embrasser quand il détourna la tête :
- Quoique tu fasses, fais l’effort au moins d’y croire toi-même !
La tension qui se lisait sur son visage malgré les lunettes faillit faire rire Ferdinand qui se délecta de la voir s’installer sur la chaise près de lui, de la rapprocher de la sienne et se pencher vers lui pour lui faire un baisé sur la joue. Il eut juste le temps de la rattraper en tournant le visage dans sa direction.
Ils étaient nez à nez, le souffle court et leurs lèvres distantes d’un centimètre.
- Reste naturel, mon bouton de rose ! Plus c’est naturel et plus c’est crédible…
Il ne finit pas sa phrase l’envie de posséder cette bouche pulpeuse était plus forte que le fait de remettre Mélanie à sa place.
Il la prit avec férocité, une brusquerie qui fit naitre un nœud dans son estomac. Il avait besoin de la sentir, bien plus que ce qu’il pouvait admettre.
Mais elle avait les lèvres les plus douces et les plus voluptueuses qu’il ait jamais embrassé, c’était fou comme il aimait leur goût et leur texture…
Il la repoussa brutalement !
- Bonjour à toi aussi ma belle, dit-il en reprenant sa tablette. Tu peux me servir du café ? Merci !
Il ne devait en aucun cas laisser cette femme rentrer dans son système, elle est bien foutue ça il le sait, elle est sexy, il est attiré physiquement par elle, mais elle n’est pas le centre de son monde alors pas besoin de commencer à apprécier comme si une autre femme à la place ne ferait exactement l’affaire.
Mélanie lui tendit une tasse de café, qu’il prit en lui faisant un signe de la tête.
- Omelette ou salade de fruit ?, demanda-t-elle avec une voix bizarre.
Elle se racla la gorge, elle a pleuré ? C’est une blague ?
Bravo Ferdinand tu en es arrivé au point de faire pleurer une pauvre fille !, lui cria la voix dans sa tête.
Il comprenait maintenant pour les lunettes elle devrait avoir les yeux rouges. Mais il n’allait pas se laisser amadouer avec quelque larmes, elle savait très bien à quoi s’en tenir dès le départ. Okay ! Il avait exagéré avec son air gentil et son attention et la complicité qu’il avait laissé s’installer entre eux, mais c’est elle qui une fois de plus avait modifié les règles entre eux.
Il ne comprend pas pourquoi aujourd’hui elle est triste.
- Enlève tes lunettes !, fit-il en se tournant vers elle. Mélanie ne me pousse pas à te les enlever !
Elle obéit.
Le cœur de Ferdinand fit un bond. Elle avait effectivement les yeux rouges, il n’aimait pas ça, ça touchait une partie de lui et il n’aimait pas cette sensation.
- Qu’est-ce qui t’arrive ?, demanda-t-il en se tournant définitivement vers elle.
- Rien de grave !
- Alors pourquoi tu as cette tête ? Si c’est rien de grave pourquoi tu te mets dans cet état ?
Il ne voulait pas poser la question qui allait le pousser à se sentir coupable même s’il sentait qu’il était en un sens responsable, il ne voulait pas l’entendre.
- J’ai juste pensé à mon père…, fit-elle en levant les yeux vers lui. Il n’a pas assisté à mon mariage ! J’aurais aimé qu’il m’accompagne hier, mais il ne pouvait pas voir sa fille se marier…
Le soulagement envahit le corps de Ferdinand qui respirait mieux tout à coup.
- Du moins pour ce premier mariage, continua-t-elle en le défiant du regard.
Cette femme est un cas, jamais avouée vaincue.
- Alors ? Omelette ou salade ?, insista-t-elle avant de remettre ses lunettes.
- Omelette d’abord, ensuite salade, répondit-il tandis qu’elle servait son plat et le lui tendait
Un message apparut alors sur l’écran de sa tablette. Un e-mail d’un destinataire qu’il reconnut de suite.
- Merde !
- Qu’est-ce qu’il y a ?, demanda Mélanie en rapprochant son plat d’elle.
- Un rendez-vous que j’avais oublié avec une journaliste qui doit couvrir l’ouverture de l’hôtel à Yaoundé… C’est la représentante Afrique centrale du journal Le Monde !
Il ouvrit le mail et le lut rapidement avant de répondre à son tour pendant que Mélanie elle mangeait en silence à coté.
- Elle voudrait une rencontre avec toi aussi, pour son reportage…, annonça-t-il sans même daigner lever la tête vers elle. Je lui propose qu’elle nous retrouve demain au Penthouse pour faire son interview de nous deux et elle pourra couvrir l’évènement plus tard !
- Je suis obligée de participer à cela ?, demanda Mélanie visiblement surprise et avec une note d’inquiétude.
Ferdinand leva la tête et la regarda.
- Ça fait exactement parti des choses auxquelles tu dois participer Mélanie, on doit paraitre comme un véritable couple aux yeux du monde entier et cette femme si jamais elle a le moindre doute nous sommes cuits…
- D’accord !
- Alors demain tu devras t’arranger pour ne pas avoir ces yeux rouges, c’est ce genre de choses qui peuvent attirer son attention et la rendre suspicieuse…
- Le genre de chose comme mon mari qui lit ses mails à table alors que nous prenons le petit déjeuner ?
Ferdinand leva la tête et sourit, un sourire fripon. Elle est toujours là la Mélanie taquine et drôle, malgré qu’elle le déteste elle sait ce qu’elle a à faire et elle semble s’y tenir. Il déposa sa tablette sur une autre chaise et s’installa pour entamer ce premier repas en tant qu’homme marié.
- Bon appétit Bouton de rose…
- Bon appétit, mon cher mari, fit-elle pendant qu’il prenait sa première bouchée.



Sous-InfluenceOù les histoires vivent. Découvrez maintenant