Il fut mon histoire

38.

- Ouais je vais m'occuper d'elle. Merci encore mec. Je t'appelle la prochaine fois.
Hein ? Je m'étire et ouvre les yeux. La lumière du soleil a pris place dans le salon. Déjà ? Quelle heure peut-il être ?
Julien se penche au dessus de moi et me sourit. Il se frotte la nuque, gêné, et me salut.
- Hey, je dis.
Je me frotte les yeux et me redresse.
- Alors, bien dormi ?
Julien a le sourire en coin. Il a dû remarquer la bouteille d'alcool  à moitié vide.
- Oui, ça va.
J'ai eu l'impression de dormir avec Lucas. Je me suis endormie en pleine discussion, sans faire exprès. J'étais bercée par le son de sa voix.
- Je ne t'ai pas entendu hier, tu as su te faire discrète, il dit en riant.
Je ris nerveusement, honteuse. Je n'ai pas l'habitude de me laisser aller, mais situation compliquée.
- Il est quelle heure ?, je demande.
- Neuf heures.
- Ouch, je n'ai pas beaucoup dormi.
- Effectivement, il sourit. Lucas non plus.
Mes yeux font un bon. Je fixe Julien avec méfiance. Qu'est-ce qu'il souhaite me faire dire ?
- Pas de soucis, je dirai rien, il me rassure. Mais, je veux que tu me racontes.
Je rougis.
- Toi, raconte moi. De qui tu parles ?
Il rit franchement.
- Quand je me suis levé je suis venu vérifier comment tu allais. Puis j'ai vu ton téléphone en appel depuis cinq heures, alors j'ai voulu raccrocher. Je me suis dis que tu avais fait une mauvaise manip, mais j'ai entendu quelqu'un parler.
Julien est tout sourire. Qu'est-ce qu'il trouve d'amusant ?
- C'est embarrassant..., je souffle.
- Ouais, je sais. Quand il a entendu ma voix il m'a remercié de prendre le relais. Puis, on a discuté. J'ai compris qui c'était, j'ai tout de suite fait le lien.
Je souffle.
- Je suis désolée de t'avoir mêlé à ça... je me sentais très mal et j'avais besoin de réconfort.
Il me sourit sincèrement.
- Il n'y a pas de problème, je t'assure. Tu l'aimes bien ce mec, alors ?
Je me mords les joues pour ne pas rougir.
- C'est mon ami, je dis en fronçant les sourcils.
Il insinue certaines choses et je n'aime pas ça. On a été très proche mais ça n'a rien à voir avec la réalité. Lucas et moi sommes différents, ça ne compte pas.
- Je vois. En tout cas il est bien gentil. Tu me le présenteras ?
Je hoche la tête timidement.
- Si tu veux. Au fait, je dis nerveusement, il a passé la nuit avec moi ?
J'essaie de prendre un air détaché mais en réalité je suis vraiment émue. Ça me touche, je l'admets.
Julien me sourit timidement.
- Il n'a pas raccroché, il préférait s'assurer que tu passes une bonne nuit de sommeil.
- Oh.
Je rougis immédiatement. C'est si gentil. Je veux dire, personne n'avait fait ça pour moi auparavant...
Alors comme ça il aurait voulu veiller sur moi ? Il se serait privé de sa nuit pour vérifier que j'aille bien ? Il faudra que je l'appelle dans la journée pour le remercier, mais je ne veux pas le déranger encore et abuser de lui.
Mon ami se racle la gorge, gêné.
- Tu vas mieux, alors ?
- Oui, je dis en souriant.
Il plonge ensuite son regard doux dans le mien et me prend par la main.
- Tu ne peux pas rester encore longtemps dans l'ignorance Ascane. Maintenant que tu as réfléchis il faut que vous ayez une discussion pour de vrai.
J'avale durement ma salive, il a raison. Mais je souhaite repousser ce moment le plus loin possible, je ne me sens pas prête à émettre un avis. J'essaie encore de comprendre et de faire la part des choses dans notre relation. Tout me semble si compliqué et pourtant je sais que Kilian m'est destiné. Il est là pour moi, même si je ne suis pas toujours facile.
- Je vais l'appeler bientôt. Laisse-moi le temps de me vider l'esprit. Être en couple ça demande beaucoup de force et j'ai besoin de souffler, voilà.
Son regard s'affaisse et il pousse un soupire.
- Tu ne devrais pas penser ça.
Je hausse les épaules.
- Je suis pas habituée à être en cage, c'est tout.
Il en fait tout une histoire alors que ce n'est pas si grave que ça. Pourquoi est-ce qu'il se mêle de ce qui ne le regarde pas, au fait ?
- Désolé, je m'inquiète juste pour toi. J'ai l'impression que dès que tu parles de Kilian, tu perds ton sourire.
Je lève les yeux au ciel, il ne sait rien.
- Tu m'observes mal, alors.
Il s'approche de moi pour me prendre dans les bras et j'ai un mouvement de recul. Je le fusille du regard.
- Je ne souhaite pas te causer du tord. Je veux juste te faire ouvrir les yeux.
- Occupe-toi d'abord de ta vie avant de vouloir arranger la mienne, je dis et je regrette l'instant d'après.
Je pousse un long soupire et des larmes commencent à tomber sur mes joues.
- Pardon, je le supplie, je ne voulais pas dire ça.
Il m'envoie un sourire de compassion et je me jette finalement dans ses bras.
- Pourquoi tu vas pas au bout de ton rêve ?
- Je fais de Mollie ma priorité. Si je devais me payer un stage de cuisine, elle ne pourrait plus s'acheter ce qui la rend heureuse.
- Il y a toujours des solutions, tu sais. Je peux vous aider et puis Mollie peut se passer de ses dépenses excessives pendant quelques temps.
- Non, non. Je suis heureux comme ça. Ne te préoccupe pas de moi, Ascane.
J'aime pas ça les histoires tristes. Julien est vraiment un héros.

01/06/2020