CHAPITRE 29 - EZECHIEL

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— Eh merde.

Il est dans son lit, placé contre le mur du fond de la chambre. Allongé sur le dos en t-shirt et jogging, un casque sur les oreilles. Il ne lui a fallu effectuer qu'un petit mouvement pour m'apercevoir ouvrir sa porte avant de se remettre dans sa position initiale.

Alec n'a pas prononcé ces mots très forts, mais ce n'était pas exactement un murmure qu'il aurait laissé échapper un peu trop haut à cause de sa musique. Il a voulu que je l'entende, mais pas trop non plus. Tout est dans la mesure. Juste assez pesé pour m'atteindre.

Tout cela n'arrange en rien mon état d'anxiété à l'idée de le revoir. Il ne me facilite pas la tâche mais peu importe, je dois passer outre mes incertitudes pour le moment.

Je ne vais pas faire mine de ne pas avoir bien compris, ses mots ont été perçus très distinctement. Je dois avouer que je suis dans l'incompréhension totale. Je ne sais même plus quoi faire, figé, la petite assiette qui lui est destinée dans une main et l'autre encore posée sur la poignée. J'hésite à ignorer sa remarque afin de ne pas risquer de créer de soucis, mais je chasse bien vite cette ridicule idée. Moi qui voulais lui parler, parlons.

— T'as dit quoi exactement ?

En fait si, je suis prévisible et banal, alors je feins une ouïe défectueuse. Les gens préfèrent toujours demander que l'on leur répète, le temps de pouvoir préparer leur défense. Non pas que j'aie besoin d'une réelle préparation pour répliquer. Disons que je lui laisse la possibilité de se rattraper.

— Rien, oublie. Pourquoi t'es là ?

Ce mec est si accueillant. Il a légèrement décalé son casque afin de découvrir une de ses oreilles. Quel honneur. Et n'étant pas tout à fait entré, il ne voit pas la raison pour laquelle je me tiens devant lui. De toute manière, ce n'est plus le plus important.

— Mhh... non, on n'oublie pas. C'est quoi le problème ? dis-je en ignorant volontairement la deuxième partie de sa réponse.

Ce qu'il a dit n'est pas ce qui m'importe vraiment, ce ne sont que deux pauvres mots. Cependant, l'intention derrière m'échappe clairement. Et il pense que balayer ma question d'une formule aussi banale que le « rien, oublie » est suffisant ?

— Je t'en prie Ezechiel. Je ne suis pas vraiment d'humeur.

Au-delà de ce qu'il me dit, tout dans son attitude non-verbale m'est hostile et m'intime clairement de me taire et de le laisser tranquille. Je m'en fiche. Est-ce mon ego blessé qui me rend aussi entêté ? Chacun a ses mauvais jours, c'est vrai. Par contre, faire pâtir les autres de sa mauvaise humeur est un comportement qui me dérange.

— Je l'avais remarqué, mais je n'ai rien à voir avec ce qui te préoccupe donc j'ai du mal à tout comprendre je t'avoue.

— Super, parce qu'il n'y a rien à comprendre, bonne soirée Ezechiel.

Il cite encore mon nom comme si cela donnait plus de poids à ce qu'il prononçait. En plus, c'est pour me mettre dehors. Il est malade.

Je vois qu'il s'est résolu à être impoli aujourd'hui. Personne ne me met dehors. Je décide donc de le prendre comme une invitation à entrer. J'avance pour m'introduire complètement dans son antre et referme la porte d'un mouvement.

— Je venais simplement et très gentiment t'apporter les cookies que tu réclamais tant.

Je me sens quand même un peu gêné de pénétrer comme ça dans son univers. Bien que ce ne soit qu'une chambre étudiante, il y passe désormais beaucoup de temps. Mais il n'y a pas lieu d'être embarrassé pour lui là tout de suite.

HumainOù les histoires vivent. Découvrez maintenant