Heureuses Circonstances

CHAPITRE 2

SEAN

La foule autour de moi a beau être bruyante, je n'entends rien. Les dernières paroles d'Hugo tournent inlassablement dans ma tête, me blessant un peu plus à chaque passage. J'avais bien conscience que les choses semblaient différentes depuis quelque temps mais je n'en avais pas compris le sens. J'aurais préféré qu'il me le fasse comprendre autrement. M'humilier au milieu de la ville n'était pas la chose la plus plaisante qu'il ait pu faire. Après tout, il aurait pu simplement me l'annoncer dans l'intimité de son appartement. Qui est cet homme qui l'accompagnait ? Est-il mon remplaçant ? Hugo a-t-il été honnête et rompu avec moi avant de le choisir ? Bizarrement, je suis plutôt convaincu qu'il me trompait depuis un moment déjà. Je n'avais rien vu.

Quelqu'un me percute sans s'excuser et j'échappe un soupir avant de quitter l'avenue principale pour une plus petite, bien moins remplie. Devant moi, une bande de jeunes semble occupé à jouer à Pokemon Go et je me faufile entre eux afin de les doubler, poursuivant mon chemin jusqu'à mon immeuble. Il va falloir que je passe rapidement chez Hugo pour récupérer mes affaires, avant qu'il ne décide de les balancer pour faire de la place à son nouveau mec.

Je monte les marches deux par deux, longe le couloir et pousse enfin la porte de mon appartement. De la musique s'échappe de la chambre d'Arthur et quelques cris de désespoir. Il doit encore être occupé sur l'un de ses jeux vidéos. Je rejoins la cuisine afin de me servir un grand verre d'eau que je bois d'une traite. J'ai été stupide de rester en plein soleil aussi longtemps et je peux être certain que mes bras doivent être recouvert de coup de soleil. Quand Hugo m'a envoyé ce message pour qu'on se retrouve, je n'ai pas pris le temps de me tartiner de crème solaire et je sais que je vais amèrement le regretter dès demain matin.

Après un saut dans la salle de bain pour m'étaler de la biafine sur les bras, je rejoins l'antre de mon colocataire. Comme à mon habitude, j'attrape le livre sur sa table de chevet et prends place sur son lit, commençant ma lecture. Lui ne lit pas, ce roman est toujours pour moi quand je le retrouve. Sans faire attention à ma présence, il continue de jouer et cela me convient très bien. Les questions viendront bien assez vite.

♦

Je suis plongé dans l'intrigue quand le lit s'affaisse à côté de moi. Arthur enfonce son doigt dans mes côtes et je sursaute, de retour sur Terre. Il fait un signe de tête pour me saluer et je repose le livre. Je n'avais même pas remarqué que la musique a cessé et que son ordinateur est éteint. Donnez-moi un livre et je ne fais plus attention à rien.

- Alors, qu'est-ce qu'il y avait de si urgent ?

Je me renfrogne, je ne veux pas parler de ce qu'il s'est passé. Mais je sais aussi que mon ami ne lâchera pas l'affaire tant qu'il ne m'aura pas tiré les vers du nez. Je soupire et me dandine sur place, mal à l'aise.

- Détends-toi, Sean. Tu sais très bien que tu peux tout me dire.

Je passe une main dans mes cheveux et je cherche mes mots. Je sais bien qu'il a raison mais ça ne rend pas la situation plus facile.

- Hugo m'a largué comme une merde. Et quand je dis comme une merde, je veux dire qu'il m'a humilié sur la place du Parlement devant tout le monde en disant qu'il en avait marre de me baiser et qu'il avait trouvé mieux ailleurs. Très classe, n'est-ce pas ?

- Je n'ai jamais aimé ce type mais là... C'est vraiment un sacré connard.

Mes épaules s'affaissent et la tension que je n'avais pas conscience d'avoir accumulé s'échappent.

- Je croyais vraiment qu'il y avait quelque chose de fort entre nous. J'avais remarqué qu'un truc clochait depuis un moment mais je ne pensais pas que c'était... Ça !