CHAPITRE 10

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CONRAD

Un regard me brûle la nuque alors que je discute avec Emma, une habituée du magasin qui ne jure que par les petits commerces. Je n'y prête guère attention et achève ma conversation avant de lui tendre la poche remplie des livres qu'elle avait commandés. Elle m'adresse un grand sourire avant de quitter le magasin en saluant tout le monde à la volée. Je ne peux empêcher le petit rire qui m'échappe. Cette fille est une boule d'énergie et de bonne humeur.

- Elle te draguait. Tu le sais, hein ?

Je tourne la tête en provenance de la voix qui s'adresse à moi, y trouve Arthur et hausse un sourcil. Sa main est toujours dans le bol de chips mais ça lui semble tout à faire normal puisqu'il reprend la parole.

- Cette nana était en train de te draguer ouvertement.

- Et ?

- Bah, tu n'es pas gay ?

Je me tourne vers lui, croise les bras sur mon torse et le fixe, un sourcil levé. Mais encore ? Il ne semble pas se rendre compte de mon irritation puisqu'il continue sur sa lancée.

- Si t'es gay, elle n'a pas ce qu'il faut où il faut. Alors, pourquoi tu la laisses se monter la tête ? Elle finira par tomber de trop haut et t'en voudra.

- De quoi tu te mêles ?

Il hausse les épaules avant d'enfourner une nouvelle poignée de nourriture dans sa bouche.

- Je disais juste ça comme ça.

- Écoute, Arthur, c'est une cliente. Elle vient ici depuis trois ans pour acheter ses livres parce qu'elle habite dans le quartier et préfère la proximité. Crois-moi, elle a été au courant que j'étais gay quand elle m'a vu avec la langue dans la bouche de mon mec.

- Vu comme ça. Ça aide.

- Donc même si elle me drague, comme tu le prétends, elle sait qu'elle n'a aucune chance avec moi. Et ça ne l'empêche pas de continuer à faire tourner la boutique.

- Certes. Mais tu pourrais être bi.

- Arthur ?

- Oui ?

- Ta gueule.

Il affiche un sourire goguenard, comme s'il était fier de m'avoir fait sortir de mes gonds. Il commence à se diriger vers son ami qui continue son shopping et je le retiens par l'épaule.

- Non. Hors de question que tu t'approches des bouquins vu l'état de tes mains.

Il grommelle mais abandonne l'idée et rejoins Noah, un peu plus loin. Comme si j'allais le laisser tripoter les livres avec ses mains grasses. Non mais il rêve.

Sean a profité que je sois occupé à débarrasser la table pour passer en caisse avec mon patron et s'enfuir du magasin, Arthur sur ses talons. J'ai bien saisi qu'il cherchait à m'éviter mais je n'en comprends pas la raison. Je ne vois pas ce que j'ai pu lui faire pour mériter une telle réaction.

Mon meilleur ami, lui, est déçu parce qu'il n'a pas pu discuter avec lui. Même s'il a passé un bon moment avec Arthur pour en savoir suffisamment sur eux deux, il aurait voulu découvrir l'homme qui me fait fondre. D'après ses dires, c'est évident. Sean ne me fait pas fondre, c'est n'importe quoi. Il va vraiment falloir qu'il se sorte cette idée de la tête.

- Je n'ai pas pu lui parler mais j'ai pu l'observer. Vraiment très mignon. C'est donc ça ton type ? Je n'aurais pas dit avec Thomas.

Je finis de passer un coup d'éponge sur la table avant de me tourner vers mon ami pour le dévisager. Nous ne sommes plus que tous les deux pour finir de ranger, l'inauguration s'étant achevée quelques minutes plus tôt.

Heureuses CirconstancesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant