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Je fis rapidement le tour de ma chambre en y entrant, rien n'avait changé ici, hormis les vêtements que Mathilde prenait un malin plaisir à laisser traîner un peu partout. Je les ramassais et les posais sur le bureau puis me saisit de mon portable.

« Je suis désolée chérie, écrivais-je. Tu as raison, si le prochain est à moins de vingt bornes du boulot, on le prend. Peu importe l'état. »

J'envoyais le message et le posais près du linge. Je sortis ma fidèle boite métallique de mon bureau et me posai sur mon lit pour rouler. Le vent faisait claquer la pluie contre ma fenêtre, hors de question que je l'ouvre pour fumer, j'allais donc au garage et après en avoir entrouvert la porte, j'allumais mon joint. Mon téléphone sonna dans la poche de mon jeans, je le sortis et lu la réponse de Mathilde. Elle aussi s'excusait de la façon dont elle m'avait parlé et me demandait ce qui m'avait fait changer d'avis.

« Mon père, lui dis-je franchement. Il m'a rappelé quelque chose d'essentiel.

- Quoi donc ?

- Peu importe où tant qu'on s'aime. Il a raison. »

Elle m'affirma que oui, puis me demanda pourquoi il m'avait dit cela et aussi ce que je faisais, là non plus, pas de mensonge, juste un minimum de discrétion en changeant le joint en cigarette mais elle savait très bien que cette dernière était parfumée. Elle s'occupait de sa petite sœur, sa mère dormait déjà, probablement ivre mais ça, elle n'avait pas besoin de me le dire. Il est rare que mes parents détestent quelqu'un mais au premier coup d'œil à Nicole, la mère de Mathilde, ils l'ont véritablement détestée. Il faut dire que la mère de ma copine était un cas. Se complaisant dans les aides sociale, elle passait la plupart de son temps un verre à la main et Karine, la demi sœur qui avait maintenant quatre ans, était souvent livrée à elle même quand ma chérie ne s'en occupait pas. Mes parents n'avaient même pas eu besoin de le savoir, ma mère disait qu'elle était vulgaire, elle n'avait pas tort, et mon père ne comprenait pas comment une femme pouvait boire autant, surtout avec un enfant. Ma petite amie fut gênée le jour de cette rencontre mais ma famille n'étant pas du genre à faire des histoires, cette dernière s'est à peu près bien passée. En repartant je savais que la prochaine entrevue entre nos parents respectifs ne serait pas à l'ordre du jour avant un moment. La petite voiture de ma mère fit son apparition dans l'allée goudronnée, elle descendit, ouvrit son parapluie et fit les quelques pas qui nous séparaient en courant.

« Alors ma chérie, me dit-elle une fois sa protection refermée, ça va ? »

Je secouais positivement la tête pour lui faire comprendre que tout allait bien, elle prit une mine réjouie et se dirigea vers la maison. Je jetais mon mégot dans le cendrier qui était à l'origine dehors puis la suivis. Elle embrassa mon père et lui demanda ce que nous allions manger puis se prit un grand verre d'eau. Elle me dit d'aller me laver les mains, habitude qui ne changeait pas chez elle et nous passions à table. J'étais morte de faim et tandis que je remplissais mon assiette, mon père repartit dans ses souvenirs d'appartement partagé avec ma mère.

« Oh, oui, je m'en souviens, dit-elle. La fenêtre bougeait à la moindre brise et parfois le plafond craquait si fort qu'il me faisait peur, mais c'était chez nous, on y était bien.

- Je me rappelle des jours où on ne travaillait pas.

- Ne donne pas de mauvaise idées à ta fille, répliqua-t-elle en riant.

- Je ne lui donne aucune idée... Je me dis que si elle venait à partir... On pourrait recommencer sans soucis.

- Si vous comptez faire de cette maison un camps de nudiste, mettez une pancarte à l'entrée, qu'on vous dérange pas. »

Nous rions tous ensemble et la conversation se poursuivit par le résumé de la soirée de ma mère. Je me demandais ce qu'il arrivait à mon père de parler si soudainement de son premier logement, aurait-il envie de me voir partir ou se doutait-il de quelque chose ? Nous étions pourtant très discrètes ma copine et moi. Je finis de manger, débarrassais la table puis regagnai ma chambre. Voir la pile de linge sur mon bureau me fit penser à Mathilde, elle était silencieuse depuis son dernier message, elle devait donner le bain à la petite, je déplaçais la pile et m'assis à mon bureau afin d'écrire, après avoir allumé une cigarette. 

Jour de PluieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant