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La bonne humeur de Mathilde ne l'avait pas quittée le lendemain matin, elle me réveilla de la plus horrible des façons, en me secouant, ce qui me mit moi en rogne pour la journée. Elle eut beau s'excuser une douzaine de fois entre son brusque réveil et le moment où j'arrivais au boulot, je la pardonnais pas vraiment, sachant qu'une longue journée m'attendait encore. Alexandra était de nouveau sur le parking et en passant près d'elle je pus voir de quoi ma chérie parlait quand elle m'avait mise au courant du regard que me jetait ma collègue. J'avais l'impression qu'elle pouvait voir jusqu'au fond de mon âme de ses grands yeux verts. L'ayant réalisé, je ne dis rien quand Mathilde m'embrassa de nouveau goulûment et ce geste qu'elle prenait pour une réconciliation fit qu'elle partit toute souriante. Au moins l'une de nous deux passera une bonne journée me dis-je en la regardant s'éloigner.

« Tu rêvasses ma belle ? »

Le son de la voix d'Alex me fis revenir sur terre. M'avait-elle appelée ''sa belle'' ? N'en étant pas sûre, je ne me permis pas de râler mais si elle recommence je n'hésiterai pas à la remettre en place, supérieure ou pas. En montant au bon étage, je repensais à la visite prévue ce soir, je me dis que je devais prendre exemple sur ma petite amie et laisser la joie m'emporter moi aussi, je fis donc mon entrée au cinquième toute souriante. Mon homosexualité n'était un secret pour personne au bureau et je me fichais bien du regard des autres, ce matin là, bizarrement, plus d'un me sourit en retour au mien. Cette journée me parut un peu moins longue et je me hâtais de rejoindre Mathilde pour aller enfin visiter notre futur appartement. Toujours aussi radieuse elle s'empressa de monter en voiture et me demanda de démarrer rapidement. Nous avions tout notre temps mais je comprenais son enthousiasme. Nous arrivâmes au rendez-vous avec une grosse demi-heure d'avance, pour ne pas jouer les impatientes je forçais ma copine à attendre un peu avant de descendre de la voiture. Un couple hétéro sortait de l'adresse que nous avait indiqué le loueur, nous le suivîmes du regard puis nous descendîmes à notre tour. Une petite femme rousse nous attendait devant, elle nous vit arriver et nous demanda si nous étions sa prochaine visite. Après lui avoir répondu positivement elle nous fit entrer dans un hall aux murs peints dans une nuance de bleu assez clair, traverser un assez long couloir et ouvrit une porte de la même nuance que les murs. À l'intérieur tout était blanc, comme sur les photos du site, elle nous montra la salle, la cuisine qui était meublée de placards suspendus en blanc, eux aussi, puis l'une des deux chambres. Elle nous parlait en nous baladant de pièce en pièce, nous énumérait les travaux effectués récemment, puis nous dit que ma colocataire et moi y serions bien, Mathilde se tordit de rire.

« Ce n'est pas ma colocataire, dit elle, c'est ma petite amie. »

Le visage de la femme prit un air pincé, elle nous montra rapidement la seconde chambre, les commodités et nous mis presque à la porte. À la seconde où je compris que la visite était fini, j'eus un mauvais pressentiment concernant cet appartement. Ma copine partageait mes doutes car elle ne dit rien en me voyant allumer mon ordinateur portable en arrivant chez mes parents et reprendre mes recherches. Avant le repas elle reçu un coup de téléphone puis se mit à pleurer.

« C'était le bailleur, me dit-elle entre deux larmes. Il a dit qu'il ne pouvait nous louer l'appart.

– Pourquoi ça ?

– Je ne sais pas, il a dit simplement qu'il ne pouvait pas louer à des filles comme nous. »

Elle se mit à pleurer de plus belle, je voyais ce que ce sale type voulait dire, qu'il ne voulait pas héberger des lesbiennes. Je pris ma copine dans mes bras et lui dis de ne pas se laisser aller, on finira bien par trouver un jour et qu'en attendant nous étions pas à la rue. Je savais qu'elle en était consciente mais elle se réjouissait tant de cet appartement qui était vraiment parfait pour nous. Je me remis en recherche dès que je fus de retour dans la chambre alors qu'épuisée par sa déception ma petite amie s'endormit quand sa tête toucha l'oreiller. Je finis par trouver deux offres intéressantes, je mis les pages en favoris, en profitai pour effacer la première puis me mis en quête de renseignement sur les agences immobilières, me disant qu'elles ne refuseraient pas un client, qu'il soit homo, hétéro, ou martiens, pour ces gens là, tant que ça paie c'est bon c'est du moins ce que mon père m'avait dit. J'en trouvais une non loin de mon bureau et décidais d'aller y faire un tour demain en secret, pour en faire la surprise à ma chérie. 

Jour de PluieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant