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La vibration de mon portable me fit sortir de mes personnages, je regardais qui venait de m'écrire, sans surprise il s'agissait de ma petite amie. Elle me dit qu'elle allait manger un morceau et se mettre au lit tôt, la journée avait été longue pour elle et notre petite embrouille lui avait donné mal à la tête. Pour finir, devoir s'occuper de la petite n'avait rien arrangé. Je m'excusai encore une fois d'avoir fait ma difficile puis lui souhaitai bon appétit. J'essayais ensuite de me remettre à écrire mais mes pensées ne se dirigèrent pas vers mes héros mais plutôt vers ma propre vie. Je revivais en vitesse les trois dernières années passées. Au lycée, tout le monde finit par savoir que Mathilde et moi étions ensemble, la dernière année, on ne cherchait même plus à se cacher. Cette dernière année nous fîmes aussi la connaissance de Sandra et Océane, deux filles de seconde qui nous trouvaient ''vachement cool'' pour se tenir la main jusque dans les couloirs du bahut. Leur façon de rougir quand Mathilde leur demanda si elles étaient ensemble me faisait encore rire aujourd'hui, elles nous assurèrent que non mais nous n'étions pas aveugles. Avant la fin de l'année scolaire, nous traînions toutes les quatre assez souvent et les deux filles se donnaient la main ouvertement. Nous avions gardé le contact avec elles, elles étaient en faculté maintenant et toujours ensemble, nous aimions, de temps en temps passer une soirée avec elles, entre filles, à boire un verre ou faire une partie de billard dans le café du centre-ville. Avant qu'elle ne s'endorme, je proposais à ma petite amie de se faire une sortie samedi, ''avec les filles'', elle comprendrait le message. Elle ne tarda pas à me répondre que c'était une bonne idée. Il ne restait plus qu'à les prévenir mais ça, nous aurions le temps d'en parler demain. Penser aux filles me fit aussi penser à mon ex petit ami, Logan. Il avait connu, après cette peste de Yaëlle, pas mal de relation à court, voir très court terme. Ce fut célibataire qu'il quitta le lycée et je n'eus plus de nouvelles depuis. Parfois, comme ce soir, en repensant au lycée, je me demandais ce qu'il pouvait bien devenir. Nos années de fac furent plus calme, nous étions sur le même campus, je passais mon permis, offert par mes parents et dès que j'eus une voiture, nous la prenions pour aller en cours, facilitant nos déplacements. Mathilde aimait toujours rester chez moi, elle attendait chaque week-end avec impatience pour venir du vendredi soir au lundi matin, sans même se soucier de sa famille. Elle avait son linge, le tas sur mon lit l'attestait, que ma mère lavait sans distinction, il lui était donc inutile de rentrer. Je lui avait proposé plus d'une fois de rester aussi les jours de semaine mais elle avait toujours refusé, prétextant ne pas vouloir envahir mes parents. Je savais qu'ils ne nous auraient rien dit mais la politesse dont faisait preuve Mathilde était l'un de ses aspects qui leur plaisait le plus. Nous partons ensemble au travail, dans la grande ville la plus proche, nos bureaux sont à quelques mètres de distance, je suis journaliste à la gazette locale et elle illustratrice dans une petite revue qui gagne à se faire connaître. Nos salaires ne sont pas mirobolants mais dès qu'elle eut signé son contrat, Mathilde se mit à la recherche d'un lieu où vivre sans sa mère. On en avait longuement discuté, le soir même, fumant une cigarette après un long et doux câlin. Elle me demanda si cela me tenterait de vivre avec elle, évidemment que j'étais partante, mais pas n'importe où, je ne voulais pas faire des heures de route pour aller au travail, et surtout, je ne voulais pas trop m'éloigner de mes parents, contrairement à elle qui cherchait à mettre une bonne distance avec sa mère. Je pensais à tout ça alors que sur mon PC portable, le tiret restait désespérément à la même place. Je me décidais alors à couper le traitement de texte, après avoir enregistré mon maigre travail de la soirée puis me dirigea vers le garage pour fumer ma dernière clope avant d'aller dormir. En entrant dans la pièce ou dormait la voiture de mon père, le même bon vieux tacot qu'à l'époque, il le chérissait tant, je glissais le long des portières et en ouvrit la porte qui donnait sur la cour. Mon téléphone vibra une fois de plus Mathilde me dit bonne nuit, j'en fis autant, lui disant que je l'aimais, puis rangeais l'appareil pour allumer ma cigarette en souriant. Les années passent mais la force de l'amour que je ressens pour cette fille ne faiblit pas d'un iota, bien au contraire. 

Jour de PluieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant