5

587 32 8
                                    

À peine montée, ma collègue me fit redescendre jusqu'au parking où elle monta dans une voiture à l'effigie du journal. Je pris la place passager sans rien dire et elle démarra. Elle m'explique en route que nous allons couvrir un événement qui se déroule sur toute la journée. Pas de repas avec ma chérie donc, je préviens cette dernière par message alors que la conductrice me demande si j'avais des projets.

« Oui, répondis-je franchement, je devais déjeuner avec ma femme. »

Elle me regarde furtivement, voir si je déconne ou pas, je suis on ne peut plus sérieuse, elle reporte son attention sur la route en me disant qu'elle voit et me précise qu'à cet étage je pouvais oublier ce genre de projets. Comme de celui du reste de mes collègues, je me fiche de son avis sur mon homosexualité mais fus un peu triste de devoir quitter ma chérie pour toute une journée. Nous arrivons à l'endroit du reportage, elle gare sa voiture puis descend en vitesse.

« T'es timide ?

- Non pas spécialement.

- Bien. Pose des questions au gens. »

Je me dirige vers la fête et commence mon travail calmement. Je croise plusieurs fois ma partenaire collègue durant la matinée et alors que midi approche, elle me fait signe de la suivre. Nous mangeons ensemble à la buvette de la fête populaire que nous sommes venues couvrir. L'après-midi se passe comme la matinée et vers seize heures elle me dit qu'il faut rentrer au bureau, nous reprenons la route.

« C'est comme ça quasiment tous les jours, me dit-elle au bout d'un moment. Tu poses des questions, à l'organisateur, aux gens présents, tu rentres tôt au bureau, tu écris ton papier, journée finie. Compris ?

- Oui. »

Ce seront ses seules paroles de tout le chemin. De retour sur le parking du journal, je vis Mathilde qui m'attendait. Qu'il y ait des témoins ou pas, c'était toujours une joie de voir ma petite amie, à peine sortie de la voiture je lui saute dans les bras et nous nous embrassons. Je lui présente ma collègue, qu'elle salut à la hâte, puis je lui dis que je vais chercher mes affaires rapidement. Seulement, il y a deux étages de plus à monter, je suis à bout de souffle quand j'arrive. En redescendant, je vais doucement et reçois un message de Mathilde me demandant ce que je fais, d'une désagréable façon, je me presse un peu, plus par colère que par envie. Près de ma voiture, je la vois faire les cents pas, elle s'énerve pour rien, râle seule puis finit par me voir.

« C'est pas trop tôt, me dit-elle.

- Le temps de monter, je suis au cinquième maintenant.

- T'as pas oublié de faire la bise à Alex ?

- Ah merde ! Attends, j'y retourne. »

Je fais mine de faire demi tour.

« Non mais sérieux là Émilie !  Je casse une vitre pour m'asseoir ! »

Je me retourne et me dirige vers elle.

« Qui casse paie ! »

Je déverrouille la voiture, elle monte et ne dis rien. C'est encore pire que de l'entendre crier, elle ne fait que regarder la route et son comportement m'énerve. Je roule rapidement, elle m'en fait la remarque mais c'est à mon tour de l'ignorer. Nous revenons dans notre petite ville, je m'arrête mettre de l'essence, elle me propose de le faire pour moi, j'accepte. Tandis qu'elle branche la pompe et remplit le réservoir, je me demande d'où venait sa crise de jalousie. C'était bien la première fois qu'elle me faisait ce genre de reproche, voyait-elle ma collègue comme une menace ? Elle me fait sursauter en remontant dans la voiture, me rend ma carte bleue et me regarde fixement.

« Qu'est-ce qu'il y a ?

- Il faut qu'on parle, me dit-elle. Qu'on parle toutes les deux sérieusement. »

Il n'y avait qu'un endroit où l'on pouvait être assez tranquille pour se parler, chez moi. Je m'y dirige donc en me torturant l'esprit pour deviner de quoi voulait-elle me parler. Mille scénarios se sont déroulés dans ma tête alors que je me range près du muret. 

Jour de PluieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant