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Mon père m'écouta religieusement, tout en buvant un verre de pastis. Il écouta aussi mes craintes pour le mobilier.

« Maintenant, la distance ne pose plus de problème, lui dis-je, mais si c'est pour aller là-bas et manger pizza tous les soir, on va vite devenir des baleines.

– Vous serez prioritaires aux caisses pour femmes enceintes, rit-il.

– Non mais sérieusement papa.

– Franchement je me dis qu'avec ta mère nous avons eut la chance d'avoir un meublé.

– Oui c'est vrai que ça nous aiderait mais là c'est pas le cas et Mathilde en veux vraiment.

– Et toi ? »

Il posait là une bonne question alors que ma mère rentrait à son tour. Elle fut étonnée de nous voir attablés dans la cuisine et encore plus quand elle vit mon verre de Pineau en pleine semaine. Je lui fis un rapide rapport de la visite, j'en avais un peu marre de me répéter.

« Les petites ont peur car elles n'ont pas de meubles, dit mon père une fois que j'arrivais à la fin de mon récit. On cherchais donc une solution.

– Je vois, dit ma mère en se servant un verre à son tour et s'asseyant avec nous. C'est vrai que c'est compliqué, la caution, les meubles, le linge de maison, la vaisselle...

– Merci d'enfoncer le clou maman. »

Je me sentais soudainement déprimée, je n'avais pas pensé aux deux derniers, ce qui rajoutait des frais sur la liste mentale que je m'étais faite en conduisant.

« Bon, reprit-elle, la vaisselle, on en a une tonne ici, on peut bien vous donner de quoi mettre la table pour deux.

– Trois les week-ends maman.

– Oui, trois bon c'est pareil. On aurait peut-être même quelques ustensiles si on cherche bien.

– Ça serait super, merci maman. Mais bon pourquoi avoir de la vaisselle si on a rien pour préparer de quoi manger.

– Et pourquoi tu n'irais pas faire un tour à Emmaüs ? »

Elle parlait de la boutique solidaire qui se trouvait pas très loin, si je calculais bien, elle était à équidistance de chez nous et de notre hypothétique futur appartement. Je trouvais l'idée excellente et me dis que j'en parlerai à Mathilde dès la fin du repas. D'ailleurs ce dernier s'annonçait immédiat, je le sus quand je vis mon père sortir les assiettes. Le sujet de conversation resta le même tandis que nous mangions, ma mère et moi faisions une liste des choses à acheter alors que mon père nous embêtait à nous dire des idioties du genre sextoys ou encore bain moussant érotique. Je fus surprise de savoir qu'il existait même des encens aphrodisiaque et cette nouvelle me fit bien rire, faisons l'amour zen me dis-je. Une fois le repas terminé je me roulais une cigarette parfumée mais non érotique, puis allais la fumer dans le garage. J'en profitais pour appeler ma copine, je lui parlais de la boutique solidaire, elle trouva que c'était une merveilleuse idée elle aussi.

« On irait quand ?

– Je sais pas. Que penses tu de samedi ? On bosse pas.

– Oui sans soucis. Bébé t'as une voix bizarre.

– Je fume. Si on trouve des trucs bien, on prendra l'appart qu'on a visité tout à l'heure.

– Sérieux ?

– Oui. Après tout je peux t'avouer qu'il me plaît bien aussi.

– Je peux dire à Legrand qu'on est OK alors ?

– Tu lui diras demain, il n'y a plus personne à cette heure-ci.

– Yes ! »

Elle venait de m'exploser l'oreille, mais je comprenais son enthousiasme.

« C'est un peu précipité mais bon, j'ai pas envie d'être encore déçue en apprenant qu'il est parti.

– Surtout qu'il est impeccable.

– Oui. On en reparle demain de toute façon.

– Ça marche ma chérie. Je t'aime !

– Moi aussi je t'aime Mathilde. »

On se salua rapidement puis je retournai dans ma chambre. Dans celle-ci, au lieu de me mettre au lit, je me mis au bureau et commençais à faire une liste écrite de tout ce que nous aurions besoin. Elle était malgré tout assez longue et les choses notées étaient soit imposantes soit lourdes, parfois même les deux. Tout en me mettant au lit je me dis que les amortisseurs de ma pauvre petite voiture allaient souffrir. 

Jour de PluieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant