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« T'es chiante à être difficile comme ça Émilie... C'est trop près, trop loin, mal orienté, mal isolé, trop moche... Il y a toujours un truc qui te va pas. Je te le dis franchement, le prochain appart que je vois, qui me paraît bien, je le prends. Et tant pis si tu suis pas. »

Mathilde descendit de ma voiture en claquant la portière. Je ne cache pas que cela me faisait tout drôle de l'entendre m'appeler par mon prénom tant c'était inhabituel. Je me souviens encore avec nostalgie de la première fois où elle m'avait appeler ''princesse'' ou de son premier ''chérie'' à la plage, devant mes parents souriants. Les choses avaient un peu évoluées depuis, nous travaillions toutes les deux, j'ai passé mon permis et depuis que Mathilde avait son emploi à mi temps comme illustratrice, elle cherchait désespérément un appartement, un studio, un endroit pour fuir sa mère et sa petite sœur. Perdue dans mes pensées, je regardais la pluie frapper le pare-brise de ma petite golf. J'enclenchais la première et fis rouler la petite voiture devant la maison de ma petite amie. Ça faisait trois jours que le ciel nous crachait des trombes d'eau, la région était en alerte inondation et dans ma ville, les points les plus bas étaient interdit d'accès en voiture, ce qui m'obligeait à faire le tour du quartier pour revenir sur mes pas. Je soupirais en me garant le long du muret qui bordait la maison où je vivais avec mes parents. Je pris une grande inspiration et courus jusqu'à la porte d'entrée, malgré la courte distance, ma veste était trempée lorsque je me glissais dans l'entrée de la maison. Je me hâtais de l'enlever quand mon père passa sa tête dans le couloir.

« Quel temps de merde, dis-je.

- Oh oui !  »

Je le suivis dans la cuisine après avoir bien accroché ma veste pour qu'elle sèche. Il se servit un verre de son apéritif préféré puis me demanda si je voulais boire quelque chose, un Coca fera l'affaire.

« Tu sais, me dit-il soudainement, en remplissant mon verre de soda, avec ta mère, notre tout premier logement n'était pas réjouissant.

- Hein ? Pourquoi tu me parles de ça ?

- Comme ça, me répondit-il en souriant, j'y pensais quand tu rentrais. C'était à la gendarmerie, étant le dernier arrivé j'eus la piaule la plus dégradée de la caserne, on avait peur que la fenêtre tombe au moindre coup de vent. »

Il souriait toujours mais pour ce souvenir tout en rangeant dans le réfrigérateur la bouteille de plastique.

« Ce qui ne nous a pas empêché d'y passer de bons moments... Je me souviens encore de ces week-ends où nous n'étions de garde ni ta mère, ni moi, et que nous passions sans porter le moindre vêtements.

- Heu...

- Tu verras que ça t'arrivera aussi quand tu t'installeras avec Mathilde un jour. »

Je le laissais à ses souvenirs dénudés tout en me disant qu'en effet, le bonheur ne réside pas dans les murs mais dans ceux qui les occupent, je devais des excuses à ma petite amie et surtout je me questionnais sur la bizarre coïncidence de cette discussion avec mon père. 

Jour de PluieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant