Bouleversé

Chapitre 19

Sur le terrain, Harry finissait de fêter sa victoire avec son équipe et ses amis. Quand les gens furent partis, il alla dans les vestiaires, pour se changer. Drago était là. Il déclara :

–Bravo ! Ta feinte était vraiment excellente !

Harry haussa les épaules et répondit d'un ton modeste, tout en enlevant son maillot vert :

-Bah, tu sais, ce n'est pas si dur. Il suffit de s'accrocher à son balai et de remonter à temps ! 

Drago hocha la tête tout en dévisageant le brun, torse nu.

Il devait bien avouer que son ancien ennemi n'était pas désagréable à regarder. Il était plutôt musclé et pas mal du tout. Celui-ci surpris son regard et s'empressa de remettre un T-shirt. Le blond avala sa salive et  un silence gênant flotta entre eux. 

-Ron et Hermione sont dans la salle sur demande, on y va ?

-Ils doivent être en train de se rouler des pelles, je suppose, grimaça Drago.

-Tu supposes bien ! Ça va, ils sont mignons, alors je tolère.

-Ça me dégoûte...

Harry sourit. Il demanda d'un ton taquin :

-Honnêtement, qu'est ce qui ne te dégoûte pas ?

Drago se prit au jeu et répliqua :

-Mmm... Les serpents. Ma mère. Les produits de beauté. Les vêtements, si il ne sont pas moldus. La musique. Et...

Il hésita avant de terminer sa pensée :

-Toi. Enfin, plus maintenant. Avant, oui.

Harry rougit violemment. Drago détourna le regard, fixa ses pieds. Qu'est ce qui lui avait pris de dire ça ? Les mots avaient franchi ses lèvres sans qu'il ne puisse les retenir. Sa peau pâle devenait de plus en plus rose. Il tenta de briser le nouveau silence inconfortable qui s'était installé entre eux, en relançant la conversation :

-Et toi, qu'est ce qui ne te dégoûte pas ?

Tout en enfilant sa robe de sorcier et en mettant ses affaires de Quidditch dans son sac, le brun esquivait habilement les coups d'œil que lui lançait l'autre garçon au yeux si fascinants. Il se racla la gorge et répondit d'une voix éraillée mais amusée :

-Je ne suis pas comme toi, j'aime plein de choses ! Par exemple, l'amour ne me dégoûte pas. Et je suppose que si je ne dis pas que tu ne me répugne pas, je vais passer pour un ingrat.

Le blond rit. Un rire étrange, un peu étouffé, mais toujours aussi agréable aux oreilles d'Harry.

-Bon, je suis prêt, on y va ?

Les deux garçons quittèrent les vestiaires pour se rendre dans la salle sur demande. Évidemment, Ron et Hermione y étaient déjà et s'embrassaient passionnément. Drago fit mine de vomir et Harry secoua la tête en riant et en levant les yeux au ciel. Puis il signala leur présence en se raclant la gorge. Décidément, il ne faisait que ça ces derniers temps. 

Ses deux amis s'écartèrent mais Ron laissa son bras autour des épaules de sa bien-aimée. Les deux nouveaux arrivants se laissèrent tomber sur des fauteuils qui venaient d'apparaître.

Ils discutèrent de tout et de rien pendant un long moment. C'était agréable d'enfin ne plus se prendre la tête sur des histoires à propos de Voldemort, et d'être juste amis. Les rivalités s'atténuaient entre le trio et Drago, même s'ils étaient souvent en désaccord.

-Ah non ! s'écriait Hermione. Moi, je fais comme toutes les personnes censées, je termine par les choses que j'aime.

-Je suis d'accord avec la demoiselle, moi, déclarait Drago en montrant clairement de quel côté il se rangeait.

De l'autre côté, Harry et Ron les regardaient avec consternation.

-Mais enfin ! tenta de justifier le brun. Imaginez, on mange des légumes et de la pizza. C'est logique de commencer par la pizza, pour être « en bon terme » avec le repas qui va suivre.

-Bien sur que non ! Il faut commencer par le mauvais, et finir avec un bon goût en bouche !

-Vous voulez pas prendre un autre exemple ? Moi, j'aime bien les deux ! 

Et les quatre amis débattirent de ce sujet tellement intéressant pendant une bonne partie de l'après-midi. 

-Bon, c'est très gentil tout ça, mais j'ai un essai à rédiger en botanique ! déclara finalement la seule fille du groupe. Et Ron, je sais que tu ne l'as pas fait non plus. Harry, en revanche, il était très bien, le tien.

-Mais, Hermione, on doit le rendre dans trois jours ! plaida le rouquin.

-Trois jour ! Ça nous laisse juste le temps de l'écrire et de le relire. Les garçons, on vous laisse, bonne soirée ! On se voit tout à l'heure au dîner.

Harry hocha la tête et le couple sortit de la salle. Ron adressait à son meilleur ami des regards suppliants, mais il les ignora. Il resta seul avec son ancien ennemi.

-Ça fait bizarre de rester avec vous, et qu'on puisse rire ensemble.

Harry haussa les épaules.

-Si tu avais été plus sympa, on aurait peut-être été comme ça depuis le premier jour.

-Non, parce que mon père aurait refusé que j'adresse la parole à un roux et à une née-moldue... 

-Mais il aurait été ravi que tu traîne avec ce bon vieux Harry Potter ! 

-Eh oui ! J'ai eu le malheur d'insulter gentiment ses amis au début de notre scolarité, et depuis on se hait.

-On se haïssait. Je trouve que ça va beaucoup mieux en ce moment, dit Harry.

-Ouais, c'est clair. Bon, va falloir y aller. Moi non plus je n'ai pas fait mon essai de botanique, et j'aimerais le finir à temps ! 

Les deux garçons se levèrent exactement en même temps, ce qui les rapprocha un peu trop. Aucun d'entre eux ne bougea, ils attendait que l'autre le fasse. Ils respiraient calmement, les yeux dans les yeux.

Harry sentait son cœur battre de toute ses forces, mais il faisait tout pour le contrôler. Sans qu'il puisse y réfléchir, sa main alla se poser délicatement sur la joue de Drago, qui frémit mais ne bougea pas. Sa peau était lisse, elle semblait pouvoir se briser sous ses doigts.

Leurs souffles se mélangeaient, et Harry sentait plus que jamais la bonne odeur de vanille de Drago. Il ferma les yeux et leurs lèvres se rapprochèrent de plus en plus. Drago grogna d'une voix rauque :

-Harry... 

Ils rouvrirent tout les deux les yeux. On lisait dans ceux du blond de l'étonnement et autre chose, que le brun n'aurait pas pu identifier.

-Harry ! Qu'est ce qu'on fait !

Drago s'écarta brusquement et quitta la salle sur demande en trombe.

Harry se laissa tomber dans un fauteuil, le souffle court. Si il ne les avait pas interrompu, ce seraient-ils embrassés ? Et pourquoi se sentait-il si bien en compagnie du garçon ?

Il ne voulait pas, vraiment pas. Mais il sentait au fond de lui que Drago remuait quelque chose, un sentiment qu'il aurait préféré enfouir. Il gémit longuement et une larme roula sur sa joue. Pourquoi le blond était-il si important a ses yeux ?

Et Harry réalisa soudain quelque chose qui le terrifia. 

Il était éperdument amoureux.

De Drago Malfoy.

Son ennemi de toujours, donc son amour impossible.