Où il est insolent ✓

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Rapidement, l'inspectrice enregistre le manque de réaction ahurissant des deux hommes après l'entrée fracassante de leur amie et reporte son attention sur la jeune femme.
— Miss Mac Duff ?
La batteuse lui jette un regard en biais puis pose les yeux sur le badge qu'elle lui présente.
— Je vais vous demander de vous éloigner du corps.

Shiloh surprend un regard de celle-ci en direction des garçons, mais ne voit pas Elijah incliner la tête comme pour lui confirmer que, oui, il s'agit bien d'un vrai badge. Nora hausse les épaules et recule de deux pas. Son air fier et désinvolte devrait agacer Shiloh, mais au contraire, il termine de charmer la policière. De toutes façons, ces trois-là n'ont rien à voir avec le meurtre, elle en mettrait sa main à couper, il est donc inutile qu'elle prenne ombrage de leurs petites manies dues à la célébrité.

Faisant désormais face aux trois artistes, elle leur désigne du menton la porte par laquelle ils sont entrés.
— La scène de crime a suffisamment été corrompue ainsi. Donc, si vous voulez bien vous donner la peine...
Tous trois obéissent étrangement docilement et Shiloh leur emboîte le pas en rangeant son insigne.

Voyant que Jared tend la main pour rouvrir la porte qui s'est presque refermée, elle crie :
— Ne touchez pas à la porte, s'il vous plaît.
Sortant un mouchoir propre d'une autre de ses poches, elle tire délicatement sur la poignée et fait sortir les musiciens avant de laisser la porte se refermer derrière elle. Elle doute qu'il y ait encore la moindre empreinte à y récupérer, mais sait-on jamais, il pourrait, contre toute attente, y rester quelque chose d'intéressant. Tendant le cou pour regarder du côté de la scène, à la recherche d'un roadie quelconque à réquisitionner, elle aperçoit Mrs Wilson revenir d'un pas énergique dans leur direction.

La petite femme semble énervée quand elle s'adresse à l'inspectrice.
— Mr Barlow va arriver et j'ai envoyé quelqu'un avec votre collègue pour ouvrir la grille.
Shiloh approuve du chef en glissant un œil derrière la patronne. Une quinzaine de personnes parmi les techniciens, amis et familles des membres du groupe, se sont rassemblées et s'approchent d'eux d'un pas plus ou moins hésitant. Autant de gens qu'il va falloir gérer. Elle reporte son attention sur la femme face à elle.

— Parfait. Est-ce le seul accès à cette pièce ?
— Non, il y a une seconde porte de l'autre côté, mais je l'ai fermée à clef après avoir découvert la... heu, enfin, le corps. Elle laisse passer quelques secondes avant d'ajouter, et on peut aussi y accéder depuis la scène, il suffit de se glisser derrière le rideau.

Shiloh retient une grimace de contrariété. Tellement d'ouvertures pour une si petite pièce, et si peu de chance d'en obtenir quoi que soit.

— Vous me remettez votre gorille en place ici même, demande-t-elle en indiquant l'endroit où elle se trouve, et vous m'en trouvez trois autres à poster devant la seconde entrée et de chaque côté de la scène, près du rideau. Je ne veux plus que l'on touche à ces portes avant l'arrivée de l'équipe scientifique.

Reportant son attention sur le troupeau au bout du couloir, elle interpelle une femme aux cheveux bleus coupés au carré qui porte un gros appareil photo en bandoulière.

— Vous ! Vous restez dans les environs, je vais avoir besoin de vous. Et surtout vous ne supprimez aucune photo ! Au contraire, continuez à en prendre autant que possible. Pour tous les autres, personne ne sort d'ici sans en avoir reçu l'autorisation, c'est bien compris ? Faites passer le mot.

Revenant aux trois musiciens, elle ajoute :
— Quant à vous, vous allez prendre la pause la plus courte de l'histoire de votre carrière, remonter sur scène et expédier le rappel aussi vite que possible. Baisser de rideau dans 20 minutes grand max. Et je vous veux dans mon bureau complet juste après votre prestation.
— Et il est où votre bureau ? lance Nora en glissant les mains dans les poches arrières de son short en jean blanc.

Bonne question, où va-t-elle installer son bureau ? Elle se tourne sur sa gauche, là où elle a vu Mrs Wilson pour la dernière foi, mais la petite femme est déjà repartie, probablement à la recherche des gardes que Shiloh vient de lui demander. Alors elle hausse les épaules en se retournant face à la batteuse.
— Je vous le ferais savoir quand je le saurais.

À cet instant, la voix d'un homme s'élève du groupe de curieux.
— Poussez-vous ! Mais laissez moi passer, enfin.

Bousculant un garçon portant un casque autour du cou et habillé d'un t-shirt des Ramones qui ne s'est pas écarté à temps, un homme dans la cinquantaine, grand, à la carrure large et aux cheveux si noirs qu'ils ne peuvent être que teints, s'avance d'une démarche arrogante et empressée en direction de Shiloh et des musiciens.

— Qu'est-ce qui se passe encore ? On m'a dit qu'il y avait eu un meurtre !? Qu'est-ce qui s'est passé ? Elijah ?

Si, pendant un bref instant, l'homme pose les yeux sur Shiloh, il reporte rapidement son attention sur le leader du groupe, attendant de lui qu'il lui explique l'inexplicable. Le chanteur esquisse une grimace que l'inspectrice a à peine le temps de repérer, mais c'est finalement Nora qui prend la parole d'un air parfaitement zen.

— Quelqu'un a fini par buter la salope.
L'homme tourne la tête vers elle et plisse ses petits yeux gris.
— De qui parles-tu, Nora ?

Stabilisant ses appuis comme avant de partir au combat, Nora soutient son regard de ses yeux noirs et prend un moment avant de répondre. Elle passe la langue entre ses dents et crache :
— Tu sais de qui je parle. La petite pute que tu refusais de virer alors que personne voulait bosser avec elle.
Le visage de l'homme perd subitement toutes ses couleurs et il accuse le coup en reculant de deux pas.
— V- Vic ? Victoria ?

Approbation de la batteuse qui semble toujours donner l'impression que cette disparition est en fait une bénédiction.

Shiloh n'a rien manqué de l'échange qui vient d'avoir lieu sous ses yeux, et comme plus personne ne dit rien depuis plusieurs secondes, elle décide de remettre tout ce petit monde en marche.

S'approchant de l'homme à l'air choqué, elle penche légèrement la tête sur le côté et prend sa voix la plus douce, comme elle a appris à le faire lors de ses années de formation.
— Mister ? Est-ce que ça va aller ? Quel était votre lien avec la victime ?

Comme si ces mots avaient suffi à le faire sortir de sa torpeur, l'homme se retourne vivement vers elle en reprenant constance. Alors qu'il la regarde avec un air de dédain manifeste, Shiloh sent très clairement son regard la déshabiller alors que ses yeux se promènent de haut en bas sur sa silhouette. Elle l'entend presque émettre des avis négatifs quant à son manque de formes et ses épaules trop larges. Détails de son physique qui furent allégrement critiqués par son ex avant qu'elle ne raie celui-ci de son existence plusieurs mois avant son déménagement.

Une moue de dégoût doit se peindre sur son visage sans qu'elle ne la contrôle, car elle surprend un léger mouvement de recul teinté d'amusement sur les traits de l'homme quand celui-ci la regarde enfin en face. Elle glisse la main dans la poche intérieure de sa veste pour en sortir son badge quand il la devance.
— Écoute, mon lapin, peu importe la relation que j'entretenais, ou pas, avec Victoria, ça ne te concerne pas. Et sans vouloir t'offenser, si l'envie me venait de me taper une petite cruche, j'ai suffisamment de canons à mon service pour ne pas avoir à racler les fonds de tiroir.

Degenerate Kings - Le vampire de TregartaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant