11. " It's the last chance to feel again."

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(Je précise que ce chapitre ne fait aucunement avancer l'histoire, mais il me tenait à coeur de l'écrire. Je peux comprendre que certaines personnes ne soient pas à l'aise avec l'évocation de la mort, et je tenais à les prévenir qu'elles peuvent simplement arrêter leur lecture et la reprendre au chapitre suivant sans ce que cela ne change quelque chose dans leur histoire. Merci de votre compréhension.)

 - Je me réveillai toujours la première, à la maison. Tu détestais mon humeur matinale. Je ne parlais pas, et toi tu parlais beaucoup trop. Tu venais déposer un chaste baiser sur ma joue, et tu me demandais toujours avec la même moue adorable si tu pouvais utiliser la salle de bain. J'hochais la tête, ne comprenant pas vraiment pourquoi tu posais cette question tout les matins. Je partais en te souhaitant une bonne journée, sans vraiment penser mes mots. Je racontais à toutes mes amies avec fierté que j'avais le meilleur frère de tout l'univers, et on m'écoutait sans vraiment se soucier de tout ce que je pouvais débiter. On me disait souvent que j'avais des étoiles dans les yeux quand je parlais de toi. On nous prenait pour un couple, on détestait ça. Il parait que c'est étrange qu'un frère et une soeur s'entendent aussi bien, mais on aimait être différent. Je rentrais avant toi et me jetais sur ton ordinateur, profitant de ton absence pour l'utiliser. Tu rentrais quelques heures plus tard, toujours épuisé, un casque couvrant ton cou qui jouait de la musique toujours trop fort. T'avais toujours un train de retard, d'ailleurs. Comme si travailler à l'hôpital t'empêchait d'être à la pointe de la nouveauté. Tu adorais tout ce que je te faisais écouter, et j'aimais me sentir fière de t'aider à découvrir de nouveaux artistes. On a toujours eu les mêmes goûts musicaux, et on chantait parfois ensemble, dans ta chambre. Tu chantais tellement mal... Mais on s'en fichait pas vrai ? Le but c'était d'être ensemble, le reste n'avait pas d'importance. Le plus souvent, tu partais aussi vite qu'arrivé, retrouver ta copine chez elle et je me retrouvais seule devant ton ordi, à attendre que le temps passe. Quand tu rentrais, j'étais déjà couchée depuis longtemps. On ne s'est pas beaucoup vu pendant tes dernières années.

        Je prend une taffe de ma cigarette, et une gorgée de rhum pour faire passer le goût amer de la nostalgie. J'avais cessé de penser aux torrent de larmes qui humidifiaient mon pauvre visage, martelé par le chagrin. J'étais bien trop ivre pour penser à mon état pitoyable.

- Quand j'ai déménagé pour la fac, tu as glissé une lettre dans un des cartons que je n'ai découvert que dans mon nouvel appartement. Je l'ai encore, tu sais. Elle est froissée maintenant, je l'ai peut-être lu trop de fois. Elle est déchirée en haut à droite, je n'ai jamais vraiment su pourquoi. Et malgré son aspect pitoyable, elle est pour moi la chose la plus belle que je n'ai jamais posséder. Tu évoquais à travers tes mots maladroit nos plus beaux souvenirs, pour finir par me rappeler ton amour inconditionnel. Je ne t'ai jamais répondu. Je crois que je n'aurais pas supporter de laisser mes sentiments reprendre le contrôle de mon maigre corps; même pour quelques heures. Si j'avais eu le courage de le faire, peut-être que tu aurais eu quelque part, toujours prêt de toi, une preuve de mon amour éternel. A la fin de ta lettre, il y avait quelques mots en italique qui je crois, seront à jamais graver dans ma mémoire. " Tu peux fuir où tu veux Romane, je serais toujours avec toi. Ne m'oublie pas." Comme si la possibilité de te chasser de mon esprit était envisageable...

        Je porte à nouveau le goulot de la bouteille trônant fièrement non loin de ma tête. Il fait froid ce soir là, mais l'alcool m'aide à oublier ce désagrément; Il aurait été plus facile que ce dernier meurt en été, ainsi, fêter l'anniversaire de sa mort aurait été sans doute plus doux.

        Tout les gens décrivent les cimetières effrayant quand ils sont plongés dans l'obscurité. Pourtant, allongée sur la tombe d'un inconnu, je ne trouve rien de plus beau que la vision du ciel étoilé qui s'offre à moi. Je ne me sens pas en danger, au contraire, avoir l'illusion d'être à nouveau avec mon frère me donne l'impression d'être plus forte que jamais.

Who you are. [5sos]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant