𝟷 | 𝚌𝚑𝚊𝚙𝚒𝚝𝚛𝚎 𝚜𝚎𝚙𝚝

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Bonne lecture !

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Oikawa marchait d'un pas tranquille, un léger sourire aux lèvres. Ses cheveux mouillés gouttaient dans son cou, humidifiant le col de son t-shirt de pyjama. Distraitement, il plaça la serviette qu'il tenait dans sa main droite autour de ses épaules, et réajusta ses affaires dans la gauche.

Chaque chambre du dortoir F possédait une douche individuelle ainsi qu'une petite salle d'eau attenante, mais le bâtiment était également pourvu d'une grande salle avec un bain commun qui se trouvait au rez-de-chaussée, à l'opposé des escaliers. N'importe quel élève pouvait s'y rendre comme il le souhaitait, et les heures d'ouverture étaient plutôt larges ; Oikawa adorait y passer du temps, des dizaines de minutes dans l'eau chaude, à nager d'un coté puis de l'autre – Iwaizumi avait cessé de l'accompagner depuis longtemps ; ses mouvements incessants l'énervaient plus qu'autre chose –.

En arrivant au premier étage, au départ du second escalier, alors que Tooru s'apprêtait à grimper plus vite pour aller retrouver ses amis, une voix l'arrêta brusquement.

Sans pouvoir s'en empêcher, il se figea.

– Oikawa.

Dans les faits, il n'eut même pas besoin de se retourner pour connaître l'identité du porteur de cette dernière. Pourtant, il le fit quand même ; avec son plus bel air dédaigneux, Oikawa posa les yeux sur celui qui décidément n'était pas prêt à lâcher l'affaire.

– Ushijima, articula-t-il en posant une main sur sa hanche. Qu'est-ce que tu veux ?

Il voulait retourner dans sa chambre, parler un peu avec Iwa-chan, et aller se blottir sous ses draps : il était exténué. Ses recherches lui prenaient toute son énergie, presque autant que les réprimandes de sa sœur.

– Tu reviens du bain ?

Sa carrure aurait pu lui paraître imposante, dangereuse, mais Tooru se trouvait sur la première marche et pouvait donc le regarder de haut.

Il haussa un sourcil.

– Ça te regarde ?

Un rictus se forma sur ses lèvres.

– Quoi ? Tu vas me suivre là bas maintenant ? T'étais en train de me suivre là ?

– Non.

Sa réponse avait été un peu trop brusque pour être parfaitement honnête.

– C'est ça.

– Je ne te suivais pas, affirma-t-il de nouveau. Je te cherchais.

– Depuis quand ?

– Depuis la rentrée.

Il leva les yeux au ciel.

Cela était déjà arrivé, avec un autre qu'Ushijima. En première année, les capacités de Tooru avait attiré bon nombre de petits riches venant de familles importantes ; la plupart du temps ils se croyaient tout permis et pensaient réellement qu'ils méritaient ce qu'il y avait de mieux. À chaque fois, ils abandonnaient rapidement ; Oikawa les mettait à terre, leur balançait une remarque bien sentie sur leurs capacités limités, et les Meisters s'enfuyaient, la queue entre les jambes et l'égo blessé.

Ushijima Wakatoshi était différent ; Tooru avait bien dû lui lui botter les fesses une dizaine de fois, il revenait toujours à la charge.

– Je veux que tu deviennes mon arme.

Il devrait au moins essayer des synonymes, histoire que ça soit moins lassant.

– Non. Question suivante ?

L'autre fronça les sourcils, comme à chaque fois

– Pourquoi ?

– Je ne vais pas encore te répéter la même chose, ça commence à me lasser. J'ai Hajime et ça me suffit.

– Mais pourquoi ? répéta t-il comme s'il ne comprenait vraiment pas. Ma famille est meilleur, j'ai de plus grandes capacités physiques ; je pourrais utiliser tout ton potentiel, bien plus que lui.

Toujours le même refrain. Et à chaque fois, entendre ce gars dénigrer ainsi son meilleur ami lui donnait envie de lui mettre son poing dans la figure. Sans même le remarquer, des petits cristaux de glace naquirent aux pieds d'Ushijima.

– Hajime, commença t-il en articulant davantage, est le seul Meister dont j'ai besoin. Au cas où tu ne le saurais pas, je ne viens pas d'une famille importante ; je suis comme lui. Il est gentil, fort, agile ; putain c'est le meilleur élément des deuxième année ! Et toi, à part être un con, tu sais faire quoi ? Parce que au cas où tu l'aurais oublié, tu ne peux pas me battre. Lui le peut.

Il soupira, lassé de cette conversation sans fin. À chaque fois c'était la même chose, et il n'en pouvait plus ; c'était comme discuter avec un sourd.

– Oh et puis tu sais quoi ? J'en ai assez, va te faire voir.

Oikawa tourna les talons et monta les marches quatre à quatre, irrité. Lorsqu'Ushijima tenta de le suivre, il remarqua enfin que ses pieds étaient gelés, attachés au sol.

Il jura. Et Tooru disparut.

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Allongé dans son lit, les bras croisés derrière sa tête, Kuroo regardait le plafond d'un œil fatigué. Avec les ronflements de Bokuto en fond sonore, le brun réfléchissait, à deux doigts de tomber dans le sommeil.

Sans pouvoir s'en empêcher, il repensa à Kenma et à son ami, Hinata Shoyo, qu'il avait rencontré la veille. Dynamique, souriant, et peut-être un peu trop sautillant ; Kuroo devait bien l'admettre, il aimait bien ce garçon. Il ne pouvait contredire le fait qu'il était parfait pour Kenma. Il aurait bien voulu les voir en action – son ami lui avait avoué qu'ils peinaient encore un peu à se contrôler mutuellement, et que le rouquin avait tendance à changer de forme au milieu d'un exercice –.

Kenma n'avait mis que quelques heures à trouver son arme, et il ne pouvait s'empêcher de s'en sentir jaloux, même en sachant parfaitement que cela n'était que du hasard.

Et si ce n'en était pas, justement ?

Il avait toujours évité d'y penser, mais et si toutes ces rencontres guidées par les tatouages imposés magiquement sur leurs corps étaient contrôlées par le karma ? Le destin ? Dans ce cas là, peut-être ne méritait-il tout simplement pas de rencontrer son âme partenaire. Il était fort, certes, et pas trop moche, soit, mais dans les faits, Kuroo avait beaucoup de défauts, et plus le temps passait, plus il s'en rendait compte.

Cette jalousie qui le dévorait en était la preuve ; comment pouvait-il se sentir envieux du bonheur de ses deux meilleurs amis, de son ami d'enfance, de tous ceux qui avaient réussi à trouver leur voie ?

Son comportement lui faisait honte, et l'espace d'un instant il se dit : je ne le mérite pas, de toute façon.

Lorsqu'il pensait à la relation d'Oikawa et Iwaizumi, à celle de ses parents, Meister et arme, ou encore celle de sa sœur et de son nouveau mari, il ne pouvait s'empêcher de se demander si un attachement romantique était obligatoire entre partenaire. Savoir placer leurs âmes sur la même longueur d'onde était très certainement la chose qui rapprochait le plus les humains, mais du coup, était-ce cela le problème ? Et si son arme l'avait repéré, mais qu'elle trouvait simplement que Kuroo était insupportable, qu'il ne la méritait pas, qu'il n'était pas digne d'elle ?

Un ronflement un peu plus fort le sortit de ses pensées, et il se réprimanda mentalement. Se dire tout cela ne servirait à rien ; il était lui.

Se tournant sur le coté, ses yeux tombèrent presque aussitôt sur l'intérieur de son poignet.

Une rose, enfermée dans un triangle noir.

Kuroo ferma les yeux.

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Fin de la partie une 🌹

Papermoon || KuroShouOù les histoires vivent. Découvrez maintenant