Malgré les scandales et les déclarations, la pratique du châtiment corporel n'a pas disparu. De nombreux sportifs de haut niveau japonais ont témoigné auprès de l'ONG.
Au Japon, des enfants athlètes subissent des violences physiques, sexuelles et verbales lors de leurs entraînements au nom des médailles à remporter lors des grands rendez-vous sportifs internationaux, ressort-il d'un rapport de Human Rights Watch publié lundi.
Alors que le Japon se prépare à accueillir les Jeux Olympiques de Tokyo, du 23 juillet au 8 août 2021, l'organisation de défense des droits humains constate dans un rapport de 67 pages des châtiments corporels pratiqués dans le cadre sportif au Japon (les "taibatsu", en japonais).
Maltraitances acceptées et banalisées
Frappés au visage, battus à l'aide de battes ou de bâtons de kendo, privés d'eau, étranglés, fouettés à l'aide de sifflets ou de raquettes, voire abusés et harcelés sexuellement, les enfants subissent des maltraitances acceptées et banalisées dans des écoles, fédérations et centres sportifs de haut niveau de tout le pays, ressort-il des récits de plus de 800 anciens athlètes mineurs, dont des sportifs olympiques et paralympiques, issus de 45 des 47 préfectures japonaises et de 50 disciplines sportives.
"Il est difficile pour les jeunes sportifs de déposer plainte contre un entraîneur ou un responsable puissant et il est rare que les établissements scolaires et les fédérations punissent les entraîneurs violents, leur permettant souvent de continuer à entraîner", souligne HRW.
800 sportifs interrogés
Cette nouvelle enquête démontre que les pratiques perdurent. Sur les quelque 800 sportifs interrogés, dont plusieurs ont participé à des Jeux olympiques ou paralympiques, 50 ont répondu à l'ONG lors d'entretiens et 757 dans un questionnaire en ligne.
Parmi ces volontaires, 381 avaient 24 ans ou moins, ce qui signifie qu'ils étaient des enfants athlètes au moment des scandales sur les « taibatsuen ». 19 % ont indiqué qu'ils avaient été giflés, frappés à coups de poing ou de pied, jetés au sol ou battus avec un objet, comme des bâtons de kendo en bambou, des sifflets ou des raquettes, ou privés d'eau, lors d'une activité sportive. Ces expériences se sont produites dans au moins 22 sports différents, selon le rapport. 18 % disent avoir subi des violences verbales. Et 5 % affirment avoir été agressés ou harcelés sexuellement.
Aujourd'hui professionnel, Daiki A. - un pseudonyme - jouait au baseball à un très haut niveau dans la région de Kyushu : « l'entraîneur m'a dit que je n'étais pas assez sérieux avec la course et j'ai été frappé au visage devant tout le monde. Je saignais, mais il n'a pas arrêté de me frapper », raconte-t-il dans le rapport. « Nous utilisons un bonnet pour le water-polo. Les athlètes étaient traînés hors de la piscine par la sangle de la casquette, nous étouffant. Une autre punition était de pousser les enfants sous l'eau pour que nous ne puissions plus respirer », a raconté Keisuke W., ancien joueur d'élite de water-polo aujourd'hui âgé de 20 ans. Chieko T., une athlète d'élite, a raconté à l'association comment son entraîneur l'agressait sexuellement tout en lui disant qu'il soignait l'épaule qu'elle s'était luxée, « presque tous les jours après l'entraînement. Chaque fois j'avais envie de vomir. Son odeur, ses mains, ses yeux, son visage, sa voix... Je détestais tout de lui ».
Des scandales ont bien éclaté, comme celui, en 2018, provoqué par la diffusion d'images montrant un entraîneur de baseball frapper cinq joueurs tellement fort que les adolescents en perdent l'équilibre, ou le suicide d'un jeune en 2012 après avoir été frappé 41 fois sur la même journée par son entraîneur de basket à l'école secondaire. Si certaines réformes ont été adoptées, elles restent toutefois des directives optionnelles et non des réglementations contraignantes.
Ce système "expose les enfants à des risques inacceptables et ne laisse aux sportifs et à leurs parents que peu d'options pour déposer plainte ou demander réparation aux personnes puissantes qui abusent d'eux", note la directrice du bureau japonais de HRW, Kanae Doi.
La nécessité de créer un organe indépendant
Pour l'organisation internationale, le Japon doit créer un organe indépendant chargé de traiter les affaires de sévices envers les enfants dans le sport. Avec le report des J.O. à 2021, le pays dispose d'un an pour "envoyer un message aux enfants, selon lequel leur santé et leur bien-être sont plus importants que les médailles, tout en avertissant les entraîneurs qui commettent des abus que leur comportement ne sera plus toléré", souligne HRW.
L'organisation espère donner un coup de projecteur à la problématique, alors que les abus dans le sport ne s'arrêtent pas aux frontières du Japon. Elle rappelle ainsi le cas du médecin sportif Larry Nassar condamné aux États-Unis pour abus sexuels, ou encore le suicide de la triathlète sud-coréenne Choi Suk-hyeon, 22 ans, après des années d'agressions physiques et verbales de ses entraîneurs et de plaintes officielles déboutées.
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CasualeL'actualité coréenne mais pas que, il y a également certains articles sur d'autres pays d'Asie