OH SHIT

2.7K 144 102
                                    

Le reste de la semaine se déroule de manière totalement prévisible : je passe mes après-midi à revoir les chorégraphies seule dans le studio loué, en repassant en boucle les musiques de la bande originale, ou avec Tom à répéter toutes les chorégraphies qu'il doit réaliser, que ce soit en solo, duo ou en groupe. Quelques danseurs de la production vivent aussi à Londres alors ils se joignent à nous dans le cadre des danses collectives, ce qui permet d'apaiser l'ambiance pesante prenant d'assaut la pièce quand mon ex et moi sommes réunis.

A vrai dire, bien que nous n'ayons manifestement plus rien à nous dire, nous avons réussi jusque là à garder la relation professionnelle et à ne pas faire parler de nous en tant que duo, couple ou peu importe ce que les tabloïds voudraient faire de nous. Le fait d'être pratiquement retombée dans l'anonymat me réconforte. Etre dans les coulisses me permet de travailler sur quelque chose d'important, de partager mon travail sans pour autant être sous le feu des projecteurs. Même si j'ai bien aimé danser toute une saison devant l'Angleterre entière, je ne pense pas que je réitérerai l'expérience à cause de la pression du direct, du public et des rumeurs qui sont générées pendant la saison. Tout le monde oublie après, mais pas moi. Cependant, le travail que ma thérapeute et moi avons fait les années précédant cette expérience m'a été incroyablement bénéfique, je ne pense pas que j'aurais pu ne serait-ce que me lancer dans cette aventure sans ça.

Assise au Starbucks, un milkshake au chocolat blanc dans la main, je repense à toutes ces fois où j'ai cru ne jamais sortir la tête de l'eau, où j'avais réellement l'impression de me noyer et que la seule issue semblait être le suicide. Je broyais du noir, plus rien ne me semblait intéressant, j'étais devenue susceptible et avide d'attention mais je repoussais en même temps mes proches, Tom tout particulièrement. Je me sentais nocive, toxique pour les gens et cette haine de moi même, du monde entier, je ne le supportais plus. Je me suis battue pour papa, pour les filles, parce que savoir qu'ils étaient rongés par l'inquiétude et la culpabilité de ne pas pouvoir m'aider me brisait littéralement le coeur. Ils m'ont sauvée, d'une certaine manière. Le temps passe et j'avance dans la vie pourtant je me retrouve souvent à me remémorer toutes ces petites parties de ma vie dont la dépression m'a privée, et des personnes que j'ai perdu au passage.


- Hey!, me lance joyeusement Tracy en prenant place face à moi


Tout en la regardant enlever son béret et son manteau en fausse fourrure, je lui demande :


- Tu vas bien? Je veux dire, après les évènements de l'autre fois...


La jeune femme me lance un regard interrogateur puis comprend.


- Ne t'inquiète pas pour moi. Avec le boulot j'ai même pas eu le temps d'y penser! Puis ca m'est arrivé plus d'une fois.


L'idée que Tracy aille risquer sa vie dans des manifestations me cloue le bec, à la fois d'inquiétude et d'admiration.

Pendant une bonne heure nous discutons de tout et de rien. Mon ancienne collègue me raconte les aventures qu'elle vit dans le service où nous avons été réunies à nouveau, avant que je ne parte à la télé, et moi je me contente de lui donner quelques anecdotes sur la préparation du film en prenant soin de ne pas divulguer trop d'informations, du moins le peu que j'ai.


-Dire que j'ai rencontré Tom Holland, que je suis montée dans sa voiture et qu'il m'a déposée devant chez moi...


Elle secoue la tête, les yeux écarquillés, comme si l'information venait seulement de débarquer dans son cerveau.


-T'imagines! Quand on s'est connues j'étais totalement fan de lui, et même aujourd'hui si je me suis calmée sur les fanfics Wattpad, je suis encore un peu son travail! C'est dingue!


The Unsaid Between UsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant