II. Combativités. (VI)

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Nous enchaînâmes avec le dernier test. Mon ventre gargouilla mais je n'y fis pas attention. Mon regard s'était porté avant tout sur le liquide transparent qu'était l'eau. Les individus qui nous encadraient nous donnèrent les consignes puis firent partir les hommes d'un côté, pour qu'ils aillent se changer.

Ils revinrent quelques minutes plus tard en maillot de bain moulant mauve (presque noir), arrivant jusqu'au milieu des cuisses. Lunettes à la main, certains s'approchèrent du bord de la piscine, tandis que d'autres, effrayés à l'idée de plonger dans ce bleu translucide, préféraient s'en éloigner quelque peu.

— Pour le dernier test de la série, nous vous demanderons de nager une distance de 100 mètres le plus rapidement possible. Nous ne vous imposons pas de nage. Que les premiers se mettent en place.

Ils furent dix à s'avancer, tâtant l'eau et se mouillant la nuque. Ils se mirent ensuite tous sur le plongeoir, prêts à s'élancer et finir au plus vite ce moment. Le temps était tout ce qui les importaient.

Le coup de sifflet retentit et dix mains vinrent à la rencontre de l'eau. La suite fut assez rapide et cela me faisait peur. Je n'arrivai pas à concevoir dans ma tête un échec. Je n'avais jamais mis un seul bout de mon corps dans une piscine. Je connaissais déjà la sensation de l'eau sur ma peau, mais j'appréhendais celle de la piscine.

Mon coeur se mit à s'accélérer lorsque je vis au bord du plongeoir Ayden. Lui était comme moi. Il tourna la tête vers sa gauche, je suivis le mouvement et vis une tierce personne l'observer en plaisantant. Il me chercha ensuite du regard parmi la foule, capta mon regard et finit par me sourire.

Je ne loupai pas une seconde de sa course. Si la première avait été très rapide, ici, des personnes n'ayant jamais nagé se faisaient face. Ayden ne fut pas si mauvais. J'aurais même pu dire qu'il avait su tiré son épingle du jeu. Il avait fait « la brasse » d'après ce que j'avais entendu, mais elle était bien réalisée et cela lui avait permis d'avancer avec une bonne allure. D'autres s'étaient quasiment laissés flotter et avaient parcouru seulement cinquante mètres, épuisés par la nage qu'ils avaient réalisés.

Le dernier groupe passé, les filles furent accompagnées jusqu'à une pièce, petite et sombre pour pouvoir se changer. Nous n'étions pas très nombreuses, cependant l'absence de luminosité m'oppressait. Un maillot mauve une pièce avait été suspendu aux patères de la salle. Chacune l'enfila et par un miracle du progrès scientifique, le tissus s'adapta à notre morphologie et s'arrêta juste en dessous de nos fesses.

Nous sortîmes tranquillement de la salle, faisant face au regard des garçons, emmitouflés dans leur serviette. D'un simple coup d'oeil, je m'étais sentie jugée de la tête au pied. Les Riches furent appelées à s'avancer en premier.

La majorité des filles de Riches étaient grandes, élancées, leurs cheveux d'un blond parfait, d'un brun profond ou d'un châtain éclatant avaient été nattés. Leurs visages étaient d'une douceur incontestable et leurs yeux d'une justesse sans pareille.

Les dix premières s'élancèrent et, tout comme les garçons, la longueur fut rapidement terminée. Les dix suivantes s'élancèrent et, dans la même lancée, finirent aussitôt de nager. Les groupes se succédèrent avec une rapidité fulgurante. Plus le temps passait, plus le stresse en moi grandissait. La première fille à ne pas savoir nager fut sortie sous mes yeux après avoir fait une petite crise de panique.

Ne pas paniquer... Surtout... Ne pas paniquer...

J'essayai d'ordonner à mon cerveau cette information. Je ne devais surtout pas céder à la peur. Je fus parmi les dernières à être appelée. Je suivis le mouvement et me plaçai devant le couloir de nage numéro deux. Je plongeai mes mains dans l'eau, me mouillai la nuque, et me préparai mentalement à sentir le contact du liquide contre ma peau.

Le départ fut lancé. Je ne me posai aucune question avant de disparaître dans la transparence bleutée. Douter de soi ne ferait qu'engendrer une peur bien plus grande que celle de plonger.

La sensation fut différente de celle que j'aurais pu imaginer. L'eau naviguait autour de mon corps tandis que je restai en suspension le temps d'un instant, mes cheveux flottant autour de moi. Je me mis en course dans la seconde qui suivit. Une simple nage qui avait attiré mon attention lors des premiers passages. Il suffisait de mettre en bras devant l'autre et de faire un mouvement circulaire d'avant en arrière. Au bout de trois mouvement, je commençai à manquer d'air.

J'hésitai à ressortir la tête de l'eau... Pourrais-je la rentrer juste après ? Le souffle devint de plus en plus irrégulier et instinctivement, je remontai la tête à la surface. Je pris une grande bouffée d'air, avant de replonger. Les mouvements s'enchainèrent avec plus ou moins de difficultés.

Je visualisai l'arrivée. Elle était à bout de bras, flottant tout comme moi. Mon souffle manquait mais je ne ralentissai pas le mouvement. Je préférai respirer à l'air libre. Plus que quelques mètres et je touchai la ligne.

Je remontai une dernière fois à la surface enfin contente que ce moment soit enfin terminé. Je croisai le regard de Treegof, surpris. Un sourire prit place sur mes lèvres. Je n'étais peut-être pas excellente dans la discipline mais pour le coup, j'étais fière de ce que j'avais réussi à faire. Deux filles étaient encore dans l'eau, quatre n'avait pas plongé et le reste était déjà arrivé. Notre temps était bien plus élevé que celui du premier groupe, mais nous avions toutes limitées la casse.

Nous fûmes tous amené vers une tierce salle, jogging enfilé et serviette autour des épaules. Les vingt derniers de la liste avaient été éliminés, s'étaient changés et étaient partis sans faire de bruit. Nous n'étions plus que cent cinquante à concourir.

— Félicitations à vous tous. Au terme de ce matin, vous avez su montrer au fond de vous-même que vous étiez aptes à rejoindre nos rangs. Vous avez aussi été capable de manifester votre bienveillance envers la société ainsi que votre motivations et votre détermination qui seront un point clé de votre réussite.

— En ce qui concerne la suite des événements.

Le vieux s'était avancé et souriant le plus fort possible, il fit une pause de plus de dix secondes dans son discours monotone et sans intérêt. Du coin de l'oeil, j'observai Ayden. Tout comme moi, il se retenait de rire. Non pas pour une question de respect envers le vieux mais car nos ventres sur pattes commençaient à faire des bruits de mon en moins glamours. Nous nous pincions les lèvres, conscient du gémissement monstrueux dont ils faisaient preuves, et essayions de nous concentrer sur deux choses à la fois.

— Le repas vous sera servi sans distinction en zone 5-C, puis nous reprendrons le test avec une épreuve d'aptitude physique. Je ne vous en dit pas plus.

Les pupilles de Ayden se dillatèrent à l'entente du mot 《repas》. Je n'en pouvais plus de cet homme. Un mot suffisait à égayer sa journée.

— Raaaaaaav'...

HumanOù les histoires vivent. Découvrez maintenant