Vendredi 6 octobre, 22h47, Clayton Treegof :
Les massives portes blanches du complexe me barraient la vue. Lourdes. Insupportables. Écrasantes. Je savais ce à quoi elles correspondaient. Je savais parfaitement ce qui allait advenir de moi. Je savais que je n'étais pas conscient mais revenir en ces lieux, c'était comme signer mon arrêt de mort. Je ne pouvais pas m'en échapper moi-même. Je devais subir pour survivre. Un paradis blanc pour mieux se ressourcer ils avaient dit. Un enfer plutôt. Combien de temps que j'errais en ces lieux ? Combien de temps qu'on ne m'avait pas torture par ici ?
Je restais figé, en proie à mon plus vif cauchemar. Je ne bougeais plus car je savais ce qui allait m'arriver si je me mettais à m'activer pour sortir. Je me retrouverai bien plus coincé, sans échappatoire possible. Je voulais simplement fuir ce passé mais plus j'essayais de m'en éloigner, plus il revenait à la charge avec une force encore plus vivante et affligeante.
Deux mains oppressantes vinrent m'encercler le tour de mes bras. Sans comprendre pourquoi, je me mis à hurler à m'en déchirer les poumons.
- Ma place n'est pas ici ! Lâchez-moi !
Aucun son ne me parvenait. J'étais seul, plongé dans mon cauchemar, avec la solitude comme seul ami contre la torture que m'infligeait ceux qui croyaient posséder les pouvoirs de Dieu.
Ma vision se mit à rétrécir, devenant sombre et floue. Le décor s'éloignait de moi et me perdait dans mes sens. Je savais où je me trouvais mais je ne pouvais rien faire pour m'en échapper.
- Lâchez-moi !
La force invisible qui me maintenait encore debout face à la scène renforça son emprise et m'écarta d'une manière fulgurante vers la droite, me plaquant contre un mur de métal. Je sentis un poids contre ma nuque puis mon bras remonta le long de mon dos, me figeant de nouveau dans une position insupportable. J'étais bloqué, incapable de bouger et de m'échapper.
Je me redressai, pantois et transpirant comme si je venais de courir un marathon. La discussion qui avait eu lieu face à mon père, l'énième que je ne comptais plus, m'avait une fois encore fait plus de mal que de bien, me faisant remémorer tout ces mauvais souvenirs.
Revivre les trois premiers mois de mes cinq ans d'enfer était atroce en rêve, enfin si on pouvait appeler ça un rêve... Ce n'était pas la fin du cycle le plus effrayant mais bien le début. Là où se rebeller était synonyme de torture, vivre était comme souffrir. Je ressentais encore les coups dans chacun des pores de ma peau, tout comme l'usage de la force pour nous contraindre à penser comme notre rang, pas de pitié seulement du mépris et de la condescendance pour faire de nous de bons petits soldats.
Ce n'était pas ma place. J'étais déjà un bon petit soldat, à l'affut de la fierté de mes parents. Je ne comprenais pas ce que je venais faire ici.
Je sentais mon corps se mettre à trembler sous leurs actions, et mon esprit se mettre en pause pour ne pas avoir à subir cet instant. Je savais une chose : je devais obéir pour survivre. Mes côtes me brulaient, le manque d'air et d'espace m'oppressait, mes membres ne réagissaient plus. Je devenais peu à peu spectateur de ma propre scène, me tenant debout face à mon propre corps jusqu'à disparaître totalement. Un flou s'empara de nouveau de mes yeux et, en moins de quelques secondes, je ne supportais déjà plus la vision qui s'offrait à moi.
Une salle vide, un écran, tout pour rendre fou. À moins que nous ne le soyons déjà ? Mon regard se plantait assassin sur les images qui apparaissaient devant moi. Ces images de familles dévastées par un monde de pauvreté. À quel moment était-ce notre rôle de rire de leur vie ? À dix ans, j'aurais du savoir que me plier aux règles de ma famille m'aurait permis d'éviter des nuits de cauchemars dans un futur encore lointain.
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Human
Fiksi IlmiahDu haut de ses dix-neuf ans, Raven Greydale a toujours grandi dans L'Abri, nom du bunker des anciens habitants de New-York. Cette société a dû s'enfouir dans le sol de la Terre pour survivre face à des Alfaeliens, des extraterrestres venus d'une con...