32 - Et c'est si beau

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VOYAGE.

Page était tranquillement assise au fond du bus et s'apprêtait à faire son plus beau voyage, le plus intense, celui qu'elle attendait depuis maintenant quelques temps. Elle avait hâte, c'était une excitation hors normes. Qu'allait-elle découvrir là-bas ?

Elle regarda par la fenêtre, histoire de voir autre chose que les crânes des gens positionnés devant elle sur les sièges bleus en plastique. Ces sièges étaient bien inconfortables pour un voyage de cette envergure, Page trouvait cela dommage, elle aurait bien aimé qu'ils soient doux et rembourrés, un peu comme les sièges que l'on trouve dans les bons trains. Mais elle allait faire avec, puis, elle était tellement impatiente qu'elle se sentait capable de supporter ces derniers. Alors, elle regardait juste par la fenêtre les arbres bouger au rythme de la vitesse du bus.

Elle regarda une dernière fois les maisons défiler, les papillons voler, et la route s'éloigner à travers le vol de ses cheveux blancs causé par la brise du vent.

Comment était-ce, là-bas ? Y avait-il d'autres personnes qui l'attendaient, d'autres arbres qui dansaient ? Et elle, pourrait-elle de nouveau chanter ?

Une petite douleur monta vers la poitrine de Page, qui pour seule réaction, posa sa tête contre la vitre du bus, les yeux souriants à travers les rides apparues à cause son vieil âge. La douleur s'amplifia, mais Page ne pouvait pas crier, de toute façon, elle n'en avait pas envie. Après tout, elle allait démarrer le plus beau voyage de sa vie.

Elle ferma les yeux, sa poitrine s'abaissa et ne se releva jamais. Le cœur qui, quelques secondes auparavant battait, cessa de fonctionner. Le corps entiers de la femme se relâcha, son bras cogna contre la vitre, alarmant les gens présents qui se retournèrent confus avant de découvrir Page.

Dans le bus, tout le monde s'affola et cria. Le chauffeur stoppa son bus, effrayé par ce corps qui venait de perdre sa lueur de vie. Mais Page, elle, de son corps froid et de ses lèvres engourdies, sourit. Elle avait, à son goût, déjà bien trop vécu pour découvrir de nouvelles destinés, bien trop vécu pour se lever heureuse un matin d'été. Puis, de toute façon, tout avait été si beau.

C'était pour ça que Page souriait, parce qu'elle venait de débuter le plus beau voyage de sa vie, et qu'elle allait, par conséquent, enfin savoir si le paradis existe, taisant ce secret à tout jamais qui fait se poser la question aux vivants :

L'ultime voyage est-il beau ?

Les plumes d'un soirOù les histoires vivent. Découvrez maintenant