38 - Créer soi-même

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ANGOISSE.

" Vite ! Retourne-toi ! Vérifies que personne ne te suis ! "

Je me retourne vivement. Tout ce que je vois est la faible lumière du réverbère sur la route et ce petit bloc de béton qu'elle illumine. C'est bon je suis seule, je peux de nouveau regarder devant moi.

" Attends, tu es sûre que personne n'est derrière toi ? "

Et si quelqu'un s'était vite caché la première fois que je m'étais retournée ? Ok restons naturelle, on va de nouveau regarder. Je vais compter jusqu'à trois.

Un.

Deux.

Trois.

Non il n'y a personne, je dois vraiment être seule. N'y pensons plus, continuons notre chemin.

" Tu penses que tu vas pouvoir t'assoir dans le bus ? "

Oui, bien sûr que je vais pouvoir m'assoir. Je suis dans les premiers arrêts, aucune raison que je passe quarante-cinq minutes debout.

" Mais imagine qu'il y ait vraiment du monde ? "

J'espère qu'il n'y aura personne. Ça y est j'ai peur, est-ce que je vais oser demander à quelqu'un de m'assoir à côté de lui ? Non bien sûr que non je n'oserai pas. Bon tant pis, je passerai tout ce temps debout, ça n'a jamais tué personne non, d'être debout ?

" Oui mais on ne sait jamais. "

Sors de ma tête, tu m'énerve, laisse-moi tranquille quelques minutes s'il te plait.

" Bon, d'accord. "

Enfin un peu de repos.

" Juste, avant, pourquoi personne n'est à ton arrêt ? Il y a du monde d'habitude. "

Ils sont sûrement en route, pas de quoi paniquer.

" Et si le bus était déjà passé ? "

Non, aucune chance qu'il soit déjà passé. Il est quarante-neuf, il doit passer à cinquante-cinq, je suis plus qu'à l'heure, donc pas de risque.

" D'accord, si tu le dis. "

Voilà, si je le dis c'est que j'ai raison donc laisse-moi seule un instant, j'aimerai pouvoir respirer librement. En plus, tu m'empêches d'écouter correctement ma musique. Puis, même toi tu dois être soulagée de parfois te taire alors fais-le plus souvent, ça ne tuera personne un peu de tranquillité.

"Alors c'est bon, tu ne m'aimes plus ?"

A-t-il seulement déjà été question de t'aimer, ou même de t'apprécier ?

"Tu sais, ça fait dix huit ans qu'on vit ensemble toi et moi, je pensais que tu éprouverais au moins un petit quelque chose à mon égard."

Tu m'oppresses tous les jours, toutes les minutes et toutes les secondes qui passent, et tout ça depuis dix huit années, et tu penses qu'avec ça je peux t'aimer ?

"N'empêche que lorsque tu es seule, je suis la seule personne avec qui tu peux parler."

Laisse-moi, je t'en pris, on en reparlera plus tard.

"Ne prends pas cette discussion pour acquis."

Oui, je sais bien, rien n'est jamais acquis avec toi de toute manière. Tiens, regarde le bus est là, il n'y a personne, je vais pouvoir m'assoir sans aucun soucis, tu m'as fait stresser pour rien, encore une fois.

"On ne stresse jamais pour rien."

Pour le coup si, le bus est complètement vide.

"Un peu comme toi, du coup."

Les plumes d'un soirOù les histoires vivent. Découvrez maintenant