¤ Chapitre 25 ¤

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Léa

Lorsque Matthieu et moi descendons rejoindre son père dans le salon, celui-ci sourit en nous voyant descendre les escaliers main dans la main. Il me fait un clin d'œil complice que je lui retourne bien volontiers. Il nous propose de prendre la voiture familiale tous ensemble. Le papa de Matthieu s'installe au volant, et nous partons en direction de l'hôpital pour aller chercher Sarah. Thiery profite du trajet pour me poser des questions sur ma vie, ma famille, tandis que Matthieu le supplie d'arrêter son interrogatoire. Je ris devant leurs douces chamailleries. Leur complicité est flagrante, c'est touchant. Après le drame qu'ils ont vécu, ils auraient pu s'éloigner, mais non. Ils ont créé un lien unique et inestimable. Je suis simple témoin de leur relation, mais je suis obligé, pour je ne sais quelle raison, de la comparer à ma relation avec mon propre père. Je sais que cela fait très cliché, mais mon père et moi ne passons pas tant de temps que ça ensemble. Il préfère passer une après-midi avec mon frère, et moi avec ma mère. Il aime la pêche et moi le shopping. Il pourrait passer sa journée à regarder la télévision tandis que les livres comblent parfaitement mon temps libre.

Nous avons une chose en commun, et elle est sacrée : le football. Nous ne ratons aucun match de ligue et encore moins un match de l'équipe de France. Nous avons notre petit rituel : je propose de faire un en-cas pour la soirée sport, il refuse que je le fasse toute seule, il tente de m'aider, mais finit par détruire la cuisine, et nous décidons d'un commun accord que je cuisine moi-même. Nous nous installons sous des plaids sur le canapé et hurlons à chaque but marqué jusqu'au bout de la nuit. Enfin, jusqu'à ce que ma mère descende pour nous dire de faire moins de bruit. Je passe la plupart des matchs à faire mes devoirs, parce que je ne peux pas passer toutes mes soirées devant la télévision sans jamais m'occuper de mes tâches scolaires.

Je me demande si Matthieu aime le football. Je pourrais l'inviter à une de nos soirées. Mais juste une seule, je veux garder cette activité père/fille intacte aussi longtemps que je le pourrais.

Une émission de radio relate les dernières informations lors d'un rapide journal d'informations. D'après ce qu'explique la voix, le réchauffement climatique s'aggrave encore. « Il faut absolument agir, sinon, nous ne nous rendrons compte de nos erreurs passées que lorsqu'il sera trop tard pour sauver la planète » clame haut et fort la charmante dame. Tout le monde sur le plateau approuve sa remarque. J'acquiesce moi aussi, tout à fait d'accord avec elle. J'apprends que le père de Matthieu et Sarah est directeur d'une banque et que la cadette est en classe de troisième et qu'elle rêve de devenir peintre. Matthieu veut, quant à lui, faire carrière dans l'ingénierie environnementale. Lorsque Thiery me demande ce que je compte faire de ma vie, je lui réponds en souriant que je n'ai toujours pas trouvé une carrière même si j'adorerais travailler dans le milieu de l'édition. Les livres m'ont toujours passionné. Je rêve de pouvoir diriger la création de la première et la quatrième de couverte d'un livre.

L'hôpital apparaît devant mes yeux avant même que je m'en rendre compte. J'avais imaginé que le trajet serait plus long. Je suis toujours impressionnée par la grandeur du bâtiment. Il est si imposant qu'à ses côtés, le magasin de bricolage pourtant d'une taille raisonnable, semble ridiculement minuscule. Le père de Matthieu a à peine le temps d'arrêter la voiture que mon petit-ami a déjà bondi hors du véhicule, sûrement trop impatient de pouvoir enfin étreindre la prunelle de ses yeux. Thiery et moi nous regardons et nous sourions en regardant Matthieu sautiller, tel un enfant le lendemain de Noël, en nous disant de nous dépêcher de sortir de la voiture sans pour autant se retourner. Il est adorable. Il remarque que nous ne le suivons plus, il se retourne donc vers nous en faisant une petite moue boudeuse, absolument divine. J'accours vers lui, comme dans les films romantiques que j'aime tant et il m'attrape et me sert si fort dans ses bras que j'ai l'impression de suffoquer, de bonheur, bien évidemment.

Les couloirs de l'hôpital ne sont pas plus accueillants qu'il y a deux semaines. Mais je note une différence marquante : les personnes ont l'air plus souriantes aujourd'hui. Peut-être que la dernière fois, l'univers tentait de me dire que je ne devais pas me rendre dans cette chambre. Dans ce cas, il a l'air de dire que je dois foncer, aujourd'hui. Maintenant que j'y pense, c'est assez amusant, lors de ma dernière visite, je suis repartie en pleurs, le cœur brisé et maudissant Matthieu. Alors qu'aujourd'hui je sers sa main dans la mienne et j'avance confiante vers la chambre qui abrite Sarah, la cadette de la famille Pricier...

Attendez, stop.

Je vais rencontrer la personne la plus importante aux yeux de Matthieu et elle a seulement treize ans ! Dieu sait à quel point les enfants peuvent être cruels. Je ne sais pas ce que je ferais si Sarah ne m'estime pas. Je panique. Et si Matthieu me quittait parce que sa petite sœur ne me trouve pas assez bien pour lui ? Elle le connaît mieux que quiconque, il l'écoutera. Et si je fais une bourde et que je parle d'un sujet tabou ?

Oh non. Je transpire à grosses gouttes à cause de la panique qui me prend à la gorge.

— Elle va t'adorer, j'en suis sûr. Elle adore dessiner et lire, tout comme toi. C'est elle qui a décoré ma chambre de ses œuvres. Mon petit prodige, me dit Matthieu, émerveillé par les talents de sa petite sœur.

Je ris, parce qu'il est mignon, et parce que je l'aime.

Il tourne son visage vers moi, gêné.

— J'en fais trop, n'est-ce pas ? Je ne peux pas m'en empêcher. Sarah est ma petite princesse, ma plus belle pierre précieuse.

— Tu es très mignon. Allons-y, lui dis-je en lui embrassant la joue.

Il me sourit. Il est obligé de me lâcher la main lorsqu'une masse inconnue fonce droit sur lui. Sarah et lui se serrent dans les bras l'un de l'autre. Je craque, ils sont à croquer. J'ai soudain envie de faire un câlin à Daniel. Mais ce ne sera pas pour tout de suite, car Sarah se présente devant moi. Je m'attends à ce qu'elle me serre la main ou qu'elle me fasse la bise. Mais non. Elle m'enlace tandis que j'aperçois Matthieu et Thiery me faire des pouces en l'air, les larmes aux yeux. C'est à mon tour de l'étouffer. Son plâtre me fait un peu mal lorsqu'elle resserre notre étreinte, mais je ne me plains pas. J'ai eu si peur pour elle, mais tout s'est bien terminé. Je suis si heureuse à cet instant.

Elle s'éloigne de moi et s'assied dans un fauteuil roulant, que je n'avais pas remarqué jusqu'à présent, en grimaçant.

— Je suis presque totalement rétablie, mais bon, les médecins préfèrent prendre des précautions, elle m'explique en voyant mon regard interrogateur.

— Mieux vaut prévenir que guérir, comme on dit, je blague.

Elle me fait un clin d'œil et me demande si je peux la pousser, ce que j'accepte avec grand plaisir.

C'est au Fast Food le plus proche que le prochain dilemme s'offre à moi. Thiery m'offre bien gentiment le repas. Je décide de prendre moins que d'habitude, car ce ne sont pas mes parents qui payent cette fois. Je me trouve de nombreux atomes crochus avec Sarah. Matthieu ne manque pas de me faire remarquer qu'il est là. Je lui tire la langue pour simple réponse. Il ne va pas se plaindre parce que je m'entends bien avec sa « petite princesse ». Leur père rit de lui et nous le suivons tous dans son éclat de rire. Je me colle un peu plus à Matthieu pour lui redonner le sourire. Ce qui marche plutôt.

Lorsque Sarah et moi allons chercher nos glaces au comptoir, elle me demande de l'aide parce qu'elle a rendez-vous avec une fille qui lui plaît, mais elle hésite sur la tenue qu'elle devrait choisir pour ne paraître ni négligée, ni trop habillée. Je la questionne quelque peu sur leur relation pour essayer de créer la tenue parfaite. Nous décidons qu'il vaudrait mieux que je vienne l'aider à se préparer avant.

La soirée continue encore pendant une heure puis nous rentrons. Ils me proposent de rester dormir, j'envoie un message à mes parents pour leur demander la permission. Ils acceptent, heureusement.

Je trouve le sommeil dans les bras de Matthieu, après une soirée film avec sa famille. Son odeur m'avait manqué. Il m'avait manqué. Cependant, j'ai craint qu'après le soleil ne vienne la tempête.

B.O.M.I. - Boyfriend Of My ImaginationOù les histoires vivent. Découvrez maintenant