Chapitre 22

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billie shelton


En arrivant à Clamart, j'en suis encore aussi remontée qu'il y a presque une heure. Je lui en veux vraiment d'avoir mis ma relation en l'air, parce que oui : c'est de sa faute.

Il n'y a personne en bas de son bâtiment ce que je trouve plutôt étonnant mais je ne fais pas attention.
Je compose le code qui n'a pas changé depuis 10 ans et monte les escaliers car l'ascenseur ne fonctionne plus depuis un siècle.

Quand j'arrive devant chez lui, je me rappelle qu'il est 17h donc qu'il n'est sûrement pas chez lui mais surtout qu'il vit avec sa grand mère que je n'ai pas envie de déranger.
Alors je me pose sur les escaliers en l'attendant.

Je lance une playlist pour tenter de me calmer avant notre confrontation parce que ça peut partir vite quand on s'embrouille.

Après presque une heure d'attente, j'entends des pas dans les escaliers et je soupire en me sentant presque ridicule d'être ici.

- Billie ?

C'est pas la voix de Mathieu ça.

Le petit garçon me saute dans les bras.

- Qu'est ce que tu fais là ? dit il avec un grand sourire.

C'est Enzo, le petit frère de Mathieu qui rentre sûrement du collège.
J'ai passé tellement de temps chez le polonais que je connais toute sa famille. Mais j'ai toujours porté Enzo dans mon coeur plus que les autres membres. Avec une grand frère comme Mathieu, il a bien besoin de soutien.

- Je venais parler à ton frère mais j'avais peur de déranger ta grand mère.

- Elle est pas là pendant juin, juillet août, elle part en Pologne ! T'as oublié ?

- Non, non... Je suis grave déréglée avec les cours. Il me reste une semaine, après je suis en vacances.

Il se recule toujours avec le sourire aux lèvres.

- Ça faisait longtemps, je suis trop content de te voir !

- Moi aussi, tu m'as manqué...

- Je pensais pas te revoir.

- Moi non plus, comme quoi la vie fait bien les choses.

- On rentre ?

- Bah j'ai pas envie de déranger si y a ton père, t'inquiètes je vais l'attendre ici.

- Y a personne, j'étais censée passer la soirée avec Mathieu mais il va être en retard comme d'hab. J'ai pas envie de manger tout seul, viens.

- Non, c'est pas une bonne idée...

- Mais si, je dirai c'est moi je t'ai forcé.

Je soupire mais me laisse quand même entraîner à l'intérieur par le petit garçon.
J'étais vraiment attachée aux Pruski, c'était une seconde famille.
Quelques temps après avoir rompu tout lien avec l'aîné, j'avais envoyé un message à Karolina pour la remercier de m'avoir hébergée, c'était le minimum. Elle a simplement répondu qu'elle me remerciait d'avoir été de si bonne compagnie et d'avoir aidé à remettre Mathieu sur le droit chemin, même si c'est seulement grâce à elle qu'il a aussi bien tourné.

- Pourquoi t'as mis deux ans à revenir ? demande-t-il alors que nous regardons la télé.

- Des problèmes débiles...

- Et tu vas revenir maintenant que les problèmes sont réglés ?

- C'est pas encore réglé Enzo, c'est pas si simple.

- T'es embrouillée avec Math ?

Je ne réponds pas en feignant d'être concentrée sur la télé. Comment on raconte ça à un enfant de 10 ans ?

- Il était triste un peu quand t'es plus revenu à la maison...

- Je sais.

- Toi aussi t'étais triste ?

- Ouais.

- Vous êtes bêtes.

- Je sais.

C'est un gosse qui est entrain de me faire la leçon, je suis tombée bien bas.

- Billie ?

Je tourne la tête vers lui pour l'écouter.

- Tu peux m'aider avec mes devoirs ? Je suis pas sûr que Mathieu sache faire.

- Bien sûr je vais t'aider. On y va tout de suite.

Il éteint la télévision et me mène jusqu'à sa chambre.
Il s'installe à son bureau complètement en bazar. Je souris, il ressemble beaucoup à Mathieu quand même.

- Tu peux aller chercher une chaise dans la chambre de Math ?

J'hoche la tête avant de me rendre dans la chambre du polonais.
Je me rends compte que j'ai vraiment rien à faire ici et qu'il va être fou de rage quand il va me voir. Mais Enzo avait l'air si content de me retrouver, je ne pouvais pas lui dire non.

Ça a pas mal changé depuis que je suis partie. On dirait presque un studio à la place dans son ancien bureau. C'était un de ses projets ambitieux qu'il s'était promis de réaliser.

Chaque détail s'imprime dans mon esprit. Ça faisait tellement longtemps que je n'étais pas venue... Je regarde son lit mezzanine avec un sourire en coin, pas mal de souvenirs dans celui là aussi.

- Tu viens ? me rappelle la voix d'Enzo.

- J'arrive.

J'attrape la chaise mais ce qui tenait en équilibre à côté tombe par terre.
J'insulte un fantôme imaginaire en me pressant pour tout ramasser.
Majoritairement des vêtements... mais je tombe tout de même sur quelques feuilles griffonnées. Et une photo.

Une photo de nous deux. Abîmée mais quand même là. Sur la photo, j'embrasse sa joue alors qu'il sourit en regardant l'objectif. Je m'en rappelle comme si c'était hier. C'était pendant mon année de terminale, Mathieu travaillait déjà au garage. On était partis en vacances chez ma mère avec les gars parce que la maison était vide l'été. On a des yeux tout petits sur la photo parce qu'on était éclatés à la mort. Il m'avait dit qu'il montrerait cette photo à ses gosses plus tard, ça m'avait fait rire parce que j'étais défoncée. Je savais même pas que cette photo avait survécu au séjour, au voyage et encore moins au temps.

- Billie tu fous quoi ?

- J'arrive, c'est bon.

Je pose la photo sur son bureau.

C'est bizarre qu'il l'ait encore.
Faut qu'il arrête de remuer nos souvenirs ensemble comme ça. Mon coeur et mon cerveau ne sont pas assez résistants. Je suis venue ici parce que je comptais l'engueuler d'avoir balancé à Eliott que j'avais pecho Assaf, pas être nostalgique de nos 18 ans.

Le bon vieux temps ~ PLKOù les histoires vivent. Découvrez maintenant