[Partie 1] Chapitre 13 :

17 3 19
                                    

Durant quelques instants, Laëticia demeura prostrée sur le sol, les jambes légèrement écartées par la chute. Ces quelques instants à peine durant lesquels le monde semblait figé, durant lesquels les quatre adolescents se regardaient tels des chiens de faïence. Silencieux comme des pierres tombales ; tous.

Lorsque le choc fut passé – qu'il soit physique ou émotionnel – tous réagirent avec force. La fille aux cheveux rouges se leva tout aussi aussi précipitamment que la jeune Ménas. Cette dernière, après un regard terrorisé en arrière, prit ses jambes à son cou à travers l'épaisse forêt. Les trois autres la poursuivirent mais c'était peine perdue. En effet, Laëticia connaissait cette partie des bois comme sa poche et personne ne pouvait ne serait-ce qu'espérer la battre sur ce lieu.

Cependant, la course fut serrée. Les trois amis étaient rapides ; sans doute entraînés à l'endurance. Mais cela ne parvint pas à venir à bout de la jeune Ménas qui se dirigeait à la perfection.

Au bout d'une dizaine de minutes, elle avait semé ses poursuivants à travers les broussailles avant de se dissimuler derrière un épais fourré. Quelques interminables millisecondes plus tard, les trois coureurs passèrent devant elle sans la voir et elle put enfin reprendre sa respiration.


Une soudaine haine vint alors l'envahir avec fureur, l'enveloppant de ses bras secs. Qu'avaient-ils, tous, contre elle ? Qu'avait-elle fait de mal ? Rien ! Elle n'avait jamais rien fait ! Elle n'avait toujours fait que subir !

Déjà, à dix ans à peine, on l'avait retirée de son foyer, enlevée à ses parents. Tout ça pour quoi ? À cause d'une stupide rébellion de Ménas, quelques siècles auparavant. Rébellion qui avait entraîné l'exil d'un bon nombre d'individus, contraints de vivre loin de toute forme de civilisation.

Mais qu'avaient-ils demandé, eux, dans cette histoire ? Rien ! Pourquoi venait-on les embêter ? Non, elle n'avait rien fait de mal. Et elle n'eut pas besoin de se replonger dans la nostalgie du passé pour le savoir.

Donc elle avait atterrit ici. Sur cette île démunie de tout, abritant de dangereuses espèces animales ainsi qu'une inquiétante forêt. Alors oui, Laëticia n'avait pas agi comme tous les petits soldats dociles s'empressant de trouver ce village miteux à peine furent-ils arrivés.

Mais pas Laëticia. Elle s'était débrouillée seule. Elle avait construit une cabane seule. Elle avait tout appris de la nature seule. Elle avait élevé Eraflu, le jaguar, seule. Tout cela, elle l'avait fait seule.

Était-ce pour cela qu'ils la recherchaient ? Non. Sans doute pas. Cela, c'était la raison pour laquelle ils ne l'avaient pas encore trouvée – du moins, jusque là ; avant que la curiosité ne la pousse à commettre de compromettantes erreurs.

Alors pourquoi la cherchaient-ils ? Pourquoi la cherchaient-ils tous ?

D'abord, ça avait commencé par des adultes étrangers à l'île et masqués. À peine Laëticia les avait-elle aperçu de sa fenêtre qu'un mauvais pressentiment s'était emparé d'elle. Aussi silencieuse qu'à son habitude, elle les avait suivi du regard, tentant de deviner leurs sombres desseins. Ils étaient trois, vêtus à l'identique comme un unique individu. Ils portaient une combinaison en cuir mat – matière que les Sortilistes affectionnaient tout particulièrement. Une capuche recouvrait leur visage et il était donc impossible de déterminer si il s'agissait d'hommes ou de femmes. La cape claquait sur leurs hautes bottes lors de leur marche rapide et rythmée, comme robotique. Un éclat attira tout particulièrement le regard de l'adolescente qui remarqua qu'ils arboraient tous avec fierté une longue clé dorée retenue autour de leur cou par un long cordon noir.

À un moment donné, le dernier de la file s'était arrêté et avait levé le nez vers le soleil. La jeune Ménas s'était empressée de rentrer sa tête à l'intérieur de sa cabane dans le but de ne pas se faire remarquer. Elle avait néanmoins eut le temps de remarquer le chignon serré de la personne masquée et ses traits gracieusement féminins.

Après quelques secondes, la jeune fille avait risqué un œil à l'extérieur et constaté qu'il n'y avait plus personne.


À peine dix jours plus tard, elle avait vu huit adolescents débarquer et elle n'avait pas tarder à comprendre qu'ils cherchaient quelqu'un. Elle, bien évidemment. Mais ça, elle ne le savait pas sur le moment. Elle se souvenait cependant parfaitement le fou-rire qu'elle avait du taire en voyant l'une des filles du groupe prendre un Krabouga à pleine mains avant de hurler en le laissant tomber. Le petit animal, à l'apparence d'une pierre, s'était laisser tomber sur le pied de la brune qui en avait sentit le poids.

En se remémorant cela, elle se souvint que la fille aux cheveux rouges faisait partie de ce groupe-là. Mais pas le grand blond.

Alors pourquoi la cherchaient-ils tous ? Parce qu'elle n'était pas à l'endroit où elle était supposée se trouver, lui souffla une petite voix dans son esprit. Mais encore ?

Puis, Laëticia se souvint. Elle revit les trois personnes masquées près du village. L'un resté à l'orée de la forêt et les deux autres évoquer le mot « Guéhériste ». Et là, elle comprit. Elle qui avait le pouvoir de guérir. Ils la cherchaient pour cela.

***

Hello ! Chapitre très court (850 mots) annonçant la fin imminente de la Partie I...
Sinon j'ai mis en place des images en chaque début de chapitre afin de faire comprendre sur quelle île nous nous trouvons 🙃
Bisous 😘

Octo/ tome 2 • L'appelOù les histoires vivent. Découvrez maintenant