D'agent à soldat

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*Quatre mois plus tard*

La mort de Guillaume a mis fin à la guerre de clan il y a quelques mois. Néanmoins, il a fallu attendre encore trois mois pour que la guerre officielle soit terminée et que l'armistice soit signée.

Les armées russes ont réussi la prouesse de contourner les Allemands avec une rapidité surprenante. Les Français, les Irlandais et les Britanniques ont fait une résistance héroïque, tout comme les Grecs dans le détroit de Gibraltar. Les Américains et les Canadiens ont achevé la marine allemande dans l'Atlantique. Le camp des Alliés est donc désormais maître sur terre, sur et sous mer mais aussi dans le ciel.

La victoire est totale.

C'est pourquoi je suis dans l'avion avec Herak. Nous sommes les deux seules gradés agents d'élites du clan Roskov, en dehors d'Ella et de Charles, ayant survécu à la guerre des clans et à la guerre en général. Nous sommes sur la tournée de la victoire. Nous avons été reçus et décorés en même temps que les généraux au Kremlin, au Palais Présidentiel d'Athènes, et à Versailles.

"A quoi ressemble la Maison Blanche Natalya ?" me demande Herak, un peu paniqué.

"Je ne sais pas. Je n'ai vu que le Pentagone, et encore seulement une partie. Je ne suis jamais allée à la Maison Blanche."

"Ah..." dit Herak en tournant la tête vers le hublot.

Je pose ma main sur la sienne et lui sourit. Il me regarde et sa peur se dissipe un peu.

"Tout ira bien."

Nous passons le reste du vol à nous reposer et à nous détendre. Une hôtesse me réveille en me serrant légèrement le bras. Je grimace à la pression de sa main sur une de mes blessures non cicatrisée. Elle remarque mon expression et retire sa main immédiatement.

"Pardonnez-moi commandant."

"Non, ne vous excusez pas, ce n'est pas grave."

Je peux voir une certaine peur dans ses yeux. Les miens n'ont pas perdu de leur intensité et semblent toujours faire peur même si ce n'est pas intention. Je lui souris pour la rassurer et elle semble retrouver ses esprits.

"Je voulais seulement vous dire que nous allons bientôt atterrir. Vous m'aviez demandée de vous prévenir."

"Ah oui. Merci."

Elle s'éloigne tandis que je me lève et file vers les toilettes. Je profite de ce moment d'intimité pour réajuster mon tailleur et mon maquillage. Je regarde longuement mon reflet dans le miroir. Il ne reflète pas la vérité. De l'extérieur, mon image est intacte malgré les cicatrices plus ou moins visibles. A l'intérieur... Je ressemble plus à un miroir brisé qu'à une image complète.

Quand je sors des toilettes, je sens le regard désireux d'Herak. Je ne pense pas que cela vienne d'un amour profond mais plutôt du fait que nous avons traversé des années noires et que je suis probablement la seule à pouvoir le comprendre.

Je me racle la gorge pour le faire revenir à la réalité.

"Je suis désolé Natalya." dit-il en rougissant.

"Je ne suis pas prête à me blesser à nouveau Herak. Mais je suis sûre qu'un jour une femme viendra panser tes blessures."

"J'espère."

La voix du pilote nous demandant d'attacher nos ceintures me sort d'une situation délicate. L'atterrissage se passe bien et un homme vient nous chercher à notre sortie. La voiture roule en direction de la Maison Blanche.

Nous sommes conduits dans une grande salle de réception où nous attendent des généraux et les membres du gouvernement. Monsieur et Madame Smith sont présents. Le Président des Etats-Unis s'avancent vers moi et me tend la main.

"Natalya Obliev, j'ai l'honneur et le plaisir de vous décerner cette croix de guerre pour vos faits extraordinaires et votre héroïsme incontestable."

Il agrafe la croix et le ruban à côté des autres décorations reçus en Europe. Herak reçoit la même distinctions sur sa poitrine.

"De plus, au nom de la nation reconnaissante vous avez le privilège de reconnus comme deux citoyens américains."

Je me retrouve donc avec une triple nationalité : russe, française et américaine.

Tout le monde applaudit puis le Président fait un signe et des serveurs arrivent vers nous avec des plateaux contenant des flutes de champagnes et des petits fours. Je prends une flûte par politesse, un peu blasée par l'hypocrisie des officiels ayant attendu que la guerre ait fait des centaines de morts avant de faire quelque chose.

Herak discute avec certains généraux. Monsieur et Madame Smith s'approchent timidement de moi.

"Bonjour Natalya." dit Madame Smith.

"Bonjour."

"Merci pour tout. Je sais que cela est peu par rapport à ce que vous avez fait pour nous et pour le bonheur d'Andrew."

"En sauvant votre fils, je me suis pratiquement condamnée moi-même à la mort. Sans Kirill et Margaux, je ne serais plus de ce monde. Pourtant les deux sont morts alors que la lâcheté a sauvé la vie d'Andrew."

Mes mots sont durs mais il est important pour moi de régler mes comptes et de rétablir toutes les vérités. Monsieur et Madame Smith ne répondent pas, conscients de la véracité de mes paroles.

"Quoi qu'il en soit, je sais que vous n'y êtes pour rien." ajoute-je à voix basse.

"Pouvons-nous essayer de nous entendre ? Nous comprendrons que vous ne voudriez pas, mais nous vous sommes tellement redevables. Bien sûr nous ne révèlerons pas votre métier."

Je hoche la tête et souris. Les deux me prennent dans leur bras.

"Je crois que cette personne essaie de vous parler." dit Madame Smith en faisant un signe du menton, vers une silhouette regardant dans ma direction.

"Veuillez m'excuser." dis-je en sortant sur le balcon.

Quelques minutes plus tard, la personne en question me rejoint.

"Bonsoir commandant. Toutes mes félicitations. Je m'appelle Mila."

"Bonsoir Mila. Que puis-je pour vous ?"

"Je représente l'armée de la Sainte Russie et nous aimerions que vous rejoigniez nos rangs. Nous avons bien conscience que vous sortez à peine d'une guerre meurtrière dans laquelle vous avez été entraînée malgré vous. De plus, nous ne voulons pas vous forcer à rester loin de votre pays ou à empêcher vos blessures de guérir."

"Non, tout va bien. L'armée est dans un coin de ma tête depuis un moment. Je ne pense pas que je pourrais retourner à une vie normale après ces années de terreur et de mort. Rejoindre les rangs de mon pays peut être une bonne transition. Dans quelle section voudriez-vous m'incorporer ?"

"Et bien vu que l'héroïne c'est vous, vous pouvez nous demander un peu ce que vous voulez."

"Je ne sais pas trop. Je ne suis pas une personne de terrain même si je sais me battre. Je tire assez bien mais peut-être pas assez pour intégrer les tireurs d'élites. Pourquoi ne pas rester dans les renseignements ou les services secrets ?"

"Vous pouvez tout à fait rester un agent d'élite du clan Roskov et travailler aussi en tant que militaire pour l'armée. Cela ne pose pas de problème."

"Dans ce cas, où est-ce que je signe ?"

Échec & MatOù les histoires vivent. Découvrez maintenant