Elle ne marcha sur les pieds d'Otto qu'une seule fois. Mais elle ne tomba pas dans ses bras. Pas lors de cette valse, ni les suivantes. Ses mains cessèrent un peu plus de moiter à chaque fois. Et au fil des semaines, même Monsieur Heusser se dérida.
À deux jours de l'anniversaire d'Otto, lors de son dernier cours en la compagnie du roi, il l'applaudit même.
« Mademoiselle Özyidiz, par vos progrès, je me félicite d'avoir été votre professeur. »
Melek s'était contentée de le remercier de ses enseignements. Même si à cause de lui, elle passait ses nuits à tourbillonner. Au point de se réveiller le lendemain matin avec le mal de mer.
Enfin une journée de repos. Rien. Pas de cours de valse, pas de langues étrangères ni de tenue à table, ni d'interrogatoire au goût de qui-est-ce. Rien, le calme totale.
Sa robe était terminée depuis quelques jours et les derniers ajustements étaient finalisés. Elle attendait patiemment dans sa housse, à côté du costume officiel de Wilhelm.
Un frisson traversa Melek. La dernière fois qu'elle l'avait vu ainsi vêtu, la soirée avait été un désastre. Elle avait inondé ses oreillers de ses larmes. Désormais, elle se hâtait de voir Wilhelm le porter.
Elle l'entendit grogner dans son dos. Elle attrapa son bras pour s'en envelopper et retourner aux pays des songes, espérant cette fois-ci vaincre le tournis.
Pour la première fois depuis des semaines, elle pouvait faire la grasse matinée dans ses bras, dans leur lit. Melek ne s'en priverait pas.
Wilhelm devrait bientôt la quitter, toutefois. Il se devait d'accompagner son oncle aux manifestations publiques en l'honneur du souverain. Melek échappant à cette obligation, était libre ce jour-là de vaquer aux occupations de son choix. Au programme, elle envisageait de bouquiner, appeler sa mère, prendre le thé avec Annabell et lire encore.
Meilleure journée de l'année.
Le lendemain cependant, libéré de ses engagements officiels, Otto avait insisté pour partager son soixantième anniversaire en leur compagnie. C'était la fin février et pourtant la chance accordait à cette journée un ciel dégagée et un temps bon, presque chaud pour la fin de l'hiver. Otto avait commandé aux cuisines qu'on leur prépare un brunch et qu'on les serve dans la serre, dans le jardin.
Melek n'y avait encore jamais mis les pieds. À l'automne, elle était paralysée par l'angoisse qu'on la surveille par dessus le muret qui les séparait de la partie publique du parc. L'hiver, le froid l'en avait dissuadé.
Après le brunch qui pouvait durer des heures connaissant la gourmandise du roi, ils rentreraient à l'intérieur pour se retrouver dans le petit salon pour discuter ou jouer à des jeux de société. Otto excellait aux échecs. Melek n'arrivait pas à retenir les règles et n'essayait même plus de jouer avec eux.
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Valse à Löwenstadt (T.3) [TERMINÉ]
RomantikSuite d'Été à Vienne (oui, encore la grosse tête de Melek en couverture) --- À la sortie de l'aéroport, Melek prend enfin conscience des engagements qu'elle a pris en suivant Wilhelm jusqu'à Löwenstadt. Mais loin du palais, elle peut encore toucher...